Les Démons d'Aderoth (Edité : Valala Drakht)

Partie 21

Kea ignorait toujours comment Elwenn avait été attaquée, il fallait qu'elle en sache plus. Elle devait se faire une idée concrète de la situation.

— Que s'est-il passé ? questionna-t-elle Yuan le cœur lourd.

— Nous avons subi une première attaque avant-hier, lui révéla-t-il. Des citoyens du royaume ont été agressés aux portes de la cité alors qu'ils étaient partis à la recherche d'une mine d'Azur* dans le désert. Ils n'ont pas eu le temps de voir leurs assaillants mais on soupçonnait déjà Balaam d'être à l'origine de l'attaque. J'ai donc envoyé une unité sécuriser la zone. Elwenn faisait partie de l'équipe déployée cette nuit.

— Pourquoi ne pas me l'avoir dit ? lui reprocha Kea.

— Pourquoi l'aurais-je fait ? rétorqua-t-il du tac-au-tac.

— Je vous avais prévenu, je vous ai dit que si vous me reteniez ici le royaume serait en danger. Vous auriez dû m'écouter et me relâcher, se fâcha-t-elle.

Yuan fulminait lui aussi.

— Et vous, vous devriez répondre à mes questions ! C'est votre faute si nous en sommes là aujourd'hui ! Alors décidez-vous à parler et aidez-moi à tirer cette situation au clair une bonne fois pour toutes ! Comment voulez-vous que je protège mes sujets si vous n'êtes pas honnête avec moi et que vous me cachez des éléments qui peuvent être essentiels à leur sécurité ?

— Vous n'avez qu'à me laisser partir ! éclata Kea n'y tenant plus. C'est la seule solution, et si vous n'étiez pas aussi buté, vous l'auriez compris depuis longtemps !

— Il en est hors de question, trancha-t-il.

Yuan tourna les talons et sortit de l'infirmerie le pas lourd. 

Zaebos qui, jusque là, était resté en retrait auprès de Sytry et d'Okiri, s'approcha de Kea.

— J'ai réfléchi à la situation, lui confia-t-il. Je vais t'aider. Retrouve-moi demain après-midi dans mes appartements du rez-de-chaussée. Yuan sera occupé à rencontrer les Seigneurs des royaumes voisins et la majorité de sa garde aura été sollicitée pour l'occasion. Je m'arrangerai pour que tu puisses quitter le palais sans difficultés.

— Yuan ne te le pardonnera pas, l'avertit la jeune femme.

— C'est un risque que je suis prêt à encourir, affirma-t-il d'une voix ferme avant de sortir à son tour.

Kea aurait pu être soulagée d'apprendre que sa chance semblait enfin avoir tourné, mais elle n'était pourtant que tristesse. Quelle que soit la tournure que prendraient les prochains événements, elle avait perdu. Elle était perdue.

Elle songea un instant à tout révéler à Yuan, mais elle effaça bien vite cette idée de sa tête. Elle s'était juré que jamais elle ne révélerait son secret, et elle l'avait surtout juré à Siya. 

Elle devait honorer la mémoire de son amie, elle qui avait donné sa vie pour la sauver. Cette femme si douce qui avait été son seul salut au milieu de ce passé chaotique. Sans Siya, Kea n'aurait jamais pu tenir aussi longtemps.

***

« Elle se réveilla douloureusement, meurtrie par les effets du rituel qui avait eu lieu la veille.

Elle n'était là que depuis cinq jours, et déjà elle se sentait partir. Elle ne pourrait pas tenir une éternité de souffrance, c'était impossible. Elle n'avait qu'une envie, mourir.

Ses dernières tentatives avaient été des échecs cuisants, et ce monstre s'était assuré qu'elle ne puisse jamais lui échapper. Elle ne parvenait même plus à pleurer désormais, ayant épuisé toutes les larmes que son corps avait à lui donner.