Chapitre 2

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Angleterre, trois ans auparavant.

Le futur lieutenant Hopkins n'était encore qu'un simple mousse, transportant des barils de poudre sur un bateau de corsaire. La transpiration coulait le long de son front couleur ébène, tandis qu'il poussait encore et encore ces immenses barils le long du port, les amenant jusqu'au ponton du bateau. Autour de lui, tout n'était qu'agitation et vacarme, les cris des marins et des capitaines se mêlant à l'animation des mouettes et aux conversations des passants.

Le soleil ardent de l'après-midi tapait sur son crâne, lui donnant l'illusion de rêver par moment, les images devant lui prenant des ondulations irréelles provoquées par le climat auquel il aurait pourtant dû être habitué. Tous les hommes autour de lui portaient des vêtements au tissu fin, pour mieux laisser échapper la chaleur, mais l'aspect collé à leur peau de leurs vêtements ne faisait que prouver combien chacun en souffrait.

C'est en parti pour ces raisons qu'il avait douté des capacités de son esprit, quand il avait relevé la tête. Il soulevait en même temps un des nombreux tonneaux dans ses bras, mobilisant toutes ses forces pour ne poser par-dessus les autres lorsqu'il l'avait aperçue elle, debout et fière, voguant sur son bateau. Une femme.

Au départ, il avait cru mal discerner une maigre silhouette masculine, au loin sur son navire. Après tout, nombre des capitaines étaient des hommes frêles. Pourtant, plus le bâtiment approchait, plus les détails semblaient prouver le contraire.

Ses cheveux flottaient dans le vent, en arrière de son visage. Elle se tenait debout, sur le mat du bateau, accrochée dans un des filets. Était-ce une mousse du navire ? Autour d'elle, chacun semblait s'activer à l'arrivée du port, mais seule elle ne reflétait qu'une attitude confiante et décontractée. Ses habits semblaient blancs et noirs, fins, pas sales comme ceux d'un mousse mais plutôt ceux d'un membre éminent de l'équipage.

Leur navire se rapprochait, encore et encore, et plus celui-ci arrivait vers eux plus Elijah pouvait détailler un peu plus sa silhouette et son visage, qu'il s'était entièrement mis à fixer.

La première chose qu'il pensa en la voyant de plus près était que la beauté et la grâce qu'elle dégageait étaient à couper le souffle. Même de loin, elle était impressionnante, captivante. Mais ensuite, un détail attira son attention et le fit froncer les sourcils, perdant le fil de ses pensées : elle portait un chapeau de corsaire. Cela ne pouvait signifier qu'une chose : Elle était le capitaine.

De surprise il en fit tomber son baril, déversant toute la poudre sur le sol dans un fracas épouvantable qui le fit lui-même sursauter.

Aussitôt, le corsaire en charge du navire qu'il était en train de charger poussa un cri et le jeta au sol, lui donnant un coup de ses immaculées bottes dans le dos sans que le marin en l'ai vu venir à un seul instant.

« Ce n'est pas vrai mais quel incapable ! Regardez-moi ce gâchis ! Personne n'a encore jamais vu ça ! Ah, je n'aurais jamais dû t'embaucher ! Vaurien, moins que rien ! Cela m'apprendra à accueillir et à nourrir d'anciens esclaves ! »

À ces mots et en subissant la rudesse de cet homme, la fierté d'Hopkins prit un violent coup, mais il se contenta de garder la tête baissée en attente du châtiment qui ne saurait tarder, ne répliquant strictement rien et ravalant sa fierté qui était comme une entrave dans sa gorge.

Le capitaine dégainait son sabre et s'apprêtait à lui en asséner un coup lorsque, lui aussi, l'aperçut. Elle était amarrée au port et descendait de son bateau, la tête haute et le regard flamboyant. De surprise, il en lâcha son sabre, le ramassant dans la précipitation pour aller aussitôt à sa rencontre, chancelant.

Les larmes de la merOù les histoires vivent. Découvrez maintenant