Chapitre 20

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La journée touchait à sa fin et la réalité qui m'attendait hors des murs de la maison des Carter me rattrapait. Je devais faire plus d'efforts pour tenter de repousser l'image du message de Selena qui s'imposait à moi avec de plus en plus d'insistance. Mon sourire devenait de moins en moins sincère. Je sentais le regard de Louis sur moi et finis par m'isoler dans sa chambre où je décidais de lui répondre:

Tout va bien.

Je rentre à la maison. J'ai besoin de savoir.

Bises, Sarah.

On toqua à la porte. Je rangeais mon portable en vitesse.

-Je peux entrer ?

C'était la voix de Louis. Mon cœur s'affola. Je me jetais instinctivement sur le lit où je m'asseyais d'un air faussement décontracté. J'arrangeais nerveusement mes cheveux  :

-Oui ! lançais-je.

Il entra et referma lentement la porte. Il se dirigea vers moi d'un pas mesuré, comme s'il craignait de m'effrayer. Je le vis hésiter un instant puis il s'assit doucement sur le lit en guettant ma réaction. Je me demandais si ce , nouveau comportement plus froid et distant ne résultait pas de l"incident du canapé". Mon cœur se serra quand je croisais son expression désabusée. Je m'obstinais à triturer un pli de la couette, l'air de rien, même si j'avais une conscience aiguë de sa proximité et du sang qui battait à mes tempes. Il osa se rapprocher un peu plus. Je dus me faire violence pour ne pas me jeter à son cou en lui disant combien j'étais désolé.  J'aurais voulu lui dire que jamais je ne m'étais sentie aussi vivante, que jamais je n'avais autant senti le désir de rester avec quelqu'un sans avoir à me préoccuper du temps qui passait.  Mais j'aurais plutôt souffert mille morts que de le laisser s'enticher d'un mirage, d'une fille qu'il croyait connaître mais qui n'était rien d'autre qu'une image idéalisée, créée de toute pièces et qui ne méritait certes pas qu'un être aussi... -je n'avais même pas les mots pour le décrire dans toute sa perfection-, s'intéresse à elle. J'étais si misérable, j'avais si peur que mon malheur et mon apparente facilité à m'attirer des ennuis ne s'étendent à lui s'il venait à se rapprocher trop près. "A trop jouer avec le feu, on finit toujours par se brûler" , c'est surement ce qu'aurait dit ma grand mère.

-Tu dois partir, c'est ça? lança-t-il, la voix étrangement rauque.

Je baissais les yeux sur mes mains, coupable. Il sourit comme pour masqué la déception qui teintait son regard depuis que j'avais fait échouer sa tentative.    

-Ce n'est pas grave. Je comprends très bien... m'assura-t-il. Allez viens, je te ramène chez toi.

Il amorça un geste comme pour me prendre la main mais abandonna. Son bras retomba mollement le long de son corps. Je sentis ma gorge se serrer : renoncer à notre proximité s'annonçait bien plus difficile que je ne l'avais imaginé. Et pourtant, je savais bien qu'il le faudrait. Je le ferais pour lui, pour son bien. Je renoncerais à ça pour ne pas risqué de l'impliquer dans mon mauvais karma.   

Les au revoir n'avaient jamais été ma tasse de thé mais celui-là fut particulièrement difficile, d'autant plus que j'avais peur de ce qui m'attendait une fois rentrée chez moi. Mr Carter me prit maladroitement dans ses bras: 

-Reviens quand tu voudras ma belle, tu es ici chez toi.

-Merci, me contentais-je de répondre, la gorge serrée: ces gens me connaissaient depuis si peu de temps!

Mme Carter m'étreignit à son tour. Sa main caressait mon dos.

-Tu sera toujours la bienvenue, ajouta-t-elle.

Elle me tint à bout de bras, le regard pétillant puis jeta un coup d'œil complice à Louis qui semblait gêné.

-Eh bien je... merci... ce serait avec plaisir, bégayais-je.

Livre 1: HiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant