Jude

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Ariana Grande – Get well soon

Tous les mardis soir depuis trois semaines, je vais chez Cam. Maman pense que je vais aux séances de discussion en groupe chez les narcotiques anonymes mais c'est faux. Je fume des clopes avec Cam sur son toit. Mais ne vous y trompez pas hein ! Je vais toujours aux thérapies.

-Je croyais que tu ne fumais plus, me dit Cam en tirant un coup.

-Et moi je croyais que tu avais arrêté d'être un con, lui dis-je. Où sont tes parents ? Je ne les vois pas souvent.

-Non, tu ne les as jamais vu. Ils sont en voyage.

-Depuis que je te connais ?

-Disons qu'ils me fichent la paix.

-Oh ! Ça doit être cool de ne pas avoir quelqu'un pour te faire chier.

-Parfois c'est cool, parfois non.

Il me passe la clope et moi aussi je tire un coup.

Vous savez ce que j'aime le plus sur Cam ? C'est que lui et moi, on est pareil. On est tous les deux des drogués, on est tous les deux perchés, on aime être perchés ensemble, on le sait, on se sait et c'est cool. Et le meilleur, c'est qu'il ne me juge pas, ça c'est le plus cool ! Non sérieux ! Il ne me juge pas surtout parce qu'il est pire que moi. Moi au moins pour me sauver la mise je suis une thérapie mais il ne fait rien. Donc vous voyez qu'il est pire que moi. Vous voyez ou vous ne voyez pas ?

-Ça va dans ton bahut ? me demande-t-il.

-Pff !

Franchement, aucune idée.

-J'en sais rien. Tu vois ce sentiment que tu as quand tu entres dans une pièce et que tout le monde se tait et que tu as l'impression qu'on parlait de toi ? C'est pile ça, tout le temps.

-Merde, ça doit faire chier.

-On apprend à vivre avec. De toute façon, je n'ai pas le choix.

-Ça ne te gêne pas que les gens pensent que tu as voulu te suicider ?

-Non, je m'en fiche.

Cam me regarde avec insistance, incrédule.

-Non, je te jure. J'en ai rien à foutre. Si je commençais à me soucier de ça, je deviendrais plus folle que je ne le suis déjà.

Il hoche la tête mais je sens qu'il ne me dit pas quelque chose.

-Quoi ?! je m'écrie en lui donnant une tape amicale.

-Rien, c'est cool.

-Non, c'est pas cool.

Il soupire. Je lui rends sa clope.

-Ne soupire pas. J'aime pas quand tu fais ça. Si tu as quelque chose à me dire, dis-le-moi.

-C'est rien. Je trouve juste que peu de filles s'en ficherait si on leur faisait ce que les gens de ton bahut te font.

-Tu es sûr que c'est seulement les filles qui font ça ?

-Bon, peu de gens en général.

-Tu veux savoir comment je fais ça ?

-Parce que t'as quoi ? Une tactique secrète ?

Il se met à rire.

-Non. Tu veux savoir ? je lui demande.

-Quoi ? Dis-moi alors, me dit-il.

-Je me dis que c'est juste pour un temps. C'est vrai, dans quelques mois, ces enfoirés ne me verront plus et moi je n'aurais plus à les supporter. Pourquoi je me soucierais des gens que je ne verrai que rarement en quelques mois ?

Il pense. Je crois que ce que je viens de lui dire le fait réfléchir. Cam écrase le bout fumant de la clope contre sa cuisse. Je déteste quand il fait ça.

-Tu sais que ce que tu es en train de faire là c'est de la mutilation ? je lui fais remarquer.

-Au moins, t'apprends quelque chose dans ton bahut.

-J'suis sérieuse. Pourquoi tu fais ça alors ?

Il me regarde dans les yeux.

-Parce que j'ai froid.

Je souris. S'il y'a une chose qu'il sait faire c'est éviter de répondre aux questions. Mais moi aussi je fais ça, alors on se rejoint là-dessus aussi.

-Tu écris toujours des chansons ? je lui demande.

-On appelle ça composer. Ne me dénigre pas.

-Du calme, Bob Marley ! Pourquoi tu n'écris pas une chanson sur toi ?

-Sur moi ?

-Oui.

-Il y'a pas grand-chose qui rime avec Cam.

-Si. Cam comme dans Cambodge, Cameroun...

-Ne te fous pas de moi. Tu te trouves drôle ein ?

-Un peu.

Il sourit. Je dois avouer qu'il est beau quand il fait ça.

-Dis, Jude. Ça te fait du bien toutes ces thérapies ? me demande-t-il.

-Ouais, un peu.

-Pourtant t'es toujours là à fumer des clopes avec moi.

-Je sais mais c'est cool d'avoir des gens avec qui parler.

-On parle non ? Et puis, ces gens sont comme ceux de ton bahut. Tu les vois rarement en quelques mois.

-Je sais.


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