Welcome to paradise.

PARTIE 1 - Chapitre 14

  [ Valentine Richardson ]

La porte s'ouvrit d'un coup sur la même femme que la veille. Elle hurla un bon coup pour nous réveiller et alluma la lumière blanche et vive. En moins de temps que la veille, nous furent toutes les quatre debout devant elle. Elle eut un sourire satisfait puis nous rappela que l'on connaissait la route jusqu'aux douches et s'éclipsa pour aller en réveiller d'autres.

Ariel me regarda pour me faire comprendre qu'elle n'aimait vraiment pas les réveils dans la base. Je lui fis un petit sourire compatissant avant d'aider Sally à choisir des vêtements dans son sac. On se rendit toutes aux douches, Mia encore à moitié endormie et Ariel de très mauvaise humeur. Seule Sally sautillait, joyeuse, trop contente de m'avoir retrouvée.

Lorsque l'on entra dans les douches, les autres filles se tournèrent toutes vers moi. Elle me regardait avec une certaine crainte dans les yeux. J'avais l'habitude de ces regards au lycée, mais ils ne m'avaient jamais parus aussi terrifiés. Ariel me donna un coup de hanche pour attirer mon attention. La fille que j'avais envoyée à l'infirmerie était là, elle aussi. Elle me fusilla du regard mais ne fit pas un seul pas vers moi, aussi craintive que les autres. C'était une bonne chose, plus personne ne nous chercherait maintenant. C'était important si on voulait survivre dans ce genre de cadre inhabituel.

On ne traîna pas pour prendre notre douche tiède. Le silence était assourdissant lorsque nous étions avec les autres filles. Rapidement, on se lava et se changea, pour ne pas avoir à traverser le couloir seulement recouverte par nos serviettes. Puis on regagna notre chambre pour attendre Noah. J'étais pressée de le voir et les filles l'avaient bien compris. J'avais peur qu'il ne soit mort lors de cette sortie contre les terroristes. C'était le seul qui prenait soin de moi ici et je m'étais rendue compte que j'avais vraiment besoin de lui pour me protéger. Je ne supportais pas l'idée qu'il ne puisse jamais rentrer à la base.

Soudain, la porte de notre chambre s'ouvrit pour la seconde fois de la matinée. Je me levai d'un bond mais restai pétrifiée en constatant que c'était la même fille que tout à l'heure qui était revenue nous chercher. Elle nous informa de sa voix froide qu'elle allait nous conduire jusqu'au grand self.

- Où est le soldat Johnson ? » Questionnais-je une fois dans le couloir.
La femme me regarda méchamment. Elle n'avait visiblement pas bien envie de s'adresser à moi. Pourtant, elle me répondit brièvement.
- Occupé.
- Comment ça, occupé ? » Insistais-je.
Cette fois-ci elle s'arrêta carrément pour se tourner vers moi et me fusiller du regard.
- J'ai d'autres choses à faire que de discuter avec toi alors tu es gentille, tu te la fermes et tu me suis comme tes copines ! » Cracha-t-elle en me défiant du regard.
- Vous vous rendez compte de la façon dont vous me parlez ?
- Je ne suis pas comme les filles de ton couloir Richardson, je n'ai pas peur de toi. Si tu veux te battre de nouveau, cette fois-ci, tu ne seras même pas en état de retourner dans ta cellule. Alors un conseil, fais un pas en arrière, boucle-la, et suis-moi comme un gentil petit toutou ! » Lâcha-t-elle avec un sourire en coin, visiblement fière de sa réplique.
- Comme un toutou suit une chienne en chaleur ? » M'exclamais-je alors qu'elle recommençait à avancer.

Ariel posa une main sur mon épaule pour me retenir pendant que la femme se retournait vers moi. Avant que je ne puisse faire quoi que ce soit, elle fut juste devant moi et son poing s'écrasa sur ma joue, m'envoyant contre le mur. Ariel me rattrapa et se mit entre la soldat et moi.

- Et si on allait manger. » Proposa-t-elle en faisant signe à la femme d'avancer.

Cette dernière me tua une dernière fois du regard avant d'avancer de nouveau. En me retournant, je vis que Sally était dans les bras de Mia et que cette dernière me regardait avec un air de reproche. En soupirant, je me rappelais la demande de Noah. Il m'avait demandé de ne rien faire de stupide pendant son absence et j'avais cherché un soldat ce qui avait eu pour résultat une nouvelle blessure sur mon visage. Je revins sur Ariel qui me tenait toujours par les bras, contre le mur et qui me fixait avec insistance jusqu'à ce qu'elle soit sûre que je me calme et que je ne fasse rien de stupide. Après quelques secondes, je finis par hocher la tête et elle me lâcha.

On gagna le self dans un silence pesant. La soldat nous abandonna rapidement. Une fois installée à notre table, mon regard chercha Noah dans cette énorme foule mais je ne le voyais nulle part. Après plusieurs minutes de recherche, je vis que Ariel me fixait toujours.

- Quoi ? » La questionnais-je, mal à l'aise.
- J'étais assez rebelle avant tout ce merdier. Mais toi, tu bas des records. T'as pas compris que si tu continues, ils ne vont vraiment pas être gentils avec toi. La cellule, c'était rien à côté de ce qu'ils peuvent te faire si tu continues à les faire chier. Pourquoi tu t'es battu avec cette fille ? Juste parce qu'elle n'était pas Johnson ? » S'exclama Ariel d'une voix qui me rappelait celle de ma mère lorsqu'elle était en colère contre moi.
- C'est juste un mauvais pressentiment, expliquais-je comme je pus en sachant que je ne pouvais pas dire la vérité, je n'aimerai pas qu'il lui arrive des trucs de mauvais parce qu'il s'occupe de moi. Ou même qu'on nous sépare.
- Je comprends pas pourquoi tu t'attaches tant à ce mec ! Ok, il est sympa, il t'a fait sortir, mais je continue à dire que c'est faux cul, que c'est juste parce qu'il se sent coupable pour ta mère, désolée d'enfoncer le clou. Je dis juste que tu ne devrais pas autant lui faire confiance, ça reste une saleté de militaire et je suis sûre qu'il nous ment à chaque phrase ! » Me chuchota-t-elle en réponse en vérifiant que Sally n'écoutait pas.
- Écoute Ariel, il m'a confié hier soir que ma mère lui avait demandé de prendre soin de moi et qu'il comptait bien tenir la promesse qui lui avait faite. Je crois que c'est un gars bien bien que ce soit un militaire. Je suis sûr qu'il ment sur une bonne centaine de choses à commencer par ma mère. Mais je crois qu'il dit vrai lorsqu'il m'assure qu'il va me protéger. Et c'est pas parce que je fais semblant d'être forte et caractérielle que je n'ai pas besoin de me sentir protégée par quelqu'un comme lui. »

Ariel me regarda un instant, légèrement bouche bée. Puis elle hocha la tête et se concentra à nouveau sur son assiette qu'elle termina rapidement. A côté de nous, Sally et Mia discutaient tranquillement tout en mangeant. Un quart d'heure plus tard, elles avaient toutes fini leur assiette. La mienne était encore presque pleine et bien que je n'avais pas mangé hier midi et très peu hier soir, je n'avais pas faim. J'étais la seule à connaître la vérité. La seule à savoir que cette nuit, Noah s'était vraiment mit en danger et qu'il était possible qu'il soit simplement mort, pas occupé comme l'autre garce l'avait dit, mais mort.

En parlant d'elle, elle revint nous chercher et nous reconduisit sans un mot jusqu'à notre chambre. Immédiatement, les filles décidèrent d'aller dans la salle commune pour trouver de quoi s'occuper et quitter cette chambre minuscule. Moi, je ne pouvais pas m'y résoudre. Après tout, peut-être que ce serait ici que Noah me chercherait en premier lorsqu'il le pourrait, s'il le pouvait encore ... Je devais rester ici et l'attendre, même toute la journée s'il le fallait. Au delà, ce ne serait plus la peine ...