Chapitre 36

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Ce qu'Adryanna pouvait détester cet homme. Il ne lui rappelait que trop bien le genre de personnes contre qui son père l'avait mise en garde, des années plus tôt, alors qu'ils faisaient une de leurs balades à cheval habituelles.

Elle lui avait demandé pourquoi.

« Ils sont des puissants dans ce monde. Tant que les gens comme nous ne rentrent pas dans leur univers, ils n'ont rien à nous offrir et nous n'avons rien à leur demander. Entrer dans leur cercle, c'est tendre à accepter des propositions douteuses, qui te feraient renier tes valeurs.

— Mais si parfois ils sont la seule solution pour nous tirer d'affaire ?

— Alors c'est que tu n'as pas assez cherché. Car, si tu crois que la solution se trouve dans l'un d'entre eux, tu risques de découvrir une multitude de problèmes que jamais tu n'aurais imaginé.

— Maman aurait eu besoin de leur aide. »

Le regard que lui avait fait son père à cet instant lui avait fait froid dans le dos. Il n'avait rien répondu avant de longues secondes.

« Crois-moi, ta mère se consumerait de culpabilité si elle se rendait compte des conséquences qu'ont eu ses choix. »

Elle n'avait plus rien osé dire. Après tout, elle ne savait pas quels choix sa mère avait fait. Et surtout, elle savait encore moins ce qui avait poussé son père à la laisser faire.

Un cahot la ramena au présent, la forçant à se redresser.

Assise dans la calèche avec Makarios, elle se tenait aussi droite que si l'on avait tenu un balai dans son dos. Son visage était détendu, mais strict, et ses cheveux retombaient avec élégance de part et d'autre de ses épaules. Comme par provocation, le blond se tenait de façon bien plus affalée, le bras posé le long du bois de la calèche, et la tête à peine inclinée.

Il était juste en face d'elle, et ne cessait de jouer avec ses nerfs, regardant de façon totalement consciente un point juste à côté de son visage, comme s'il regardait le paysage. Mais elle avait pleinement l'impression d'être fixée.

Elle avala en s'humectant les lèvres.

« La résidence de mon père n'est pas à côté pour vous. Et plus particulièrement, Londres, n'est pas à côté de chez vous. Pourquoi venir ? »

Il souffla du nez.

« Vous vous répétez, ma chère. Pensez-vous que ma réponse va changer ?

— J'ose espérer qu'elle sera plus...précise, mon cher.

— Navré de vous détromper. J'ai de nombreux investissements dans la région, je me dois de protéger chacun d'entre eux.

— C'est intéressant.

— Quoi donc ?

— Le fait que vous soyez le genre d'homme à investir à autant d'endroits à la fois. Je vous croyais plus prudent. »

Un nouveau rire à peine inaudible sortit de ses lèvres.

« Vous n'y connaissez rien. Je suis venu ici des années avant votre naissance, et j'y resterais bien après votre mort. »

Elle fronça les sourcils. Était-il en train de délirer sous l'influence de son égo, ou sous-entendait-il qu'elle mourrait bien avant ? Elle plissa les yeux, essayant de lire la potentielle menace à peine voilée. Il eut un sourire en coin arrogant, comme s'il la mettait au défi de comprendre, tandis qu'elle le sondait. Vouloir la tuer n'aurait aucun sens, alors qu'il venait de parler de protéger ses investissements, dans lesquels elle semblait apparemment comprise.

Les larmes de la merOù les histoires vivent. Découvrez maintenant