Chapitre VI

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Ghalia-Meen.

« Tu as dix minutes de retard.

- Je sais lire l'heure, tu ne m'apprends rien. »

Je pose mon sac sur le comptoir tandis que je sens le regard perçant de Jennie se promener sur moi. Dix minutes de retard ce n'est pas la fin du monde mais avec elle, je n'ai même pas le droit de venir deux secondes après son heure de fin. Je me demande pourquoi elle est toujours aussi pressée de quitter la librairie, sa vie ne me parait pas si intéressante.

« Tu devrais vraiment apprendre à parler aux personnes qui sont plus âgées que toi, dit-elle.

- Vous devriez accepter qu'il y ait des gens sur cette terre qui disent ce qui leur passe par la tête sans filtre. Je ne vois pas en quoi est-ce que ce que je t'ai dit est dérangeant.

- On ne peut même pas parler avec toi, fait-elle en roulant des yeux. Bref ! »

Jennie soulève prestement son sac à main et le jette sur son épaule avant de faire le tour du comptoir et d'arriver à ma hauteur.

« J'ai déjà fait le point sur l'argent qu'on a récolté depuis le début de la semaine et j'ai vidé la caisse enregistreuse de la somme la plus importante. Prends bien le temps de faire un bilan sur les livres qu'on a vendu, ceux qui se vendent le mieux, ceux dont on doit refaire le stock et...

- Merci Jennie, je connais mon travail. Tu devrais t'en aller. »

La brune en face de moi hausse un sourcil et pousse un rire agacé, sans rien dire de plus. Elle finit par tourner les talons et s'en aller avant qu'elle ne puisse sûrement sortir une ânerie. Je la regarde s'en aller un moment, puis je fais de mon mieux pour rejoindre le siège derrière le comptoir en tentant de me tenir droite.

C'est bien pour une raison que je suis en retard : je suis malade comme un pangolin, et ce depuis trois jours maintenant. J'ai lutté tant bien que mal pour ne pas que cela s'aggrave mais ça n'a pas marché. Une fièvre monstre, un mal de tête incroyable, un nez bouché. Pas besoin d'être médecin pour deviner que j'ai attrapé une grippe en cette saison. Mais cette fièvre se transforme en une maladie qui va m'obliger à rester alitée pendant de longs jours, et c'est bien ce que je veux éviter. Une fine poussière vient chatouiller mes narines et me provoque immédiatement un éternuement. Mes oreilles s'en bouchent et je comprends bien vite que j'aurais dû suivre un traitement dès le début au lieu de me dire que les médicaments allaient me faire somnoler et, par conséquent, baisser mon efficacité au boulot.

En m'appuyant sur le comptoir, j'en fais le tour et je prends place dans la chaise qui y est installée. Je me sens tellement faible que j'ai juste envie de fermer les yeux et me retrouver dans mon lit pitoyable. Mais je n'ai même pas le temps d'y penser qu'une cliente vient à la caisse dans l'intention d'acheter des livres. Elle pose la pile brutalement sur le comptoir et ne daigne même pas me saluer.

« Combien ça fait ? »

Malgré mes paupières lourdes et le poids qui pèse sur mes épaules, j'avale ma salive, ce qui me fait mal tellement ma gorge est sèche. Qu'est-ce que je fais là déjà ? Je suis vraiment obligée de rester debout dans une telle situation ?

Je prends en main chaque bouquin qu'elle a déposé et je les passe au scanner.

« 82 dollars 97, je dis du mieux que je peux.

- Donnez-moi un sac. »

Je m'abaisse et je sors du tiroir du bas un sac à l'effigie de la librairie dans lequel je range les livres présentés. La dame sort une carte bancaire de laquelle je crédite le montant que j'ai énoncé et elle sort avec son paquet.

L'Ombre du Lilas Blanc, Tome 1.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant