La musique faisait vibrer les tympans de Mike toute la nuit. Aucune importance si ça les lui briserait. Et s'il pouvait mourir, là maintenant, ce serait parfait. Portant une cigarette à ses lèvres tuméfiées, il avala la fumée dans une terrible mélancolie et enchaîna avec une gorgée de whisky qu'il avait piqué à son père. Celui-ci était parti après la visite imprévue du voisin, probablement pour se prendre une nouvelle cuite. Mike n'espérait pas le revoir ce soir.
Son téléphone sonna et il reconnût le nom de Jay sur l'écran mais il ne décrocha pas. Le cœur serré en repensant aux allégations de Louis, il avait l'impression de ne pas avoir su défendre son ami. Il n'était même pas assez fort pour ça.
— Je suis vraiment pathétique, lâcha Mike en vidant le verre suivant.
Quand il retira ses écouteurs un instant, un bruit curieux attira son attention. Le jeune homme abandonna son verre et avança, la cigarette au bout des lèvres, jusqu'à la fenêtre. Une voiture vide avec le moteur en marche était stationnée devant la porte d'entrée. Les cris indiquaient un conflit entre deux parties, dont une féminine. Mike se hâta alors à sortir de son logement pour descendre dans le hall et il y vit une jeune femme qui devait avoir son âge se disputer avec un homme de la quarantaine d'années. Il reconnût Chris, un voisin qui avait déménagé quelques jours plus tôt, sa compagne l'avait viré.
— Que se passe-t-il ? demanda Mike.
— Mêle-toi de tes oignons ! s'écria Chris.
La jeune femme tourna sa tête en sa direction le temps d'un instant, laissa ses yeux descendre sur ses lèvres rougies et se focalisa de nouveau sur l'ex petit-ami de sa mère, Patty.
— Il faudra t'y faire, Chris ! Ma mère ne veut plus de toi. Fallait réfléchir avant de tremper ton biscuit dans le lait des autres !
— Espèce de salope, laisse-moi la voir ! gronda Chris en agrippant son bras.
— Eh ! Lâche-la ! intervint Mike en repoussant l'ennemi.
Avec une force surpassant la sienne, Chris ricana en dévisageant le regard émacié du garçon.
— Rends-toi service ; rentre chez toi, sale gosse.
Mike sortit son téléphone et composa le numéro de la police devant ses yeux, un sourire narquois illuminant son visage.
— On peut les attendre ensemble aussi, ça me va.
— Tu les appellerais pas, pouffa Chris.
— Tu veux parier ? rétorqua Mike, prêt à appuyer sur la touche.
Il le sentit défaillir. Chris reporta son regard sur la jeune femme et lâcha enfin sa prise. Il leva ses deux bras en signe d'abandon et revint sur ses pas sans rien ajouter. Cependant, il adressa un dernier regard menaçant à Mike en démarrant son vieux véhicule. Le jeune homme le regarda s'éloigner puis croisa le regard de la fille qu'il reconnût comme sa voisine.
— Tu vas bien ? s'approcha-t-il.
— Hum, oui, merci. Merci beaucoup de m'avoir aidée. Chris peut être virulent parfois.
— Je connais ce type de personne.
Elle sourit timidement et regarda de nouveau ses lèvres abimées le temps de quelques secondes, mais ne commenta pas. Ses joues rondes et ses yeux en forme d'amande faisaient bondir le cœur de Mike. Une beauté hors du commun qui happait son attention. Il la détaillait inconsciemment, admirant son épaisse chevelure brune et ses yeux d'une couleur vert forêt auxquels s'y perdre paraissait paradisiaque.
— Je m'appelle Megan.
Il rougit en prenant conscience de sa distraction et serra maladroitement la main de sa voisine.
— Je sais. Moi, c'est-
— Mike. Je sais aussi.
Intimidé par l'assurance de sa voix, le jeune homme passa son autre main derrière la nuque et sentit la température de son corps s'élever. Il ne savait pas si c'était sa beauté qui le distrayait ou si sa présence magnétisante le bouleversait. Megan éleva un sourcil et lui demanda s'il pouvait lui lâcher la main.
— Ah oui ! Pardon...
La gêne s'intensifia lorsqu'il réalisa que la sienne était incroyablement moite.
— C'est dingue, je ne t'ai jamais vraiment croisé ici, dit Megan.
— Mais tu connais mon prénom, constata Mike.
— Évidemment, t'es le seul de mon âge dans l'immeuble qui n'a jamais été scolarisé à l'école du coin. Pourtant, je jurerais que tu vis ici depuis plus longtemps que moi.
