Welcome to paradise.

PARTIE 3 - Chapitre 54

  [ Dany O'Connors ]

Valentine était assise près d'une fenêtre qui donnait sur l'entrée de la prison. Elle était ici depuis bientôt deux heures mais personne n'était venu la chercher. Pourtant, elle continuait d'y croire. Elle disait que Noah ne la laisserait jamais, qu'il ne rentrerait pas à la base avec les autres sans l'avoir sauvée avant, même si c'était un ordre du général lui même. Or, mes hommes avaient vu son équipe faire demi-tour après l'attaque et rentrer à la base. Je ne voulais pas le lui dire, je ne voulais pas lui faire du mal. Elle était déjà assez bouleversée par mon récit.

Après lui avoir montré les infestés, je l'avais conduite dans mon « laboratoire » et je lui avais raconté mon parcours, depuis la base où j'avais découvert que j'étais infesté, en passant par Kara, sa sœur, mes recherches dans ce garage pour découvrir que j'étais miraculeusement guéri, sans oublier le jour où Kara était morte dans mes bras et où j'avais réussi à la sauver avec mon sang. Ensuite, j'avais enchaîné sur notre voyage jusqu'ici, puis sur ce qu'avait fait mon prédécesseur : nous enfermer d'abord, jusqu'à ce que je lui prouve que j'avais vraiment trouvé quelque chose et qu'il me libère, me fasse confiance et me donne accès à son laboratoire. Puis sa mort et le choix à l'unanimité qui m'avait mis à la tête de cette prison. Pour finir, je lui avais montré toutes mes recherches sans rien lui cacher et je lui avais expliqué mes craintes vis-à-vis des militaires. Elle m'avait regardé et elle avait compris que si elle nous donnait aux militaires, je mourrais.

- Dany ? » J'entendis à peine sa petite voix m'appeler.
Je me rapprochai d'elle et elle se força à sourire malgré la tristesse que je pouvais lire dans ses yeux.
- Vous m'avez parlé de Kara mais vous ne m'avez pas dit ce qu'elle était devenue. » Murmura-t-elle en me laissant une place à côté d'elle pour m'asseoir.
- Elle est toujours enfermée dans une prison mais bien plus confortable que celles des infestés. A chaque fois qu'elle replonge, je lui injecte mon sang pour la maintenir en vie. Parfois, elle me supplie de la laisser mourir mais ... je n'y arrive pas ... je ne peux pas ... » Répondis-je, la gorge serrée.
- Je comprends. Je crois que vous avez raison. Vous gardez espoir de la sauver définitivement. Je pense que vous allez y arriver et ce jour là, elle vous remerciera de l'avoir gardée en vie, même si elle souffre sûrement. » Souffla Valentine d'une voix douce.
- Vous avez perdu quelqu'un. » Compris-je immédiatement.
- Comme vous, les militaires n'ont pas laissé entrer ma mère dans la base parce qu'elle avait de la fièvre. Ils disaient qu'ils ne voulaient pas risquer une épidémie et qu'ils allaient la soigner, que je pourrais la revoir très bientôt. J'y ai cru parce que j'avais envie d'y croire. Pendant deux mois, j'ai gardé en moi l'espoir de la revoir, comme ils me l'avaient promis, même si j'y croyais de moins en moins. Et aujourd'hui, le général m'a avoué qu'elle était morte, ils l'avaient abattue. Noah le savait et il m'a juré qu'il ne savait rien. Il le savait parce qu'il l'a vue, il était avec elle. C'est comme ça qu'elle lui a demandé de prendre soin de moi. Et il l'a fait, c'est sûr et je lui en suis très reconnaissante. Mais ... il m'a menti ... Il m'a regardée droit dans les yeux et il m'a menti ... Il m'a laissée espérer pendant deux longs mois alors que depuis tout ce temps il savait qu'elle était morte ... Pour finir, mon frère était à Boston, pour ses études ... »

Les larmes dévalaient ses joues à présent et elle était prise de tremblements. C'était une fille incroyablement forte et courageuse mais tout le monde avait ses petites faiblesses. Sans une hésitation, je passais mon bras autour de ses épaules. Alors, elle se laissa tomber contre moi et agrippa mon tee shirt en serrant les poings. Elle finit par s'endormir, épuisée par toutes ces révélations, la mort de sa mère et de son frère, le dilemme que je venais de lui poser et enfin le fait que personne n'était venu la chercher.

