Le soleil se répercute sur mon épiderme et peut-être pour la dernière fois. Demain a lieu le jour du jugement.
Tous les ans, le roi de notre monde Yolis, tire au sort le nom d'une femme présélectionnée. Ces femmes qui attendent ce jour se nomment les : Égides. Et malheureusement pour moi, j'en fais partie. Jusqu'à ma mort, ce qui pourrait advenir dans des années, je devrais subir ce tirage au sort jusqu'à ce que le roi découvre sa promise.
Étrange me diras-tu ?
Non. C'est ainsi qu'est régit notre monde. Nos lois ne nous permettent pas de grandes marges de manœuvre. Je suis orpheline donc personne ne me pleure quelque part. Lorsqu'ils sont venus me chercher dans mon orphelinat, j'ai cru à une bénédiction puis j'ai vite déchanté lorsque j'ai assisté à ma première Éxula. Diamond avait été choisie, elle a été unie au Roi, pour être exécutée le surlendemain comme une malpropre. Depuis, je cherche un moyen de sortir de cet enfer et je l'ai trouvé. Si un jour, je suis choisi, je ne me laisserai pas faire. S'il croit qu'il pourra faire de moi sa chose sans que je ne me défende, c'est mal me connaître. Cela dit, son altesse sérénissime ne risque pas de nous connaître puisque le harem est fermé toute l'année. Il ne s'ouvre que la veille du jugement. Je ne sais pas de quoi seront faites les prochaines heures, mais je le sens, mon tour arrive.
Les coups pleuvent contre le mannequin, je frappe encore, encore et encore. Je me défoule, j'en ai besoin. Nous avons tout au harem, même des instructeurs de combat, cela dit je suis la seule à prendre de tels cours. Mes congénères sont trop sensibles pour ce genre de choses. Nous sommes une trentaine et nous nous connaissons toutes. Je n'ai pas d'affinités particulières avec elles, quand c'était les anciennes c'était différent. Crisi m'a fait juré de me battre avant d'être exécutée, elle me l'a fait promettre et je compte bien m'y tenir. Voilà, pourquoi je suis dans cette pièce à suer depuis des années. Dix ans que je m'entraîne chaque jour.
Une fois que mes muscles commencent à me faire mal plus de trois heures après le début de ma séance, je file prendre ma douche. J'ai cette impression que je dois profiter que le moment est venu, mais c'est un tirage au sort. Je secoue la tête pour envoyer tout cela le plus loin de moi.
Lorsque je suis propre, mon corps se dirige vers la grande terrasse de ma chambre pour s'installer sur un bain de soleil. Ma jupe est courte, mon haut aussi dévoilant ainsi mon ventre plat. Je m'allonge puis ferme les yeux. Il me faut quelques secondes pour calmer ma respiration, mon rythme cardiaque est lent, il ne me faut pas longtemps pour que l'explosion survienne dans mon esprit. Des milliers de couleurs plus chatoyantes les unes que les autres, puis un long tunnel. Je le suis sans aucune peur. J'ai l'habitude de former ainsi le pont entre mon esprit logique et mon imaginaire. C'est par ce biais que j'imagine le monde extérieur, parce que je suppose qu'il a changé.
Les Égides n'ont pas accès au reste du monde. Nous sommes installées dans un immeuble gigantesque qui surplombe la cité de Démonia. Il y a longtemps que les anciennes civilisations ont disparu, il ne reste plus que quelques édifices des vieilles villes, mais rien de spectaculaire. Je vis sur ce que les anciens appelaient New-York. Notre immeuble est l'un des plus protégés, les seuls personnes à pouvoir entrer et sortir des lieux sont les gardes ainsi que le personnel. Nous, nous sommes cantonnés à nos luxueux appartements, mais la solitude est notre plus fidèle compagne.
J'ai un avantage par rapport à mes congénères, je m'acclimate parfaitement, j'ai une issue de secours qui m'attend depuis deux longues années et mon imagination est débordante. Presque tous les après-midi, je m'installe ici afin d'imaginer le monde. Je tiens même un carnet de chacun de mes rêves. Ils sont extrêmement nets.
Notre monde est composé de plusieurs espèces. Les humains sont peu nombreux et leur sang est dilué dans toutes les autres races. De ce que je peux voir avec les gardes : les vampires et les Changelins ou métamorphes sont les plus nombreux. Les trois quart des gardes et du personnel sont des métamorphes : loups, léopards, ours. Le reste est soit mi-vampire, mi-métamorphe, soit vampire. Bien entendu, les vampires n'ont rien en commun avec les anciennes légendes folkloriques. Ceux-ci ne boivent pas de sang, hormis lors des rapports de ce que m'a appris l'une de mes consœur et ils ne disparaissent pas au soleil. Ils ont une longévité plus grande, mais ne sont pas insensibles à la mort.
Certaines Égides sont issus de toutes les espèces, je suis la dernière humaine. Crisi était unique avant moi, mais c'était il y a déjà huit ans. Je ne parviens pas à oublier ses iris noisettes, sa chevelure rousse et sa peau crémeuse. Elle était si douce et si belle.
Je secoue une nouvelle fois la tête, je veux rêver, pas cauchemarder. Je me replonge dans la vision que j'ai créé et je souris c'est plus fort que moi. C'est une jeune femme qui discute avec un garçon. Ils sont mignons, j'imagine quelle sera leur vie. Ils ont leur premier rendez-vous ainsi que leur première fois. Mon cœur se serre à cette pensée. Je sais à quoi ressemblera la mienne : à un viol.
Le monde dans lequel j'évolue n'a rien de tendre. Les hommes prennent ce qu'ils veulent. Les lois sont strictes et intransigeantes, c'est pour ça que j'ai besoin de cette échappatoire. Je ne sais pas ce qui m'arrivera, mais je me battrai. De ce que j'ai lu dans les différents livres, une caste supérieure maintient les autres sous emprise que ce soit en se servant de la technologie ou de la force. Les vampires et les métamorphes ont l'ascendant sur les autres. Je n'ai jamais vu de fées, ou encore d'elfes. Ils sont le bas de l'échelle, enfin c'est ce que disent les livres, mais est-ce vrai ?
Je me réfugie un peu plus dans mon rêve. Voir cette femme et cette homme s'aimer me plaît. Ils s'aiment, c'est tout ce qui compte. Ils prennent soin l'un de l'autre avec tendresse, tout ce dont je rêve.
Le roi Ran est un monstre et je ne le laisserai pas me briser comme il l'a fait avec mes prédécesseurs. Je n'hésiterai pas à mettre fin à mes jours plutôt que de lui céder un pouce de moi.
Mon rêve se poursuit, je les vois avoir des enfants, des petits-enfants. Je lis le bonheur sur leurs visages et je les vois mourir. Une belle vie remplie de joie.
Mon cœur se serre, je me redresse, puis pars écrire tout mon rêve dans mon journal. Je suis sortie de ma rédaction par des coups à la porte.
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Sacrifice - Dark romance dystopique -
RomantizmTous les ans, un tirage au sort a lieu parmi les femmes pour devenir la compagne consor du roi, mais seulement pour une seule nuit et elle est exécutée le lendemain. Jusqu'à ce qu'elle arrive, celle qui lui est destinée La prophétie l'a annoncé : c...