Stéphane

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Il ne faut pas que j'oublie que ce soir, je dine avec ma soeur. Elle est envahissante parfois chiante mais je l'aime. Je lui confie tout même si parfois je ferai mieux de m'abstenir. J'ai eu le malheur de lui parler de Carla, hier soir au téléphone. Résultat, nous sommes mercredi et elle débarque déjà. Je l'imagine en train de me dire que ma méthode n'est pas la bonne, que si j'ai le sentiment que notre attirance est réciproque, je devrais lui sauter dessus. Elle est comme ça, Marie. Pas deux poids, deux mesures. La vie est trop courte pour en perdre une miette. Il faut foncer et ensuite regretter. Je ne partage pas son point de vue. Je suis plus réfléchi surtout quand il s'agit de ma puce et je ne pense que cela soit la meilleure attitude à adopter. Elle fuirait encore et encore.

J'ai réservé dans un restaurant gastronomique que j'ai eu l'occasion de gouter avec deux confrères. Leur pièce de boeuf était succulente et leurs déclinaisons de desserts devrait lui plaire. Nous avons décidé de nous rejoindre au pied du château. Il surplombe la ville et c'est un parfait point de repère lorsque votre interlocutrice n'a clairement pas un gps intégré à son cerveau. Ce n'est pas croyable d'avoir aussi peu d'orientation. Je suis sur qu'elle serait capable de se perdre dans sa rue.

C'est bras dessus dessous que nous flânons. Je peux reconnaitre que nous nous voyons pas assez alors que nous habitons à une demie-heure l'un de l'autre mais entre sa vie familiale et mon travail, le temps de fait rare. Tout est prétexte à rire : les tenues dans la vitrine des boutiques, les passants... Son rire est communicatif, les gens nous dévisagent. Je suis obligé de me pencher, mains sur les genoux pour récupérer mon souffle. Lorsque je me relève, ce n'est pas un mais trois regards glacials qui me contemplent. Je les salue, j'ai à peine un bonjour en retour. Je ne comprend pas. Marie qui a clairement compris la scène qui se déroule, ne peut s'empêcher d'y mettre son grain de sel.

- Chéri, on y va?

Je vais la tuer mais à quoi elle joue. Je vois le choc dans les yeux de Carla avant qu'elle ne détourne les yeux et reprenne la route. Il faut que je la rattrape, que je lui explique que ce n'est pas ce qu'elle croit.

- Carla, attend stp.

J'ai deux options : lui courir après ou planter ma soeur. Je n'ai pas eu à décider puisque ma soeur intervient avec un ton plus sec.

- Stéphane, nous sommes attendus.

Là, c'est sur, je vais la tuer. Julie est partie rejoindre. Il ne reste que Anne.

- Anne ?

- Laisses tomber, j'ai compris. C'est...ta soeur. Il faut être aveugle pour ne pas le voir, la ressemblance est flagrante. Je viens juste de m'en rendre compte.

- Putain, elle ne voudra jamais m'écouter

- On va au bar après manger, je dis ça, je dis rien.

Je lui souris. J'ai plus qu'à essayer de rattraper le coup. Ma soeur a des mitraillettes à la place des yeux, je sens que ça va être ma fête.

- Depuis quand es-tu devenue une carpette? Je m'étouffe avec la salade.

- Pardon?

- Ne fait pas semblant de ne pas comprendre. Elle t'a émasculé!

- N'exagère pas non plus.

- Tu rampes à ses pieds. Mais je vais être honnête avec toi, tu n'obtiendras rien d'elle comme ça. Tu te plantes totalement.

- Et Madame, je sais tout, elle ferait quoi?

C'est reparti pour le couplet sur le fait que les femmes ont besoin d'un homme et d'un vrai. Pas d'un qui dit oui à tout. Elle pense que je n'ai pas à m'expliquer et que si elle veut savoir, c'est à elle de venir vers moi car je n'ai rien à me reprocher. Je ne lui dois aucun comptes. Je dois reconnaitre que je suis d'accord avec elle sur ce dernier point.

Le reste du repas se fait sans encombres. Nous discutons de ma nièce de ses dernières bêtises pardon découvertes. Le nouveau mot à la mode de Marie. Sa fille chérie est une chipie qui l'a fait tourner bourrique et avec les années à venir, ça ne va pas s'arranger. Le serveur arrive pour savoir si nous souhaitons prendre un digestif mais nous choisissons de régler la note et d'en prendre un plus tard.

Marcher nous fait le plus grand bien après toute cette nourriture ingurgitée. Heureusement que je fais du sport trois fois par semaine car je finirai pas être en surpoids. En entrant dans le bar, j'ai la désagréable surprise de voir Carla et Julie s'enfiler shooters sur shooters.

Je tape un texto pour Hugo :
Ramènes tes fesses, tes chers voisines sont raides de chez raides. On ne sera pas assez de deux pour les ramener chez elles.

Sa réponse ne se fait pas attendre : Julie est là aussi?

Je lui répond que oui. Il agit vraiment bizarrement depuis le soir ou il l'a raccompagné. J'ai vraiment des doutes sur le fait qu'il ne se soit rien passer entre eux.

Avec Marie, nous choisissons une table pas trop éloignée afin que je puisse les surveiller. Elle est inconsciente de se mettre dans un état pareil. Son corps est trop faible pour supporter tout l'alcool qu'elle boit. Je la vois se lever, tituber en direction des w.c. Le regard des autres hommes est trop lubriques, je décide de la suivre. Ma soeur hoche la tête me montrant son approbation. La situation va dégénérer. 

Un pas après l'autre (reecriture) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant