Les prisonniers

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Alkaryon se faufila entre les branches, s'efforçant de faire le moins de bruit possible. Il trébucha sur une racine et Panthère le rattrapa avec un léger hoquet. Le dragon des Dunes se redressa, un peu honteux, et adressa un signe de tête à Panthère pour la remercier.

— Essaie de ne pas être aussi pathétique lorsqu'on combattra les Griffes de la Nuit, le taquina la dragonne.

Alkaryon la foudroya du regard en grommelant, et Panthère lui tira la langue.

Derrière Alkaryon, une branche craqua et il fit volte-face, le cœur battant à tout rompre. Panthère et lui étaient à l'arrière du groupe, il n'y avait donc aucun dragon qui aurait pu marcher sur une branche et provoquer ce craquement. Alkaryon sonda la forêt avec inquiétude. Je suis trop nerveux, se réprimanda-t-il. C'est juste mon imagination qui me joue des tours.

Panthère se tourna vers lui d'un air interrogateur, mais il la rassura en haussant les ailes. Ils accélérèrent le pas pour rattraper les autres.

Alkaryon balaya les autres dragons du regard. À vue d'oeil, ils semblaient être une trentaine, et à présent qu'ils marchaient vers le repère des Griffes de la Nuit, Alkaryon ne trouvait plus ce nombre suffisant. Plus du tout.

Dans quoi est-ce que je m'embarque ? s'interrogea-t-il. Il se força à positiver. Une dragonne de l'école lui avait dit un jour que ce qu'il imaginait se produisait. « Ce que tu visualises se matérialise », lui avait-elle dit. Eh bien, c'était le moment de vérifier l'adage. Je vais m'en sortir, pensa-t-il. Je vais sauver Tempête. Nous allons tous nous en sortir sains et saufs. Il hésita. Sauf les Griffes de la Nuit, évidemment. Pendant un instant, il eut pitié des créatures. Puis, il se souvint qu'elles avaient capturé Tempête, et la rage s'alluma dans son ventre. Un regain d'énergie le parcourut et il serra les dents, s'imaginant plonger ses griffes dans les chairs des Griffes de la Nuit avec une satisfaction morbide.

Alors qu'ils étaient tout près du repère, Tornade, qui était en tête de file, leur fit signe de s'arrêter en levant la patte.

— Nous allons nous séparer ici, dit-elle. Sheitan, tu dirigeras le groupe qui s'occupe de la diversion. (Alkaryon sursauta. Il n'avait pas remarqué que le dragon des Montagnes était présent.) Quant à moi, je mènerai le groupe qui s'infiltrera pour sauver les prisonniers.

Alkaryon hocha machinalement la tête. Ils avaient formé les deux groupes la veille ; il était dans celui qui sauverait les prisonniers en entrant dans le repère.

— Pour la diversion, faites quelque chose de gros, poursuivit Tornade. Quelque chose qui fasse sortir le plus de Griffes de la Nuit possible. Et, si vous le pouvez, essayez de nous rejoindre ensuite. Bonne chance à vous, conclut-elle.

Elle fit signe aux dragons de son groupe de la suivre et contourna le repère jusqu'à l'endroit où ils avaient découvert Alkaryon et Panthère alors que les deux dragons avaient été blessés.

Alkaryon eut beau chercher l'ouverture dans la paroi, il ne la trouva pas. Les Griffes de la Nuit l'avaient sûrement comblée.

— Tu es prêt ? murmura Panthère.

Alkaryon hocha la tête, la gorge nouée. Il allait enfin retrouver Tempête. Comme la dragonne du Feu lui manquait ! Il n'avait jamais été séparé d'elle aussi longtemps.

« Je suis ton amie maintenant », lui avait un jour dit la dragonne du Feu, alors qu'ils n'étaient encore que de petits dragonnets. « Je ne te quitterai plus jamais. »

Le cœur d'Alkaryon s'était mis à battre la chamade et une douce chaleur l'avait envahi.

« C'est vrai ? Tu me le promets ? »

Les Serres d'ArgentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant