Chapitre quatorze

20 2 1
                                    

Chapitre quatorze - Ezra

Décembre

Lenny pleure depuis dix minutes et reste inconsolable. Notre mère vient de lui annoncer par téléphone qu'elle ne pouvait pas l'accueillir comme prévu à Noël à cause d'un imprévu. Nos parents sont attendus à Nice pour un dîner important et du coup, Lenny n'est pas la bienvenue. Personnellement, j'avais déjà prévu de passer les fêtes de fin d'année ici donc cette information ne me fait ni chaud ni froid mais pour ma sœur.. c'est plus compliqué.

Nous avancions enfin depuis une bonne semaine et déjà, la revoilà partie dans ses travers. Personne n'a le droit d'entrer dans sa chambre et nous sommes donc dans le salon Corentin, Côme et moi comme des cons à ne pas savoir quoi faire. Noël a lieu dans deux jours, Lenny était censée repartir dans le sud ce soir, sa valise déjà prête depuis trois jours dans sa chambre. Dès qu'elle a raccroché, elle s'est enfermée dans sa chambre et n'a pas arrêté de pleurer, nous faisant subir sa peine monstrueuse à travers la porte. Je déteste me sentir si impuissant et me demande combien de fois est-ce qu'elle s'est retrouvée dans cet état sans personne à qui se confier depuis que je suis parti.

- Maman non plus n'est pas là à Noël.

Mes amis se regardent et ont l'air d'avoir une idée en deux secondes après la constatation de Côme.

- On pourrait organiser un truc ici ? Nous quatre et quelques potes dispos de la fac. Ta sœur pourrait se changer les idées et on passerait une bonne soirée. T'en penses quoi ?

Les mains dans les poches, je continue de faire les cent pas dans le salon en réfléchissant.

- J'en sais rien. Je ne sais pas si Lenny appréciera. Elle est un peu... chamboulée en ce moment.

- Je pense que ça pourrait lui faire du bien.

Côme a l'air sûr de lui. Je me sens con l'espace d'un instant quand un éclair de jalousie me traverse à l'idée qu'il l'a cerne mieux que moi. C'est déplacé de ma part et pourtant je ne peux pas m'en empêcher. Depuis quelques jours, ils deviennent inséparables. Il a l'air de lui faire du bien et je le remercie pour ça. Mais j'aimerais tellement pouvoir aider aussi Lenny, sauf que je ne sais pas comment m'y prendre.

- Si on fait un truc comme ça, il faudrait limiter les invités. Dix personnes grand maximum.

- C'est une bonne idée.

Nous passons l'heure qui suit à inviter des gens de la fac qu'on connaît et qui ne fêtent pas Noël en famille non plus. Nous arrivons rapidement à huit invités  : Roxanne, Damien, Oliver, Fabrice, Emilia, Anaïs, Clément et Fanny. Puis Corentin, Côme, Lenny et moi. Ils viennent tous de la fac excepté Oliver et Emilia, des amis de Côme du lycée. Je pense qu'on va passer une belle soirée. 

Très vite, un groupe Wathsapp est créé et chacun donne ses idées. Nous décidons de créer des binômes pour s'offrir des cadeaux avec un budget défini. Côme se retrouve avec.. ma sœur, Corentin avec Emilia, Anaïs avec Damien, Roxanne avec Clement, Fanny avec Fabrice, Oliver avec moi.

- Je vais aller voir ma sœur pour lui en parler. Vous pouvez commencer à faire une liste pour le repas ? Chacun a proposé de ramener quelque chose alors organisez-vous avec eux.

Les garçons acceptent et se concertent rapidement pour savoir quoi acheter. De mon côté, je me dirige prudemment vers la chambre de Lenny et frappe avant d'entrer.

- Éléonore, je peux te parler ?

Blottie sous sa couverture, je ne vois que ses boucles dépasser. Elle renifle et sors sa tête pour me regarder, attendant que je poursuive.

- On a décidé d'organiser Noël ici. Est-ce que ça te ferai plaisir de le fêter avec nous ?

Désormais assise, Lenny sèche ses larmes en m'offrant un sourire. Je m'assieds à ses côtés et la prend dans mes bras pour la réconforter.

- Je sais que je ne devrais pas être si triste, ce n'est pas la première fois que papa et maman ont autre chose à faire que de fêter ce jour avec nous mais... j'aurais vraiment voulu rentrer.

Nos parents lui manquent. Je le sais et je constate que ce manque est plus important que ce que je pensais. Je ne suis pas dans cette situation parce que les revoir trois fois dans l'année me suffit.

- Ça peut être cool de le fêter ici, tu as raison.

Elle essaie de se persuader que c'est la vérité même si au fond elle préférerai être ailleurs.

- Je n'aime pas te savoir si triste. 

Lenny recule et s'essuie les joues avec sa manche de pull, l'air fatiguée.

- Ça va passer, ne t'inquiète pas. Désolée de vous avoir ignoré toute la matinée.

- T'inquiète. Je te laisse tranquille, je vais préparer le repas.

Je sors de la chambre loin d'être rassuré. Je ne sais plus comment faire avec Éléonore. Je sais qu'elle cache quelque chose et que si je veux qu'elle me fasse confiance, je vais devoir être honnête aussi. Nous ne sommes peut-être pas encore prêts à tout s'avouer et j'espère que ce moment viendra rapidement afin que je puisse l'aider.

Le temps de préparer le repas, les garçons sont rentrés chez eux préparer des affaires pour rester toute la semaine. J'espère que ma sœur se joindra à nous mais je doute qu'elle quitte cette foutue chambre pour aujourd'hui.

***
J'avais raison, Lenny n'a fait aucune apparition. Elle s'est rendormie et j'ai préféré la laisse tranquille.

- Mec, tu veux qu'on joue un peu à la console ? Je me fais chier.

Assis sur le canapé, Corentin s'amuse avec une balle de tennis. Côme est sorti prendre l'air et c'est vrai qu'on commence sérieusement à s'ennuyer ici. L'été, tout passe plus vite. Nous n'arrêtions jamais de sortir faire la fête ou se balader en ville mais en hiver, il fait beaucoup trop froid dehors pour s'aventurer plus d'une heure dans les rues. J'ai l'impression que le temps est mis en pause depuis un bon moment.

- Vas-y, je suis chaud.

Nous lançons une partie et très vite, des cris de frustration nous échappe.

- Putain, il fallait aller à gauche ! Vas-y, attention ! Merde.

Corentin s'emporte et m'engueule lorsque je ne respecte pas les consignes.

- Tranquille, il me reste une vie.

Je réapparais une nouvelle fois et reprends la partie où je l'ai laissé. Nous jouons pendant plus d'une heure et lorsque la fatigue arrive, je m'assoupis sur le canapé. Corentin choisit une série qu'il adore et qu'il regarde en boucle mais je ne vois même pas la moitié du premier épisode que déjà, je sombre dans un sommeil profond.

The harmony of our heartsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant