Elle s'était habillée aussi chaudement que possible, pour parer au froid glacial qui envahissait ses extrémités et la moindre parcelle de peau dénudée. Un long manteau marron la recouvrait, assorti d'une paire de bottes sombres ainsi que d'une écharpe aux mêmes tons. Ses cheveux, attachés en une queue de cheval dans son dos, avaient été mis ainsi pour éviter qu'on ne reconnaisse une femme en plein milieu des rues et à cette heure tardive. Bien que sa silhouette ne fût pas entièrement masquée avec son manteau, elle se sentait plus en sécurité en prenant des précautions.
Le trajet à cheval jusqu'à la ville avait été d'une rapidité impressionnante. Trop perdue dans ses pensées et dans tout ce qu'elle avait à faire, elle en avait manqué se perdre. Ce n'était que par le biais de son subconscient qu'elle s'était retrouvée à l'entrée de la ville.
Il fallait avouer que les paroles énigmatiques de Leonid l'avaient troublé, bien plus qu'elle ne l'admettait. Il n'était pas du genre à communiquer des informations si celles-ci n'avaient pas un but bien précis, et le fait même qu'il lui ait confié une mission était étrange. Elle ne savait pas si elle devait s'inquiéter davantage pour son père ou pour elle-même.
Maintenant qu'elle marchait dans les rues silencieuses de la ville qui l'avait pratiquement vue grandir, elle ne se sentait plus aussi en sécurité qu'à son départ. C'était comme si une force obscure grandissait en elle, n'attendant qu'une occasion pour sortir et rejoindre la nuit. Elle tordit la bouche. Il fallait qu'elle arrête. Ce qu'elle pouvait être dramatique parfois...
Ses bottes martelaient le sol sans le vouloir, avançant rapidement mais aussi silencieusement que possible. Des voix de marins résonnaient tout de même vers le port, sûrement encore dans des auberges ou des tavernes. Pour eux, la nuit n'était pas près de commencer.
Elle savait que dans l'obscurité, aucun des environs n'était sauf pour une femme seule. Même pour un capitaine de navire reconnu et aguerri.
Elle ne connaissait pas beaucoup d'anecdotes sur sa mère, mais son père lui avait parfois raconté leur rencontre, au beau milieu de la nuit.
Ce fameux moment où, rentrant d'une soirée avec ses amis, et apparemment un peu trop éméché, il avait cru halluciner devant la jeune femme se tenant seule au bord du quai. Elle semblait être en plein tourment, comme si la mer agitée de ce soir-là était à la hauteur de ses pensées tumultueuses. Il s'était approché, hésitant et surtout timide.
Il n'aurait pas osé l'aborder en temps normal. Lui, le cartographe débutant, qui vivait de sa passion et de ses aventures. Il n'allait pas vers les femmes. Mais, peut-être sous l'influence de l'alcool, cette fois-ci il en avait l'envie et le courage.
Il fit quelques pas de plus, laissant ses camarades loin derrière lui. Personne ne risquait de remarquer qu'il était resté sur le port.
« Etes-vous perdue ? »
C'était une question idiote, il en avait conscience. Mais il ne voyait pas comment aborder cette inconnue autrement. Surprise, elle en avait sursauté et s'était tournée vers lui.
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Les larmes de la mer
AdventureAdryanna est corsaire. Depuis l'enfance, cela a toujours été le but ultime de sa vie, prendre la mer pour faire régner la loi. Quand son père disparaît dans une expédition douteuse, ce sont tous ses repères qui s'envolent, en même temps que sa raiso...