— Hm, c'est vrai. Je n'étudie pas...
Alors qu'il allait se justifier, Megan haussa ses épaules.
— Ça peut arriver.
Ses poils étaient hérissés. Vêtu d'un gilet large, il le retira pour le poser sur les épaules de Megan, n'osant pas saisir ses bras pour les faire rentrer dans les manches. C'était la première fois qu'il se trouvait aussi proche d'une femme et ça le pétrifiait.
— Merci, dit-elle timidement. Mais je dois retourner chez moi de toute façon.
— Tu peux le garder, répondit-il précipitamment.
— Ah vraiment ? C'est parce que t'en as déjà beaucoup ?
— Non. Mais si tu veux le rendre plus tard, tu peux. Et si tu veux le garder, tu peux aussi.
Bon sang, je ne sais plus parler.
Elle rit. Pas par moquerie mais elle rit sincèrement. Purement. Un rire innocent qui appréciait qu'il se sente intimidé en sa présence.
— Merci, Mike.
— Bonne nuit, la salua-t-il avec regret.
— Bonne nuit, Mike. Et n'oublie pas de prendre soin de tes lèvres. Tu pourrais bien les utiliser prochainement.
Et sur ces mots, elle franchit le seuil de son logement pour y disparaître dans la pénombre. Troublé, il frôla sa lèvre tuméfiée sur le bout des doigts et se demanda ce qu'elle voulait dire. C'était bien un message caché ? Ou c'était le désir au fond de lui qui se manifestait ?
Mike ne bougea pas, le sourire plaqué sur le visage et les papillons pleins le ventre. Il ne la connaissait pas mais cette fascination naissante n'était pas prête de s'en aller et quelque chose en lui assurait que ça ne serait pas leur dernière rencontre. Il avait déjà hâte de la prochaine.
Rien ne l'attendait dans son appartement, à part un verre rempli et sa cigarette à moitié entamée qu'il avait éteinte en partant. Il avança de quelques pas vers l'extérieur et vit les étoiles briller dans le ciel. Une si belle image qu'il ne se lassait jamais d'admirer. Mike s'assit alors sur les marches de l'entrée et contempla le monde devant lui silencieusement.
— Tu ne rentres pas chez toi ?
La voix féminine de Megan le sortit de sa transe et il se leva précipitamment. Elle avait encore son gilet.
— Mike ?
— Euh oui. Enfin non, je ne rentre pas tout de suite.
— Je peux te joindre ? Tu regardais les étoiles, non ?
— Oui, oui. C'est ça.
Elle s'assit et il l'imita. Son bras frôla le sien, ce qui était bien loin de lui déplaire.
— Pourquoi tu ne rentres pas chez toi ?
— Pour regarder les étoiles.
— Tu peux les regarder depuis ta fenêtre.
— C'est vrai.
— Mais tu n'en as pas envie ?
— C'est ça. J'en ai pas envie.
Même avec son gilet, Megan semblait encore frissonner. Elle sourit à travers le grelottement de sa mâchoire et évita soigneusement de croiser son regard. Devait-il lui proposer de rentrer à l'intérieur ? Devait-il approcher son corps pour la tenir chaud ? Mais il venait de la rencontrer. Pourtant, il avait l'impression qu'elle avait toujours été là.
— Tu sais que tu empestes l'alcool ?
Les gros yeux, il se crispa et se sentit affreusement gêné. Qu'est-ce qu'elle devait bien se dire sur lui ? Un jeune homme de dix-sept ans qui boit déjà comme un trou au milieu de la nuit. Mais Megan ne le jugea pas et continua d'admirer les étoiles.
— Je me doucherai quand je rentrerai, bafouilla Mike.
— Oh, ça ne fait rien. J'imagine que ton physique te donne un laisser-passer.
Ses joues s'empourprèrent de nouveau. Personne ne lui avait dit qu'il était beau. Les filles ne l'approchaient jamais et préféraient toujours le physique de Jay. Il ne sût comment réagir. Était-il censé la remercier juste comme ça ?
— Tu penses à qui quand tu regardes les étoiles ? demanda Megan.
— Hum ?
— Quand tu les regardes, tu as cette tristesse dans tes yeux. J'imagine que quelqu'un te manque.
— Ah. Oui... J'ai bien quelqu'un. Ma mère.
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J'espère que ce chapitre vous a plu, n'hésitez pas à commenter :)
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Where hope leads us
Mystery / ThrillerDécouvre l'histoire d'un père et sa fille dans l'errance d'une vérité lointaine, où la vie et la mort ensemble s'entremêlent. *************************************************************************************** C'est une histoire que j'ai écrite...