Doucement, pour ne pas la réveiller, je l'a prise dans mes bras et la conduisis jusqu'à ma chambre. Elle se réveilla à peine lorsque je la posai sur mon matelas et la recouvrais. Je ne pus m'empêcher de la regarder pendant quelques minutes. Elle était belle, courageuse, forte. Ça faisait d'elle une jeune femme imposante qu'on se devait se respecter. Mais cette façade cachait tellement de maux, de douleurs, de blessures ... Et nous étions encore si loin de retrouver un monde calme, sans danger, dans lequel elle n'aurait plus besoin de se battre. J'avais peur qu'elle ne tienne pas le coup. Pourtant, il le fallait. Si les militaires venaient ici, ils tueraient les non-infestés et les infestés qui se trouvaient dans les cages. Ils tueraient Kara et ils m'emmèneraient loin d'elle, pour faire des expériences sur moi et me vider de mon sang ... Nous n'avions pas le choix, mon plan devait marcher. Valentine devait se battre à nos côtés, leur ouvrir les yeux, être notre porte-parole et me gagner du temps. De mon côté, je devais accélérer mes recherches et trouver un vaccin, maintenant, qui ne suppose pas de tuer tous les Immunes de la planète ...

* * * * *

- Dany, tu vas y arriver. »

Kara me regardait m'acharner sur mon matériel. Je venais de lui injecter mon sang et elle était de nouveau normale. Enfin, si on oubliait qu'elle était si faible qu'elle ne pouvait plus tenir debout, qu'elle avait perdu plus de dix kilos, qu'elle était pâle, fiévreuse, que ses yeux étaient rouges, qu'elle avait perdu la moitié de ses cheveux et qu'elle tremblait sans cesse.

Elle tendit ses mains vers moi pour que je la rejoigne sur le canapé que j'avais fait installer dans le labo pour qu'elle puisse être auprès de moi plus souvent. En soupirant, je lâchai mon matériel et allai la rejoindre. Dès que je fus assis à côté d'elle, elle se lova contre moi et m'embrassa tendrement.

- Tu dois te sauver Dany. Si les militaires viennent, je veux que tu t'enfuis. Je suis déjà morte, tu me gardes en vie depuis bien trop longtemps ... Sans les Immunes, le monde entier est foutu. Ils ne doivent pas en avoir un seul. Il faut que tu partes avec eux. » Me supplia-t-elle en plantant ses yeux dans les miens.
- Et alors quoi ? J'abandonne tous les non-infestés de cette prison ? Ce n'est pas une solution Kara. » Grommelais-je en tentant de me relever.
Mais elle se hissa sur mes genoux pour m'en empêcher.
- Tu leur ordonnes de se rendre aux militaires et de les suivre jusqu'à la base où malgré tout ils seront en sécurité. Tu leur ordonnes de dire que tu t'es enfuis avec les autres Immunes. Si vous partez dès que les militaires sortent de leur base, vous pouvez avoir une heure d'avance sur eux. » Insista-t-elle avec sérieux.
- Je n'abandonnerai personne Kara, et encore moins toi, tu le sais bien. J'ai confiance en Valentine, elle va nous aider.
- Comment ? » Me questionna Kara en croisant les bras sur sa poitrine, vexée.
- Je ne sais pas, mais elle va trouver. Elle doit juste nous faire gagner du temps, au minimum. Et moi je dois travailler, je suis désolé. »

Kara s'écarta et me laissa retourner à mes recherches tout en poussant un énorme soupir pour que je l'entende bien. Mais je ne changerai pas d'avis. Je ne fuirai pas en priant pour que mes amis s'en sorte. Je ne laisserai pas Kara mourir dans une cage comme un animal. Je l'aimais bien trop pour ça. Il fallait que Valentine trouve quelque chose.