Coïncidence.

Chapitre 40

  Une semaine plus tard ...

Derek regarda sa maison. Elle était métamorphosée. Il arrivait même à la trouver belle. Les murs et le toit avaient été réparés. Le bois à l'extérieur de la maison repeint en blanc ainsi que la terrasse et les piliers qui soutenaient l'avancée du toit. A l'intérieur, les ouvriers avaient arraché la veille tapisserie et repeint en blanc, bleu clair et gris clair. Ils avaient aussi recouvert le vieux bois au sol avec du parquet clair et Callie avait acheté des meubles avec de l'osier, puisque c'était visiblement son rêve depuis toujours.

La maison était vraiment très belle. Pourtant, il ne se voyait plus y vivre. Depuis une semaine jour pour jour, il voyait Céleste grimper sur son vélo et se rendre au lycée, seule, tous les matins. Crystal ne sortait plus de chez elle, il ne l'avait pas revue une seule fois. Et Christopher était toujours dans le coma. Et chaque soir, il la voyait rentrer, une heure voire deux après la fin des cours, sûrement parce qu'elle passait à l'hôpital avant de rentrer. Il l'avait croisée une fois, par hasard. Il était sur le devant de sa maison, en train de surveiller les ouvriers, quand elle était rentrée des cours. Derek avait tenté de lui parler mais elle n'avait même pas répondu à son « Bonjour » et lui avait lancé un regard noir.

Il ne se sentait pas capable de rester vivre dans cette maison, si près et en même temps si loin de Crystal. De plus, la douleur dans sa poitrine due à la mort de son frère se ravivait à chaque fois que Daniel Hopper sortait de chez lui. Il ne pouvait pas cohabiter avec lui. Comme il ne pouvait pas cohabiter avec Crystal. Callie avait réussi à le garder à Southport une semaine de plus et peut-être qu'il resterait avec elle pour sa dernière semaine de vacances. Mais ensuite, il la raccompagnerait à Atlanta et chercherait sûrement un appartement là-bas et un travail.

- Viens te baigner ! » Hurla Callie depuis le salon en attrapant sa serviette de bain.
Elle passa par la porte fenêtre qu'elle avait fait faire à l'arrière de la maison et qui donnait directement sur la plage.
- J'arrive ! » Ria Derek en regardant une dernière fois sa maison.

Avant de rentrer pour aller se changer, il regarda une nouvelle fois la maison de Crystal, ou plus précisément, la fenêtre de sa chambre. Mais le store était toujours baissé et n'avait pas bougé d'un poil. Déçu, il se détourna et alla rejoindre sa sœur dans la mer. Plus qu'une semaine, et il pourrait commencer une nouvelle vie à Atlanta, loin de la mort de son frère, loin de Daniel Hopper, loin de Crystal ...

* * * * * * * * * * *

Crystal se relut non sans fierté. Dès qu'elle était rentrée chez elle, elle s'était mise à écrire un roman. Elle n'y racontait pas n'importe quelle histoire, mais la sienne. Mettre des mots sur ce qui lui était arrivé, sur son histoire avec Derek, lui faisait un bien fou. De plus, elle aimait son style d'écriture et elle ne se trouvait pas si mauvaise que ça. Non sans se vanter !

Dès que Céleste rentra des cours et de l'hôpital, elle prit des nouvelles de Christopher, comme chaque soir, puis lui fit lire ce qu'elle avait écrit dans la journée. Céleste semblait ravie de voir que sa sœur commençait à s'en sortir. Elle avait reprit deux kilos en une semaine, ses cheveux semblaient plus brillants et ils ne tombaient plus par poignée, elle avait beaucoup plus de force dans le corps et elle souriait. Même si elle restait en pyjama et rechignait pour aller se laver, elle commençait à aller mieux. Céleste n'attendait plus qu'une chose, qu'elle vienne de nouveau avec elle au lycée.

Elle ne voulait pas paraître égoïste, mais elle avait vécu des choses difficiles elle aussi. Et elle se sentait terriblement seule, abandonnée. Au lycée, il n'y avait plus Crystal ni Christopher. Ses anciennes amies étaient des fausses amies et Céleste les avait envoyées balader sans problème. Seulement, depuis une semaine maintenant, elle passait ses journées seule et le soir, lorsqu'elle allait voir Christopher, elle ne se sentait pas mieux. Elle avait vraiment besoin de sa sœur, mais elle n'osait pas le lui dire, elle ne voulait pas risquer de la brusquer. Alors elle ne disait rien, elle souffrait en silence.

- C'est super ce que tu as écrit. » Marmonna brièvement Céleste avant de s'asseoir sur son lit et de sortir ses devoirs.
- Ça ne va pas. » Constata simplement Crystal en laissant son ordinateur portable pour la première fois depuis des jours.
- C'est dur, c'est tout. Ça l'est pour tout le monde. » Répliqua la jolie blonde en faisant mine de se concentrer sur sa littérature.
- Bien sûr ... Tu veux que je t'aide pour ta littérature ? Et en échange, tu m'expliques les maths et les sciences ? » Proposa Crystal, redonnant le sourire à sa sœur.
- Tu te remets aux cours ? » S'étonna cette dernière.
- Et bien, je ne peux pas tout laisser tomber, et surtout pas ma sœur. J'ai peur de sortir de la maison ... j'ai peur de le voir ... mais j'y travaille, avec ce roman. Je te promets que bientôt je viendrai de nouveau au lycée avec toi. Et puis, tu as besoin de moi pour ton devoir de littérature, comme toujours ! » Ironisa-t-elle pour détendre l'atmosphère.

Céleste lui sourit puis lui tendit ses fiches. Sa sœur recommençait à faire surface. Il ne fallait pas perdre espoir. Crystal était forte. Elle allait s'en sortir. Et Christopher l'était tout autant. Oui, ce n'était qu'une question de temps, mais tout allait bien finir, Céleste en était sûre !

* * * * * * * * * *

Christopher se sentait comme enchaîné. Il entendait Céleste, qui venait tous les soirs, après les cours, pour lui raconter son horrible journée, l'état pitoyable de Crystal, les travaux de cet idiot de Derek, ses parents qui étaient inquiets mais qui leur racontaient plein de choses sur leur enfance avec Clémentine, ce qui faisait du bien à tout le monde. Il entendait aussi son père, de temps en temps, qui venait pleurer à son chevet, le suppliant de se réveiller, qu'il ne pouvait pas perdre son fils après avoir perdu la femme de sa vie, que c'était trop dur pour lui. Il les entendait. Mais il ne pouvait rien faire. Il ne pouvait pas leur répondre, pas les serrer dans ses bras ni les embrasser. Il était coincé dans un sommeil dont il ne voulait pas mais dont il n'arrivait pas à se séparer. Son corps avait subi un choc très important, trop important. Il était encore choqué. Et il refusait de le laisser retourner à sa vie de tous les jours. Pourtant, psychologiquement, Christopher allait très bien. Il ne voulait qu'une chose, se réveiller.

De nouveau, il entendit la porte de sa chambre s'ouvrir. Bien sûr, il ne vit pas qui entrait, mais il reconnaissait les voix. Il sut alors que son père venait de rentrer avec le médecin qui s'occupait de lui.

- Il n'y a eu aucun changement. Pas le moindre petit encouragement. » Expliqua le médecin d'une voix désolée.
- Vous pensez qu'il ne se réveillera pas. » Murmura difficilement le père de Christopher.
- Rien ne nous amène à penser le contraire monsieur Bomer. Je suis vraiment désolé.
- Ça ne fait qu'une semaine ! » Protesta le shérif de Southport.
- Plus les jours passent, moins il a de chance de se réveiller. Ça fait déjà une semaine.
- Vous voulez que je vous laisse le débrancher ...
- Nous voulons que vous y réfléchissiez seulement. Nous pouvons lui laisser encore une ou deux semaines. Nous voulons simplement que vous puissiez vous préparer à une telle éventualité. » Expliqua le médecin avant de tourner les talons.
Christopher entendit distinctement ses pas s'éloigner de son lit pendant que ceux de son père se rapprochaient.
- Sincèrement ... vous pensez qu'il va se réveiller un jour ? »
Les pas du médecin s'arrêtèrent. Silence.
- Je n'en sais rien monsieur Bomer. La vie est pleine de surprise.
- Alors tu as deux semaines fiston. Deux semaines maximum. Je t'en prie, bas-toi ! »

« Papa, si tu savais, je ne fais que ça ... »