Where hope leads us

chapitre 26

     Roulant jusqu'à l'hôtel choisi par Lucy à une trentaine de minutes, le trio voyagea dans le silence avec Max au volant. Au siège passager dormait Mike tandis que sa fille était accaparée par son téléphone. À la découverte du meurtre de Nikolaï et l'éventualité d'un lien avec celui de Megan, Lucy avait raccordé les dates ; un mois plus tôt, l'ancien client de Mike était tué, quelques jours suivant leur rencontre après dix ans de calme. Prenant ce détail comme une connexion qui les rapprochait de la vérité, ils espéraient une avancée déterminante pour répondre à l'objectif de Mike. Le lendemain ne se prédisait plus, chaque jour approchait la date fatidique et l'incertitude effaçait les couleurs de leur monde, dans une lutte constante pour garder espoir.
      Max tourna la tête en direction de son ami et sourit à le voir dormir paisiblement. Une réaction qui lui échappa naturellement mais qui attisa la curiosité de Lucy.
      — Quelque chose a changé d'un coup.
      — Co-comment ça ? bafouilla Max.
      — Toi et papa. Ce midi, c'était si froid entre vous, rappela-t-elle. Et là, tu le regardes avec des yeux de merlan frit.
      L'expression le fit rire mais il ne répondit pas à son insinuation.
     J'aurais pu l'embrasser si tu n'étais pas arrivée.
     Comme si elle pouvait l'entendre penser, Lucy s'exclama et se couvrit la bouche avec ses petites mains. Sa réaction amusa presque Max qui conserva son sérieux en repensant au baiser inachevé. Un presque-baiser.
     — Quand vous étiez allongés... Oh mon dieu ! Comment j'ai pu ne rien voir ?
     — C'est ça, souffla Max. Comment t'as pu ne rien voir ?
     — J'ai vraiment interrompu quelque chose ? gémit Lucy. C'est si soudain... Raconte-moi ! Tu lui as enfin dit que tu l'aimais alors ?
     — Quoi ? Non ! Non... On ne s'est rien dit du tout.
     Confuse, la jeune femme fronça ses sourcils, s'éloigna du dos de son siège et se pencha sur son épaule. Son regard d'inquisitrice croisa celui de Max où le voile de la tristesse s'était levé.
     — Alors quoi ? insista-t-elle.
     — On s'est juste regardé... Et je ne sais pas, c'est comme une évidence. Il allait m'embrasser.
     — Lui ? C'est papa qui allait faire le premier pas ?
     À se retranscrire la scène, le cœur de Max cognait follement contre son torse ; l'avenir était soudainement excitant. Ses yeux brillants marquèrent l'esprit de Lucy, une image qu'elle avait longtemps attendu de voir. Elle tourna la tête et admira son père en plein sommeil. Ses ronflements ne l'atteignaient pas, au contraire. Une certaine chaleur filait dans son corps et alimentait la joie d'un nouvel amour.
     — T'inquiète pas, je m'éclipserai à un moment pour vous laisser seuls ! promit Lucy d'un sourire complice.
     — Ça se fera naturellement, répondit-il.
     — Hé, écoute-moi. Parfois, il faut forcer le destin !
     Le remuement de Mike qui semblait se réveiller ramena le silence dans la voiture. Lucy se redressa dans son siège et fixa le trentenaire à travers le rétroviseur, lui adressant par la même occasion un clin d'œil. Il reporta son attention sur la route lorsqu'il sentit le regard de Mike se poser sur lui.
      — Tu as fait un beau rêve, papa ? demanda Lucy d'une voix innocente.
     Plutôt grincheux, il marmonna une réponse vaguement affirmative. Sa fille se racla la gorge, attirant ainsi l'attention de Max.
     — Je me demande de qui tu as rêvé.
     — De ta mère. Je la retrouvais...
     La réponse de Mike lança un froid dans la voiture. Lucy regretta sa question lorsqu'elle vit la tristesse assombrir le visage de Max. Ce dernier se mordilla les lèvres et lutta pour ne pas fondre en larmes. Il savait qu'une partie de Mike aimerait toujours sa défunte épouse, que ce manque ne serait jamais comblé mais il voulait être suffisant pour qu'il le choisisse lui. Dans ce moment de désespoir, Max se maudit d'avoir nourri l'imagination d'être pleinement aimé par l'homme qui cherchait l'amour d'une autre. Lucy choisit de ne pas lui répondre, compatissant pour le cœur en miettes de Max, elle ne savait pas comment le réconforter. Peut-être qu'aucun mot ne suffisait. Consciencieux de l'ambiance froide, Mike se frotta les yeux avant de regarder son ami, qui évitait tout contact visuel.
     — Ça va ? s'étira-t-il.
     — Super. Tout. Va. Bien.
     Arrivant tout juste au parking de l'hôtel, Max se gara sous le regard anxieux de Mike. Il se creusait l'esprit, cherchant l'erreur qu'il avait commise mais il ne trouvait rien. La présence de Lucy ne facilitait pas leurs échanges, il n'osait pas être vocal devant elle. Se sentant comme une intruse, la jeune femme se précipita hors du véhicule, sortit les valises et les traîna avec difficulté jusqu'à l'hôtel malgré les appels de son père.
     — Dis, ça va vraiment ? se retourna Mike.
     — Bien sûr. Qu'est-ce qui n'irait pas ? rétorqua Max.
     — Je ne sais pas... J'ai l'impression que j'ai dit ou fait quelque chose qu'il ne fallait pas.
     — Tout va bien, Mike. Vraiment.
     Et il accéléra le pas jusqu'à l'hôtel, le perturbant davantage avec ce ton employé. Plutôt agacé par ces messages à double sens, Mike contrôla ses émotions pour ne pas exploser. Un mal de tête survint de nouveau, il rejoignit les autres avec une mine renfrognée.