Chapitre 39 - Un spectacle lamentable.

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Dax

 J'ai commencé à développer des sentiments pour ce petit ange il y a environ un an. Je ne dirais pas que cela a été le coup de foudre, mais, je dois avouer que j'ai tout de suite été intrigué par la femme qu'était devenu la petite fille des toilettes, mais aussi le personnage de némésis qu'elle incarnait.

Je l'ai épié de loin chaque jour depuis. J'ai appris à la connaitre sur le bout des doigts. Je me suis renseigné sur les petites manies que j'avais remarqué chez elle. Comme le fait de ne jamais se laisser toucher. De toujours enfiler un pantalon, jamais de robes ou de jupes. D'aller se cacher derrière la benne à ordure de la ruelle qui jouxte le centre médical pour fumer. Son combo pastille/gel désinfectant après chaque cigarette. Mordiller les petites peaux qui entourent ses ongles quand son stress monte d'un cran.

Toutes ses petites choses qui font d'elle ce qu'elle est aujourd'hui. Une nana imparfaite, qui souffre de cette vie, mais qui, pourtant, donne tout ce qu'elle a pour les autres. Il n'y a qu'à voir son dévouement envers sa grand-mère et sa mère. Sans compter toutes ces femmes qu'elles souhaitent aider alors qu'elle se noie dans ses propres tourments.

Mais elle ne dit rien. Elle préfère souffrir en silence que de dépendre de quelqu'un d'autre. Elle a appris dès son plus jeune âge qu'elle ne pouvait compter que sur elle-même. Ses casseroles sont nombreuses. Mais elle les porte sans jamais se laisser écraser par leurs poids.

C'est une putain de warrior.

Main dans la main jusqu'à la dernière seconde, je lance un coup d'œil dans sa direction. À chaque pas qui nous rapproche de Washington, son visage se ferme. Je la sens anxieuse.

— Peu importe ce qu'il se passe une fois à l'intérieur, si tu as le moindre problème, tu viens me voir. D'accord ?

Elle opine du chef, sans pour autant ouvrir la bouche, ni même tourner la tête dans ma direction. Je retiens un soupir de frustration.

Sa mère et Nina nous suivent de près sans parler. Je les sens fébriles, pour deux raisons différentes. L'une a hâte de voir à quoi ressemble Washington, l'autre craint pour sa vie.

Je me tourne légèrement vers la deuxième.

— Il me faut la clef USB.

Dès que je les aurai déposé chez elles et Nina chez moi, j'ai pour ordre d'aller directement voir le Gouverneur pour lui remettre en main propre.

— Non.

La voix dure et intransigeante de Gwen me surprend quelque peu.

— Hors de question de te donner la seule garantie pour ma mère de rester en vie. S'il veut sa clef, je lui remettrais moi-même.

Très mauvaise idée, putain.

Cependant, je ne réplique pas et acquiesce simplement. Traitez-moi de faible si vous le voulez, mais cela veut dire une occasion de la revoir rapidement.

Nous traversons sans encombre le même passage qu'à l'aller. L'entrepôt qui me semblait défraichi il y a une semaine me paraît flambant neuf après avoir arpenté les rues, abandonnées depuis trente ans, de la plaine déserte. J'y suis allé plus d'une fois pour maintes missions, mais ce sentiment revient à chaque fois.

La FaucheuseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant