Chapitre 41 ~Rigus

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Le lendemain, Rigus fut conduit à ce qui serait sa nouvelle maison.

Étant construite pour héberger des ouvriers, elle était proche du comptoir auquel il avait l'habitude de se présenter. L'homme qui lui assignait son travail quotidien lui ouvrit la porte.

Rigus entra. Il y a avait une salle commune munie de quatre chaises, un vieux tapis et une cuisine contre le mur avec quelques placards pour ranger des vivre ; l'autre pièce était la chambre, meublée de deux lits superposés, d'une autre chaise, d'un vieux tapis gris et de quatre casiers empilés. Un portrait du Grand et un bloc donnant les heures de travail étaient encastrés dans les parois. Une maison semblable à tant d'autre, petite et dénuée de personnalité. Une dernière microscopique pièce servait de salle de bains, avec une vasque et des toilettes.

- Vous avez de la chance, dit l'homme d'un ton bourru. Vous n'êtes que le troisième occupant de la maison, vous aurez de la place.

Rigus rangea ses vêtements et ses quelques affaires dans son casier et posa son oreiller sur son lit.

Puis il sortit et on lui assigna son travail de la journée.

***

- Alors, c'est toi le nouveau ?

- Ouais.

Rigus se replongea dans son bouillon.

- On a même pas été présentés. Moi c'est Erd et lui c'est Brat.

- Rigus.

- T'es pas loquace, toi ! Comment tu t'es retrouvé ici ? Perso, on a oublié de se présenter au travail chez les Brûleurs... on était au ramassage des cendres, alors ça ou être ici... y a pas vraiment de différence ! Pas vrai, Brat ?

Il se mirent à rire grassement. Tous les deux étaient d'allure massive, avec des dents jaunies et une barbe mal rasée.

- Un chef d'unité qui ne m'aimait pas. Il m'a envoyé chez les Noirs puis il m'a viré... Bref.

- Oh, calme-toi ! T'es bien renfrogné, camarade. Tu veux qu'on te dise notre façon de penser ? Je sais pas pour qui tu te prends. Tu débarques dans notre maison commune et tu nous snobe ?

Il y eut silence tendu. Puis Rigus se racla la gorge.

- Que pensez-vous du Grand ?

Un nouveau blanc, et le visage des deux hommes devint menaçant.

- T'es un espion, c'est ça ? T'es dans les Forces ? Je savais pas qu'ils avaient encore des gens de ton espèce. On va se le faire, hein, Brat ? Ici ou les Noirs, on s'en moque !

- Attendez, pas du tout ! Il faut mettre les choses au point : j'ai tout perdu. Mon père, mon frère, et même mon enfant. Ma haine envers cette société et le Grand est inébranlable. Je suis membre d'un groupe révolutionnaire. Nous prévoyons un soulèvement pour bientôt. Êtes-vous avec moi ?

Il avait joué cartes sur table, c'était le moins qu'on puisse dire. Les deux autres restèrent abasourdis.

***

- J'aurai mon unité de travail à mes côtés, j'en suis assuré.

- Très bien, Rigus, complimenta Maël. Mais je suis sûr que nous aurons tout de même besoin de beaucoup de pot-de-vins.

- Pas d'inquiétude, j'aurai bientôt mobilisé l'argent, rétorqua Will.

- C'est parfait, dans ce cas. L'étau se resserre. Nous passerons à l'action dès lundi prochain. Le matin, la plupart des unités refuseront de travailler. Elles se dirigeront au centre, devant le palais de Justice. Et de là, après nos huées et protestations, nous irons casser le Mur ! Je ne vous mens pas. Il faudra des pelles, des pioches et des marteaux. Il nous tenter de corrompre des membres des Forces, et ce ne sera pas facile. Nous devrons nous battre, et nous prenons beaucoup de risques. Nos chances de réussite sont assez faibles. Mais nous sommes tout de même prêts à courir le risque. Nous pensons tous que nous n'avons rien d'assez important ici pour que la perspective de quitter ce monde ne l'emporte sur celle d'être libre. Êtes vous avez moi ?

- Pour la liberté ! s'écrièrent-ils en cœur.

Ils brandirent tous leur poing avec fierté. Rigus se sentait presque puissant, et sûr de lui.




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