Stéphane

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Je m'éloigne d'elle à contre coeur. Je ne laisserais rien nous séparer à nouveau et certainement pas Paul. Il va falloir que nous ayons rapidement une conversation. En si peu de temps, elle est devenue mon oxygène, ma raison de croire en l'avenir.

- Comme je vous l'ai dis précédemment, l'intervention s'est bien déroulée. Elle a eu lieu sous coelioscopie,quatre petites incisions qui vont permettre un rétablissement plus rapide. Nous allons vous garder en observation quelques jours puis vous pourrez reprendre le cours de votre vie normalement.

C'est un soulagement pour nous. Si je pouvais, j'hurlerais ma joie mais le lieu ne le permet pas.

- Avez-vous d'autres questions?

Des tonnes, oui mais son temps est précieux, je ne peux pas lui faire perdre de précieuses minutes. Je me contente de l'essentiel.

- Merci, Docteur, merci pour tout.

- De rien. C'est mon métier. Je vous laisse encore cinq minutes et il vous faudra partir. Les visites sont terminées depuis un moment.

Ah, non. Je refuse de la laisser seule. Je veux être là au moindre problèmes.

- Je ne peux pas rester pour cette nuit, s'il vous plait? Je resterai dans le fauteuil, je ne la dérangerai pas.

- Je vous assure que tout va bien. Vous êtes épuisé et ne serez d'aucunes aides pour elle.

Il faudra me passer sur le corps pour que je sorte. Carla capte mon regard et comprend instantanément mon dilemme.

- Stéphane, tu peux rentrer et au moindre souci, ils t'avertiront, n'est ce pas?

- Évidemment. Nous vous informerons de tout changement.

Il faut savoir choisir ses combats et celui-ci est perdu d'avance alors je m'incline. J'espère qu'il ne se produira rien pendant mon absence, je ne me le pardonnerai pas.

- Ok, je cède.

Après nous avoir salué, ils nous laissent quelques instant d'intimité en me rappelant de ne pas m'attarder.

- Ma puce, ça ne me plait pas de te laisser...

- Ne t'en fais, je vais dormir et demain, à mon réveil, tu seras là avec des pains au chocolat.

Ne me dites pas qu'elle les appelle de cette façon.

- Promis, je t'apporterai des chocolatines.

- Ne me cherche pas, je n'ai pas la force de me battre.

- Je te taquinais.

Je l'embrasse délicatement et pars rejoindre les autres en salle d'attente.

Je constate rapidement que tout le monde est rentré à l'exception de Paul. Me battre contre lui est la dernière chose que je souhaite faire ce soir mais je ne vais pas avoir le choix.

- Ils sont où ?

- Repartis chez eux après avoir été rassuré.

- Et toi, pourquoi es-tu encore là?

Autant, entrer tout de suite dans le vif du sujet, j'ai horreur de tourner autour du pot.

- Je me suis porté volontaire pour te raccompagner.

- Il ne fallait pas te dévouer. J'ai bien compris que ma présence t'horripilait, j'aurais contacté un taxi.

- Et je te dois des excuses.

Je suis sur le cul, je ne m'y attendais pas. Je lui emboite le pas et nous prenons la direction du parking.

Une fois dans la voiture, je coupe court au silence. L'abcès doit être crever maintenant.

- Je t'écoute.

- Je suis désolé. Mes paroles ont dépassé ma pensée. J'ai eu peur de la perde et j'ai pété les plombs. Je n'ai pas été présent pour elle, la première fois et je m'en suis voulu. C'est ma petite soeur, je l'ai toujours protégé et ne rien pouvoir faire m'a rendu fou.

A n'importe quelle autre personne, j'aurais répondu d'aller se faire voir mais je le comprend.

- Je laisse couler pour cette fois mais ne t'interpose plus entre nous, dorénavant.

- Message reçu et toi, si tu la fais souffrir, je te démolis.

Je ne réponds pas à ses menaces. Mon comportement serait identique s'il s'agissait de Marie. Je ne serais pas très rationnel non plus.

- J'ai oublié te dire quelque chose d'important : Félicitations.

- Merci. J'ai encore du mal à réaliser. Tout est allé tellement vite.

- Vous avez pris des décisions concernant votre avenir?

- Non. Nous n'avons pas eu le temps d'en discuter et je t'avoue que ce n'était pas ma priorité, aujourd'hui.

- Je comprend mais il va falloir y penser. Tu es responsable d'eux.

Il croit quoi, que je ne le sais pas mais si je vais trop vite, je risque aussi de lui faire peur. Et lorsqu'elle panique, elle fuit.

- Le mieux est que nous en parlions tous les deux. J'ai besoin de m'assurer que nous soyons sur la même longueur d'onde. Lui imposer mes choix serait un désastre.

- Oui et veille à ce qu'elle continue à voir sa psy. Elle va en avoir besoin pour accepter de se projeter dans le futur sans craintes.

- J'en ai bien conscience, ne t'inquiète pas. Je dois aussi faire le nécessaire pour me libérer pour son retour. Elle aura besoin d'une surveillance.

Et c'est la merde, j'ai une grosse audience que je ne peux reporter. Je ne sais pas comment je vais pouvoir m'organiser. Je refuse de lui en parler. Je ne veux pas qu'il pense que je me débine.

- Je n'ai pas encore pris mes fonctions au cabinet. Une histoire de paperasse. Je peux passer mes journées avec elle et le soir, tu me remplaceras.

L'idée est tentante mais j'espère que ce n'est pas un piège. Je ne peux pas m'empêcher de rester sur mes gardes.

- Ne le prend pas mal, Stéphane mais être H24 avec elle, je ne pense pas que c'est une bonne idée. Prenez vos marques tranquillement et donne lui un petit peu d'espace pour accepter tous les changements.

- Je ne comprend pas. Tu me demandes de prendre mes responsabilités et l'instant suivant, de la laisser tranquille. Je ne te suis plus.

- Il est vrai que je me contredis mais après réflexion, l'étouffer n'est pas la solution. Émotionnellement, elle reste très fragile.

Il n'a pas tort, je dois le reconnaitre.

- Cela ne te gêne vraiment pas?

- Non, sinon je ne te l'aurais pas proposé. Je sais que je me suis emporté mais je ne suis pas ton ennemi.

- Merci.

Nous sommes déjà de retour. Je lui indique mon adresse. Il va vite finir par se repérer dans la ville. Avec les soins à domicile,de toute façon, il n'aura pas le choix.

- Tu veux descendre prendre un verre?

- Un whisky ne serait pas de refus.

Pour la première fois de la journée, nous sommes d'accord. 

Un pas après l'autre (reecriture) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant