Chapitre 35

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"Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars."

Bill Watterson

HÔPITAL

Asli

— Je suis désolé, pardonne-moi, je ne recommencerai plus, c'est promis. Je... je... J'obéirai, je le jure.

Mes promesses lui passent outre. Outre le fait que je lui ai désobéi une énième fois. Pourquoi est-ce si dur de lui obéir ? Pourquoi faut-il que j'en fasse qu'à ma tête ?

Un second coup de fouet me fait perdre pied. Je tombe au sol tel une moins que rien.

La douleur submerge dans chaque recoin de mon âme. Ma peau me gratte et je ne peux me satisfaire, parce que si je la touche, elle s'évadera. Elle se retirera de ma chair et je perdrais mon enveloppe corporelle.

Je suis épuisé, tellement épuisé que mon corps ne me répond plus. Mon apparence est pitoyable et cela, je peux le mirer dans le reflet de ces yeux. Je vois une chose qui me brise, une chose que je refoule depuis.

Les coups de fouet m'indiffèrent en comparaison de ce regard. Cette œillade que je maudis pour sa triste réalité ne peut m'être accordée une seconde fois et pourtant...

La première fois qu'il portait ce regard était le lendemain de la mort de maman. Il portait en lui, en ces yeux, la même lueur que celle qui m'observe à l'heure où je vous parle. Un regard vide en apparence, mais en réalité chargé de méfaits qui me sont destinés.

Debout, devant moi, il m'accorde trois phrases silencieuses à la parole, mais lourdes en vision. Il me chuchote d'une voix inexistante trois phrases que je ne pourrai jamais sortir de ma tête :

" Tu es un pêcher impardonnable qu'on ne peut aimer "

" Tu es un monstre, une bête de foire"

"Tu es une erreur, la pire des erreurs"

Savoir qu'il pense, cela, me chagrine. J'ai tout fait pour ne jamais revoir ce regard, tout.

J'ai accepté de tuer pour qu'il ne me l'accorde plus. J'ai menti à qui voulait l'entendre sur mes fausses identités pour lui. J'ai volé, kidnappé pour ne plus revoir une once de ce qui me peine le cœur. J'ai même toléré les laisser ressortir de leur abîmes pour le faire sourire. Je me suis sacrifié pour faire revivre les monstres qui vivent en moi, tout cela pour qu'il ne me regarde plus jamais de cette façon-là.

— Tu es faible, qui pourrait aimer une personne de ton genre ? Personne et tu sais pourquoi ? Par ce que les moins que rien dans ton genre, on les délaisse et les oublis par manque de volonté. Personne ne t'aime, ne l'oublie jamais. Tu n'es qu'une chose, rien de plus.

Un autre coup de fouet frappe mon dos. Cette fois-ci, le coup était puissant, tellement puissant que ma vision se troubla. Une fine lumière blanche...

Une faible lumière blanche m'aveugle. Je prends quelques secondes avant de m'habituer à celle-ci.

Une vieille odeur de déjà ressentie me fait tourner la tête. Razan portant un gâteau me fait sourire.

Je l'observe sans broncher. Il a peut-être raison, je suis un monstre, un pêché, une erreur, mais il a tort concernant l'amour que me portent Razan et Hanaa. Ils m'acceptent telle que je suis. Ils m'acceptent avec mes lourds défauts et c'est pourquoi je les aime. Ils sont ma raison de vie et je suis là leurs.

— Bien dormi, sœurette. Je t'ai fait un gâteau au citron. Je l'ai nommé le citronnier du grand chef. C'est un pur délice, tu vas voir, m'avoue Razan.

Du bout des doigtsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant