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Le bus roule et après avoir passé une vingtaine de minutes debout, la main droite tenant fermement le barre de fer, je réussis à trouver une place me permettant enfin de m'asseoir. La fenêtre ouverte me permet de contempler le paysage et de rêver un peu. Oui de rêver d'Amour, de Prince Charmant... Mais sans le vouloir, Monsieur Sarr s'immisce brusquement dans mes pensées. Je revoyais ses beaux yeux fixer les miens. Je l'entendais à nouveau prononcer à nouveau mon nom de famille de ma voix suave... Oh Allah ! Cet homme m'a-t-il ensorcelé ? Pourquoi pensais-je à lui comme ça après qu'il ait été si cruelle avec moi ?

_Alors ma chère ? Tu t'es faite refoulée c'est ça ? Se moque Awa dès qu'elle m'ouvre la porte.

Je ne réponds pas à sa provocation et me contente d'aller boire de l'eau avant de regagner ma chambre.

_Tu sais que maman va te tuer si jamais elle apprenait que tu es partie sans préparer le déjeuner ?

_SORS DE MA CHAMBRE !

_Ta chambre MDR ! As-tu déjà oublié que dans cette maison tu n'es qu'une --

Elle n'eut pas fini sa phrase que je la gifle tellement je suis en colère. A cause d'elle j'ai raté une occasion inouïe et peut-être même unique de réaliser enfin mon rêve : celui de devenir ECRIVAIN.

Monsieur Sarr est le directeur de la maison d'édition Olé. Il a récemment lancé un programme pour dénicher de nouveaux talents. Il fallait lui envoyer par e-mail un résumé détaillé du roman et lorsque celui-ci lui plaisait, l'auteur décrochera un rendez-vous lui permettant de faire une présentation complète de son oeuvre, mais aussi de lui-même avant de lui remettre le livre en question. Évidemment j'avais été sélectionnée car sans vouloir me venter j'ai un réel don en écriture c'est à dire une belle plume et une imagination débordante. Mais à cause de cette garce d'Awa, j'ai faussé mon rendez-vous, peut-être même ma seule chance d'avoir enfin un si bon Éditeur qui m'aurait sûrement permis de rendre mes oeuvres célèbres vu sa notoriété.

Elle m'a violemment bousculé et je suis heureusement tombée sur le matelas qui repose sur le sol. Elle se jette sur moi et commence à gifler alternativement mes joues gauche et droite. J'essaie de me libérer de son emprise, de risposter mais sa force est largement supérieur à la mienne. Après tout je suis toute petite et maigrichonne alors qu'elle est élancée et pourvue de généreuses formes.

_Wallae tu oses encore me gifler, je te tue direct ! Domer*me ( fille de chienne ) !
Ah mais j'ai failli oublier ! Y a mon armoire qui t'attend, tout de suite !

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Ma belle-mère rentre à la maison à 17h et me trouve en train de concocter le dîner : rien de bien spécial juste du couscous au poulet ! Je finis cette tâche avant la prière de Timis. Après cette dernière, Raby m'appelle comme elle en a l'habitude :

_Change moi tes haillons là, les invités vont bientôt arriver.

Je regagne ma chambre pour remettre le Jean et la chemise que j'avais retiré pour les remplacer par une pagne et un débardeur plus commode pour la cuisine.

Quelques minutes après, j'entends une voiture se garer. La sonnerie de la maison retentit et bizarrement ma belle-mère ne m'appelle pas pour ouvrir la porte. Des voix inconnues prononçant des salutations et des phrases de retrouvailles envahissent la maison pendant un petit instant.

_Pétasse ! Comment tu me trouves ? M'interroge Awa en pénétrant brusquement dans ma chambre.

Elle porte une robe noire en chiffon ornée de broderies argentée et accompagnée de ballerines, de boucles d'oreille et de collier argentées aussi. Franchement, on dirait qu'elle va à une cérémonie, réception de mariage ou dîner de gala surtout avec son maquillage très imposant.

_Affreuse comme d'habitude !

Oui oui je mens ! Même si elle n'est pas très gentille et tout, je dois avouer qu'Awa est vraiment MAGNIFIQUE surtout vêtue de la sorte. La robe lui va comme un gant. Le mascara et l'eyeliner font ressortir la beauté de ses petits yeux de chinois tandis que le rose à lèvre rend plus attrayant et bien dessiné ses grandes lèvres pulpeuses identiques à celle de sa mère. Il ne faut surtout pas oublier que la masque tous les petits défauts de son visage.

_Ouesh c'est ça ! Jalouse va ! Topeu meu legui, nagaw ( Suis moi tout de suite ) !

Je m'exécute alors et on se rend ainsi au salon. Je salue d'abord le vieux en faisant une génuflexion en signe de respect puis le jeune homme qui l'accompagne.

_Alors c'est elle la fille... euh l'autre fille de Moctar ?! Elle a bien grandi heiiin. Demande le vieux.

_Oui c'est bien elle la fille illégitime de mon mari que je considère pourtant comme la mienne. Répond ma belle-mère toute enjouée.

Quelle menteuse !

Elle continue tranquillement et joyeusement la conversation avec le vieux. Awa et le jeune homme -qui d'après ce que j'ai entendu s'appelle Karim- s'y joignent de temps à temps tandis que moi je reste pensive. Je tente de voir comment intégrer et rendre plus intéressant cette scène si embarrassante dans un de mes romans déjà amorcés.

_Et toi Oumy ? Entendis-je soudain ce qui me fait sortir de mes rêveries.

_Euh... ?! Dis-je déboussolée après avoir constaté que c'est Karim qui m'a interpellé.

_Quels sont tes perspectives ? Ajoute-t-il face à mon silence.

_Je n'y ai pas encore vraiment pensé.

_Bon je me retire un instant. Je reviens tout de suite. Prévient Raby avant de quitter la salle.

Awa essaie alors d'animer une discussion surtout avec Karim et je dois avouer qu'elle est très douée pour ça car je les vois discuter comme s'ils se connaissaient depuis toujours.

Comme tout à l'heure je me contente de me taire et de fournir des réponses vagues lorsque ce fameux Karim tente de m'intégrer à la conversation de par ses questions.

En effet, il ne plait pas du tout ! Ce que je déteste encore plus c'est son style qui à mon goût correspond à celui d'un coureur de jupon et d'un grand pervers.

Ma belle-mère vient nous appeler quelques instants après pour ne demander de venir dîner. On quitte tous le salon pour s'installer sur la table à manger de la cuisine déjà parfaitement dressée par Raby, tâche qu'elle avait l'habitude de me confier.

Obnubilée par ma timidité, je mange très peu avant de quitter la pièce pour rejoindre le salon.

_Mademoiselle n'est pas très gourmande je vois ! Tente de plaisanter Karim en pénétrant à l'intérieur de la salle.

Je force un sourire ce qui l'encourage alors à venir s'asseoir à côté de moi. Je mr pousse un peu vers la droite pour m'éloigner de lui.

_Quoi tu as peur de moi jolie Oumy ?! Ou plutôt tu es intimidée par mon charme et ma beauté ? Ose-t-il susurrer mielleusement.

Intimidée, oui je le suis ! Mais certainement pas par ces caractères inexistants dont tu oses quand même te venter ! Voulus-je lui dire tellement je suis dégoûtée mais sincèrement je n'en ai pas du tout le courage.

Il essaie encore une fois de se rapprocher de moi. Pervers va !

Je me lève sans hésiter pour regagner ma chambre.

_Où vas-tu comme ça.

Au lieu de lui répondre, je me contente de lui foutre un vent. Heureusement qu'il ne me suit pas !

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Je suis dans ma chambre entrain de relire un de mes romans depuis quelques instants.

_Elle s'est plaint de maux de tête alors je lui ai conseillé d'aller se coucher. Mais je suis sûr qu'elle sera très heureuse de la nouvelle. Lolou kay leer na ! Entendis-je Raby dire avec sa si haute voix.

Mais de quelle nouvelle parle-t-elle ?

Oumy, une Cendrillon SénégalaiseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant