Chapitre 19

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Ismaël était pensif. Le regard fixé sur le jardin, il ne semblait pas vouloir exprimer un seul des mots qu'il avait en tête. Juste derrière lui, un homme habillé à la façon d'un gentleman fortuné attendait.

Le père d'Adryanna dégageait une certaine inquiétude en même temps qu'une force tranquille, comme si rien de ce qu'il se passait ne l'atteignait en surface. Si sa fille avait été présente, elle aurait vu que la ligne du front de son père était bien plus plissée que d'habitude, signe qu'il se faisait du souci pour quelque chose. Mais il était dos à son interlocuteur, et ne laissait transparaitre dans sa voix qu'une inquiétude contrôlée et parfaitement logique.

« Vous en êtes sûr ? La dernière fois que je lui ai donné ce traitement, elle ne le supportait pas et cela l'a rendu malade des jours durant. »

L'homme derrière lui hocha la tête, empreint de respect et en même temps très sûr de lui.

« Je peux vous l'affirmer, nous avons tout revu à zéro et il y aura bien moins d'effets secondaires. »

La voix du père se fit directe et sèche.

« Qu'entendez-vous par moins ?

— Ce que je veux dire, c'est qu'elle souffrira forcément de troubles alimentaires comme des nausées et ce qui suit, mais ce n'est rien comparé aux avantages qu'offre le traitement.

— Et comment est-ce que cela va enrayer ses...problèmes ?

— C'est très simple, fatiguer son autre elle lui permettra de ne pas se montrer et ainsi de garder le contrôle d'elle-même. »

Le scientifique n'avait pas répondu de façon directe, ce qui faisait d'autant plus tiquer Ismaël.

« Mais... Cela ne risque-t-il pas de la fatiguer elle aussi ?

— Si, bien évidemment, mais à l'heure actuelle il s'agit de la meilleure proposition que nous ayons. Personne dans tout le pays ne peut se vanter d'avoir mis au point une méthode aussi avancée quant à ses troubles, et nous ne sommes même pas sûrs d'un jour parvenir à une meilleure option que celle que nous vous proposons actuellement.

— Je vois... »

Le père de la jeune femme resta quelques instants interdit, observant sa fille à travers la vitre de son bureau. D'ici, il voyait tous les jardins, ainsi que la mer qui s'abattait sur la rive en s'y jetant corps et âme. Son regard ne remarqua même pas combien le visage de celui qu'il considérait comme son gendre était tendu, ni même sa proximité avec elle qu'il aurait en temps normal immédiatement écourtée d'une façon ou d'une autre, et se contenta de dire en regardant au loin :

« Très bien, je lui ferais tester d'ici quelques jours.

— C'est que...J'ai cru comprendre que vous partiez bientôt, et mieux vaudrait confier à quelqu'un la responsabilité de surveiller votre fille, pour être sûr...Enfin, vous savez, être certain qu'elle suit bien le traitement. »

Ismaël se tourna sans prévenir, le visage un peu plus dur.

« J'ai confiance en ma fille, si je lui demande de prendre ce traitement et que je lui explique pourquoi, elle le fera. De votre côté avez-vous pu avancer sur vos recherches ? »

Le scientifique baissa les yeux sur ses chaussures, méticuleusement nettoyées malgré la quantité de boue et de terre présentes sur le domaine.

« Je dois vous avouer, Monsieur, que les premières analyses n'ont rien donné. Mais si vous nous laissiez marchander et échanger avec la Medvedev...

— Non. Je vous ai déjà répondu à ce sujet, c'est non. »

Le regard d'Ismaël jetait des éclairs. Il regardait droit dans les yeux l'homme en face de lui, sans être violent ou trop sec, mais son ton était sans appel.

Les larmes de la merOù les histoires vivent. Découvrez maintenant