Chapitre 27 ~Princesse

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- Faites venir Monsieur Wytt dans mon bureau, ordonna Princesse au serviteur qu'elle avait croisé dans le couloir.

***

Elle rajusta sa collerette et s'assit, droite comme i, sur son immense fauteuil en cuir. Au même moment, le mystérieux Wytt entra, s'inclinant dans une révérence exagérée.

- Que puis-je pour votre service, Princesse ?

- Et bien, justement, j'ai réfléchi, et j'ai compris.

- Vous avez compris... ? s'enquit-il en tentant de masquer le sourire qui se dessinait sur ses lèvres.

- J'accepte. Monsieur Wytt, vous serez mon conseiller, mon bras droit, toujours à mes côtés, mes yeux et ma main dans la capitale et les lieux du palais où je ne suis pas, et même mon chien de l'ombre. Je suis convaincue que vous pourrez m'être utile, et que vous savez parfaitement comment effectuer ce genre de travail.

- Et j'en suis honoré. Mais il faudra vraiment que vous m'appeliez tout simplement Wytt. Et tutoyez-moi, je vous en prie.

- Comme tu voudras... Wytt.

- Puis-je passer de l'autre côté du bureau, Majesté ?

- De l'autre côté du... ? Si tu veux.

Il se laissa glisser avec son spectacle habituel et vint se tenir debout derrière le fauteuil.

- Voudras-tu un bureau ?

- Ce ne sera pas nécessaire, ceci me convient.

- Bon... seras-tu prêt à me conseiller et à agir en mon nom en toutes circonstances ?

- Bien entendu.

- Et cet... accoutrement est-il bien nécessaire ?

- J'y tiens particulièrement, sauf votre respect, Altesse.

- Très bien, ça ira. As-tu de l'expérience dans ce genre de domaine ?

- Je ne désire pas parler de mon passé avec vous, Princesse. Convenons, je vous prie, que c'est aujourd'hui que je nais. Mais je suis bien placé pour occuper cette fonction, et le Grand ne choisit pas n'importe qui.

- Cela va de soi. Et concernant ton souverain, tu sais tout, n'est-ce pas ?

- En effet.

- Et... comment ?

- J'ai des sources que vous ne connaîtriez pas, et des informateurs dans des coins peu recommandables de la Ville.

- Je passe l'éponge pour aujourd'hui. Mais désormais, quand je pose une question, j'attends un réponse. Toujours.

- J'en suis bien conscient. Ne parlons point de mon passé, ni de mes sources, et alors je vous jure que quelle que soit la question, j'aurais dans absolument tous les cas la bonne réponse. Dans le cas contraire, je vous autorise à me tuer.

- Ça me convient. Autre chose ?

- Vous devriez faire installer un rideau.

- Un rideau ?

- Une sorte de tenture, derrière laquelle je pourrai me dissimuler pour écouter les conversations durant vos entrevues sans attirer de méfiance ni de soupçons.

- C'est une excellente idée. J'en ferai placer une dès ce soir. Tu peux disposer. Et en sortant, amène-moi le portier.

Wytt répondit d'un signe de tête et s'exécuta. Un instant plus tard, le portier entrait.

- Altesse ?

- Le gentilhomme qui vient de sortir -Monsieur Wytt, et quoi qu'il en dise, vous le nommerez ainsi- a mon entière confiance. Je l'appellerai personnellement, et il pourra entrer comme il voudra, sans que vous deviez me consulter au préalable. Vous ne l'arrêterez pas, sauf exception de ma part. Si besoin est, vous lui ouvrirez la porte, mais il est probable qu'il prendra le couloir de service.

- Le couloir de service, Altesse ? Pour un gentilhomme ?

- Je n'ai pas fini ! Ne m'interrompez pas, et ne discutez pas mes ordres !

- Bien, Altesse. Excusez-moi.

- S'il a des questions, répondez-y. Uniquement anodines, bien entendu. Vous savez pertinemment que le personnel de la Cité est un tombeau à secrets. Tout rentre, rien ne sort. Bref. Disposez, ou plutôt allez me chercher le Général.

Le portier claqua des talons et sortit.

***

- Vous aurez bientôt la paix, Général Herm.

- Comment ? Mon seul souhait est de vous servir, et l'état par la même occasion.

- Le Grand m'a choisi un conseiller.

- Je vous demande pardon ?

- Ce serait trop compliqué à vous expliquer. Néanmoins, je ne puis me passer de vous. Vous avez de l'expérience dans le militaire -bien que peu d'incidents se produisent ici-bas. Et puis, j'apprécie nos discussions.

- J'en suis honoré.

- Vous pouvez disposer, Général. Tenez-moi au courant de la criminalité en Ville, surtout. Malgré le fait que j'œuvre dans l'ombre, je ne veux pas m'éloigner de mon peuple. Je veux même m'affirmer en tant que souveraine.

- Pensez-vous vraiment que ce soit... ?

- Ne discutez pas. Mes décisions sont incontestables. Et pourtant, tout le monde paraît prêt à contester mes ordres. Je ne le tolérerai plus.

- Pardonnez-moi, Altesse. Je sors.

***

- Altesse ! Altesse !

Derrière son bureau, l'interpellée releva la tête du livre de mathématiques appliqués auquel elle était en train de s'atteler.

Le Général entra, une missive à la main.

- Qu'est-ce donc ?

- Une patrouille a constaté ce matin un délit sans précédent.

Dans le prochain chapitre, vous retrouverez Tahannne !

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