Chapitre 33 ~Rigus

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Rigus rentra chez lui après avoir lavé le sang de la place et porté le cadavre chez les Brûleurs. Il était abattu.

Le repas se déroula en silence, mais l'air était lourd de tensions.

- Jord, murmura l'aïeul. Monte dans la chambre, s'il te plaît.

Le cadet s'exécuta d'un air mauvais.

Quand il eut monté l'échelle, Rigus se prit la tête dans les mains.

Le désespoir le prit au dépourvu. Sa respiration se fit haletante et il pleura.

- ...fils...

- J'en peux plus, Papa. J'en peux plus. Je sais plus quoi faire.

- Voyons, mon fils. Tu n'es pas en mesure d'exiger une vie de prince. Tu...

- Il était innocent, Papa. Ils ont tué un innocent. C'était... horrible. Ça aurait pu être moi. Ils ont pris n'importe qui. Il était désespéré... mais tout de même, il a crié la liberté et la mort du Grand en s'abattant, Papa. Il faut se battre. C'est pour venger la mort de ces innocents qu'il faut se battre. Il pleurait. Je l'ai vu. Il pleurait. La détresse dans ses yeux... je... je ne peux pas...

- Tu dois accepter ta vie, mon fils, afin d'en tirer le meilleur parti possible. Incline-toi devant tes supérieurs. Tu n'as aucune chance.

- Je ne veux plus être défaitiste, Papa. Je peux être un gagnant, ou du moins un combattant. Je dois essayer.

- Ne compte plus sur mon appui, fils. Tu attireras des ennuis à notre famille. Tu ne peux plus ne penser qu'à toi. L'Âge de Liberté de Jord approche... Il doit entamer sa carrière sans embrouilles. Et puis... il y aura bientôt ton fils, Rigus. Tu y as pensé, à ça ?

L'interpellé resta sans voix. Son fils. Il devrait montrer l'exemple, lui assurer un avenir stable. Ou bien... ? Non, il serait un battant. Et son fils naîtrait au cœur de la résistance, pour vivre libre. Enfin.

***

Le lendemain, Rigus se rendit au CGRL. Il y fit un discours flamboyant sur ce qu'il avait vu la veille, et sur les larmes de désespoir du condamné.

Tous furent d'accord ; l'heure de la révolte avait sonné. Le soulèvement serait pour bientôt ; on attendrait l'Âge de Liberté, puis on sèmerait la panique dans les unités avant de se retourner contre les Forces.

Will de Blansec sourit quand il entendit le plan, il gratifia Rigus d'une tape dans le dos. Maël était également fort content.

Rigus s'empressa de rentrer chez lui pour ne pas faire peser de soupçons sur lui. L'après-midi, il fut envoyer pour frotter le pavé d'une rue au Nord de la Ville. Il se sentait puissant.

Bientôt ils pourraient voir le monde extérieur ; son fils y naitrait, Jord pourrait s'y épanouir, car alors il ne serait plus question de Producteurs. Et peut-être -il tremblait et rougissait à cette pensée- pourrait-il vivre avec cette belle femme au cheveux noirs et aux bonnes joues qui en se moment portait son enfant ?

Tout semblait pour le mieux, mais peut-être se réjouissait-il trop vite...



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