01 : Pilot

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Le ciel était grisonnant aujourd'hui. Comme à peu près tous les jours qui ont précédés. Les sapins n'avaient pas encore perdus leurs épines, et les oiseaux batifolaient encore dans les nuages. Je portai un pantalon noir et le sweat gris clair d'Arthur, ainsi que mon bonnet gris et mon sac à dos. J'avais des baskets blanches sales, trouvées dans une maison, il n'y a pas si longtemps. Mes anciennes chaussures s'étaient décomposées après ma sortie de Boston, imbibées de sang et remplies de chair.
Je marchai dans les bois, tête baissée, quand Lukas m'interpella.
- Tu trouve ça comment ? Souriait-il, accroupit derrière un buisson et armé d'un fusil. Nous étions sur une aire d'autoroute. En face de nous se trouvaient un petit bâtiment à briques rouges avec une insigne comportant en lettres majuscules "TOILETTES."
- Lukas, tu n'es pas sérieux, ajouta Nora.
- Bien sûr que si, ricanait-il.
- On ne va PAS faire ça, répondit-elle, d'un ton ne supportant la contestation.
- Pourquoi pas ?
- Parce que !
Nous avancions en direction du bâtiment. Le parking était presque vide. Seulement deux voitures y étaient garées. Sûrement depuis un bout de temps, vue la poussière et la crasse qui remplissait le capot.
- Allez, Nora ! Qu'est ce qui ne va pas avec "Lukas" ? Lui demande-t-il.
- On n'appellera pas notre bébé Lukas. Un seul, ça suffit, soupire-t-elle en tenant son ventre rond. Hayley, un petit coup de main ? Dit-elle en se retournant vers moi, tandis qu'ils continuaient à débattre sur le prénom du futur bébé.
- Et si c'est une fille ? Demandai-je.
- Alors on l'appellera Nora ! S'exclama Lukas.
- Mais Nora c'est moi. Je ne veux pas l'appeler Nora. Ça porte à confusion.
- Alors appelle-là Geneviève. Je m'en fiche ! Répondit-il, lassé.
- Comment ça tu t'en fiches ?! Se fâcha Nora.
Arrivés devant la porte des toilettes, le couple continuait à se chamailler.
- Tu ne prend pas ça au sérieux, ajouta Nora.
- Je prend tout au sérieux. Particulièrement le futur du petit Lukas, dit-il en pointant son doigt sur le ventre de Nora.
- Continue et tu vas dormir sous la pluie ce soir, le menace-t-elle.
Je me sépara d'eux, et me dirigea vers l'autre entrée. Devant la porte, il y avait une boite de conserve de petits pois vide. Fraîchement délaissée, apparement. Nora et Lukas entrèrent dans les toilettes masculines, et moi dans celles d'à côté, féminines.
L'endroit était glauque. C'était sombre et très sale. "Hé ho ?" Ma voix raisonnait dans la salle. Il fallait que je vérifie qu'il n'y ait personne. Trois cabines de WC se trouvaient au fond de la pièce. Je vérifiai alors dans chacune d'entre elles, armé d'un revolver.
La première cabine était vide. Seulement des excréments. L'odeur était infecte. La deuxième était un peu plus propre, hormis le sang. Un ourson en peluche résidais sur le cabinet. J'ignorais d'où il venait et à qui il appartenait, alors je ne préféra pas y toucher. La troisième était vide. Plutôt rassurant, il n'y avait personne ici. J'étais donc seule. Je me dirigea vers le lavabo afin de me laver légèrement le visage. Un miroir était posé au mur, il était sale mais j'arrivais à voir mon reflet à travers. Mes cheveux avaient bien repoussés, mes yeux étaient fatigués, et mon visage était crasseux. Je posa brusquement mon sac à dos sur le comptoir, et y sortit ma bouteille d'eau et une petite serviette en tissu. Je versa quelques gouttes d'eau sur la serviette et me nettoya le visage. En voulant remettre la serviette dans mon sac, mon bras renversa la bouteille d'eau par terre. Celle-ci se glissa sous la porte de la troisième cabine. Agacée, je me dépêcha de la récupérer, quand j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir. Je vis quelqu'un que je ne connaissais pas à travers le miroir. Je m'enferma dans la cabine pour me cacher.
Et merde, mon sac à dos. Je l'ai oublié sur le comptoir. Quand j'entendis la personne rentrer, je monta sur la cuvette des toilettes discrètement, afin qu'on ne voit pas mes pieds en dessous de la porte de la cabine. J'entendis la personne fouiller mon sac, puis prendre mon revolver. Mon cœur battait à deux cents à l'heure. Je ne bougea pas, tandis que j'entendis les pas de plus en plus près. Le bruit d'une gâchette s'enclencha, et je vis le bout de mon arme pointé sur moi.
- Je te vois. C'était une fille, de mon âge environ. Elle avait la peau typé et les cheveux bouclés.
- Qui es-tu ? Demandai-je.
- Ça ne te regarde pas, répond-t-elle, sèchement.
- Tu vas me faire du mal ?
- Seulement si tu es stupide, dit-elle en ouvrant la porte en grand. Sors d'ici ! Je m'exécuta, et m'arrêta à environ deux mètres d'elle. Elle était sur le comptoir en train de fouiller le sac d'une main, et d'une autre me menaçant de ma propre arme. Tu as quelque chose sur toi ?
- C'est tout ce que j'ai, dis-je, tête baissée.
- C'est tout ? Comment as-tu pu tenir aussi longtemps ? Demanda-t-elle, impressionnée. Je suis sérieuse, qu'est ce que t'as d'autre ?!
- C'est tout ce que j'ai, je t'ai dis...
- Ne me mens pas ou je te flingue ! Dit-elle d'un ton menaçant et dangereux. Donne-moi ce que t'as !
- Mais je n'ai rien, dis-je en levant les bras en l'air.
- Donne-moi ce chapeau, dit-elle.
- Quoi ? Non !
- Où l'as-tu eu ?
- Mon père...
- Donne-le moi ! Je ne lui répondu pas. Elle continua à fouiller mon sac, en hurlant qu'il n'y avait "que de la merde" à l'intérieur. Pas comme les précédents que j'ai croisé. J'en déduis donc que c'était une voleuse. Soudain, une ombre apparue derrière la fille, étant trop occupé à me voler. C'était Lukas. Il marcha lentement, ne faisait aucun bruit. Il s'approcha d'elle afin d'attraper le revolver. C'est ton p'tit copain ? Dit-elle en prenant la seule photo qu'il me restait de Shawn. Quel crétin... La porte d'entrée se referma brusquement, la voleuse de retourna aussi vite que son ombre et tira sur Lukas.
Lukas tomba au sol, répandant son sang sur le carrelage. Je me jeta dessus, tandis que la fille resta étonné de son acte meurtrier. À cet instant, Nora arriva, sûrement après avoir entendu le coup de feu. Armé de son fusil à pompe, elle le vit à terre, agonisant.
- C'est pas ce que je voulais faire, je... la fille lâcha l'arme et leva les mains en l'air. Nora lui accorda un regard vengeur et lui tira dans la tête, sans pitié. La fille tomba au sol à son tour, laissant une trace de sang sur le mur, derrière elle.
Nora ne cessait de pleurer et d'appeler Lukas, de le faire bouger, d'essayer de le ranimer, mais rien n'y fait. Il était mort. Et on pouvait entendre ses cris de pleurs à travers la forêt.

Survive : Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant