A la fin Mai,
Et Daho et Ringer chantaient [qu'est ce que t'es belle]
-C'est quoi tous ces cartons? Tu changes d'appart à la rentrée?
Nous étions allongés sur mon lit, il devait être 19h. Grégoire avait passé tout l'après-midi chez moi et ne semblait pas pressé de partir. Evidemment ça me convenait très bien et pour rien au monde je ne lui aurais fait remarqué qu'il était tard.
Il était arrivé prétextant le besoin d'une pause dans ses révisions de partiels. Il ne m'en restait que deux, je pouvais moi aussi me le permettre. Depuis un mois, je le voyais de plus en plus régulièrement. IL passait facilement, parfois même pour boire seulement un café. Ca datait de mon coup de gueule. IL s'en voulait peut-être, ça avait peut-être clarifié la situation, je ne sais pas. A vrai dire, je n'avais pas eu le temps d'y réfléchir. Entre les partiels et le basculement vers l'Université de Stockholm à organiser, je n'avais pas eu le temps de me pencher sur ma vie amoureuse. Je prenais ce qui venait et comme Grégoire venait souvent, je n'éprouvais pas de manque.
Il était allongé sur le flanc, le bras plié sur son coude qui retenait sa tête. Avec l'autre main, il alternait caresses de mon coup et de mes seins. J'étais bien, il faisait chaud dehors, les fenêtres étaient grandes ouvertes. Nous étions nus et je me rendais compte combien il était facile de l'être devant lui. Pourtant je n'aimais pas mon corps trop rond, mes seins trop lourds. Quand nous étions ensemble, tout était simple à vivre. Je m'en suis faite encore une fois la réflexion. Cet après midi là, nous avions parlé de droit une bonne heure. Il m'expliquait le contenu de ses cours, la maîtrise de droit public qu'il espérait décrocher pour l'année suivante. Nous avions fini par faire réellement connaissance et je ne l'aimais que plus. Mais il finirait pas se marier un jour avec Anne.
- Oui je déménage fin juin
- Ah ? dommage ! Il est sympa celui-ci
- Greg ! Je pars en Suède rappelle toi !
- Quoi ?
Il s'est assis sur le lit
-tu pars pour l'été ?
-non : je pars vivre en Suède à la rentrée
-mais pourquoi ?
- pour faire ma maîtrise : un an avec le programme Erasmus
Il parut soudain déboussolé. J'étais certaine pourtant un après-midi de lui en avoir parlé. Mais on parlait si peu de l'avenir, il n'y avait aucune raison, nous n'en avions pas. Nous c'était de l'Histoire Immédiate, des dossiers ultra secrets, nous n'existions nulle part.
- Pourquoi pars tu ? Sa voix s'est faite plus calme, plus basse, plus tendre aussi.
- C'est quelque chose que j'ai toujours eu envie de réaliser. L'envie de tout plaquer et d'aller voir ailleurs. J'en ai eu l'opportunité cet hiver alors je me suis dit que c'est la bonne année pour me lancer
- Pourquoi la Suède ?
- Parce que je n'avais pas envie d'un pays où tout le monde va, un pays où je peux aller facilement comme l'Angleterre ou l'Espagne. La Suède ce n'est pas loin mais assez inaccessible
- Et tu vas rencontrer plein de grands blonds costauds aux yeux bleus !
- Peut-être que c'est le bon moment pour ça aussi...
Nous nous sommes fixés dans un silence rapidement empli d'émotions. Comment allais je pouvoir m'éloigner de lui ? Comment imaginer ne plus jamais le revoir ? Si je revenais comme prévu l'année suivante dans cette ville pour poursuivre mes études, je n'aurai plus jamais le même appart. C'était notre seul point d'ancrage. Je savais vaguement dans quel quartier il vivait, sa ville d'origine mais c'était trop peu pour qu'on se retrouve un jour. J'allais partir et ça mettrait fin à une année de lui, de nous entre ces murs. C'est moi qui clôturais notre histoire finalement. Et ça m'a paru sur cet instant irréalisable. De lui annoncer mon départ, d'évoquer avec lui ce que j'allais entreprendre me faisait réaliser le manque que ça allait produire.
- Charlotte...
Il a pris son visage entre ses mains, mon regard se troublait de larmes.
- Hé...
- Ne dis rien, s'il te plait, ne dis rien...
Alors il m'a embrassé comme peut-être jamais il ne m'avait embrassé. Avec une tendresse et une force incroyables. Nos baisers se mélangeaient avec mes larmes. Nos corps nus se sont reconnectés l'un à l'autre et nous avons fait l'amour peut-être pour la première fois. Il explorait chaque recoin de mon corps, embrassait chaque parcelle de ma peau sans me quitter des yeux.
A bout de souffle, après que nous ayons longtemps joui de cette étreinte incroyable, il m'a encore embrassé et souri.
- c'était..
-...nouveau.
Nous nous souriions mais la mélancolie nous gagnait. C'était perceptible. Je ne savais pas où était passé ce garçon arrogant rencontré un soir sur une piste de danse, saoul qui me pelotait et n'avait qu'une envie, c'était baiser la première venue. Là, contre moi, je voyais un étudiant devenir un homme avec un regard inoubliable.
-ça va être génial ce que tu vas vivre ! Tu as raison de partir, de tout plaquer et de recommencer. Je t'envie !
-Rien ne t'empêche toi aussi de te lancer un jour ! Erasmus c'est aussi pour les étudiants en droit !
- Oui mais tu sais...
Oui je savais. Il y avait Anne. Puisqu'il y avait Anne. Cette fantomatique Anne qui semblait pourtant régir toute son existence. Sauf cette part infime de sa vie quand il entrait dans mon appartement. C'était trop peu pour combler la mienne. Et la sienne semble-t-il. J'avais lutté longtemps espérant qu'il comprendrait, qu'il me choisirait mais c'était peine perdue. Je savais depuis la première nuit qu'il ne la quitterait pas et surtout pas pour moi.
Quand Grégoire est parti tard ce soir-là, j'ai écouté le bruit de ses pas dans l'escalier restant à la porte de mon appartement. Quelques secondes plus tard, il est pourtant remonté 4 à 4 pour m'embrasser.
- Tu attends quoi pour rentrer chez toi ?
- Et toi ? tu attends quoi pour partir ?
Il m'a embrassé à pleine bouche comme si nous n'avions pas passé toute l'après-midi et la soirée à faire l'amour.
- balance moi dans l'escalier sinon je vais rentrer et te faire encore l'amour des heures
- ne me tente pas...
- A bientôt Charly qu'on en mangerait
- Au revoir Grégoire
Et il est parti.
J'ai fini mes partiels deux jours plus tard. Je devais vider l'appartement pour le 30 juin. Louise qui avait fini elle aussi me proposa de partir avec ses parents sur l'Ile d'Oléron où ils s'installaient pour l'été. J'avais un mois devant moi avant de travailler comme chaque été dans un camp pour ados. Alors j'ai appelé mon père, il est venu avec un camion et rapidement j'ai claqué la porte de cet appartement que j'aimais tant.
J'ai essayé de ne penser à rien sauf à ce qui m'attendait.
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L'Hiver suédois
RomanceCharly et Grégoire, deux étudiants se rencontrent un soir en boite, une rencontre qui ne devait durer que le temps d'une nuit. Greg a déjà une copine, ils vont se fiancer, se marieront un jour et il ne veut pas remettre sa vie en question. lls ne de...