Stéphane

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Je la regarde partir et je suis mort de trouille. Je n'ai jamais connu ce sentiment de tout ma vie, du moins pas à ce point. Je dois me reprendre et adopter la pensée positive. Elle a besoin de toutes mes ondes pour se battre.

- Veux-tu que je prévienne Paul?

Je sursaute. Je n'avais pas entendu Hugo revenir qui me tend un café.

- C'est à moi de le faire. Je suis responsable de cette situation.

Je sors mon téléphone quand j'aperçois le panneau "interdit d'appeler". J'hésite. Il faut que j'informe son frère de son état mais je ne veux pas m'absenter. Je sais désormais que tout peut basculer en quelques minutes. Hugo devine mon tourment et me promet de venir me chercher s'il y a le moindre changement.

Je quitte le service le coeur lourd et je me dirige vers le hall. Je ne sais pas comment lui annoncer. C'est un chic type. Il m'a contacté plusieurs fois pendant notre séparation pour me donner de ses nouvelles et me dire de ne pas baisser les bras. J'ai beaucoup apprécié ce geste surtout que rien ne l'obligeait à fouiller dans le téléphone de sa soeur pour me tenir informé.

En même temps que je cherche son contact dans mon répertoire, je m'allume une cigarette. J'ai vraiment un mauvais réflexe dont il va falloir que je me sépare rapidement surtout maintenant que je vais être père. Je n'en reviens toujours pas et avoir dit la vérité à Carla m'a permis de me libérer d'un poids.

- Paul?, c'est Stéphane, l'ami de ta soeur.

Je commence doucement à préparer le terrain.

- Oui, salut, comment vas-tu?

- Pas très bien. C'est la raison de mon appel. Ta soeur a été transporté à l'Hôtel Dieu sur Nantes suite à un souci de kyste ovarien.

- Merde, je préviens les parents et j'arrive.

Je raccroche en ayant conscience de ne pas lui avoir tout dit mais je n'ai pas voulu l'inquiéter plus qui ne l'est déjà.

J'aurais tout le loisir de lui annoncer de vive voix et de répondre à ses interrogations. Le seul hic est que je ne j'imaginais pas devoir le faire devant ses parents. Sympa, la première rencontre avec la belle famille.

Je me dépêche de remonter afin d'être certain de ne pas louper le compte rendu du médecin. Hugo n'a pas bougé de place et me fait non de la tête. La salle d'attente est pleine donc je lui fais signe de me suivre. Un petit crochet par le secrétariat me permet de savoir que nous pouvons patienter dans sa chambre et qu'elle aura la gentillesse de communiquer notre emplacement aux membres de sa famille.

Il s'installe dans la chaise et moi, je m'assois sur le lit.

- Il y a trois mois, si on m'avait dit que tu allais être papa, j'aurais rigolé au nez de la personne mais là, je suis sur le cul. Tu veux en parler?

- Il a suffit d'une seule fois où le préservatif a craqué pour ...

- Mais elle ne prend pas la pilule ?

Je lui explique ce qu'il s'est produit et il n'en revient pas.

- Tu veux dire qu'avec le si peu de chances que cela se produise, tu a réussi à la mettre enceinte! Chapeau, ils sont balèzes tes spermatozoïdes.

Mais qu'il est bête! C'est le premier truc qu'il lui est venu en tête alors que moi, j'ai un milliard de questions qui se bousculent. Il doit remarquer mon air renfrogné car il s'empresse d'ajouter :

-Hey, ne t'en fais pas. Tout va bien se passer. Statistiquement, elle a toutes les raisons de s'en sortir.

- Ce n'est pas elle mais Ils.

Je prend ma tête entre mes mains et je commence à réfléchir. Il faut que je trouve à m'occuper avant de péter les plombs. Je n'ose pas imaginer la réaction de Carla si elle perd notre bébé. Je sais qu'elle ne se relèvera pas. Elle est beaucoup trop fragile pour vivre à nouveau ça.

Je regarde la pièce et je constate que c'est moche. Blanc et fade. Cela manque de couleurs et de gaieté. Comment peux-t-on avoir envie de se battre dans un endroit si aseptisé?

- J'ai une idée. Tu peux encore guetter son retour pendant quelques minutes, le temps que je fasse une course?

- Oui, bien sur mais tu vas où?

Je ne prend pas la peine de lui dire et je m'élance vers l'ascenseur. Comme tout à l'heure, un amas de personnes sont agglutinés devant et je n'ai pas le temps d'attendre. Je décide de prendre les escaliers et je les dévale à toute vitesse.

Ca y'est je suis de retour dans le hall, il ne me reste plus qu'à trouver la boutique de cadeaux. C'est bon, je la vois.

Je ressors quelques minutes plus tard, les bras chargés de peluches: une licorne, un poisson némo, un ourson, une vache, une grenouille et d'autres encore. J'ai pris les plus belles et les plus colorées. Je n'en ai strictement rien à faire de les avoir payer aussi cher et d'avoir l'air d'un idiot.

L'élévateur s'ouvre demain moi et je constate qu'il est vide. Je m'engouffre dedans et appuis plusieurs fois sur l'étage où je veux aller. Mais qu'est ce qu'il est lent et moi, je suis pressé. Ah, les portes se renferment enfin quand je vois un pied le stopper. Quel est l'abruti qui a osé faire ça? Je vais l'étriper.

Je n'ai pas le temps de râler quand je constate que c'est Paul et sa famille. Heureusement que je me suis tue.

- Elle va comment?

Il stoppe sa phrase et me regarde d'un air bizarre.

- Tu as dévalisé le magasin?

Je me rend compte de la stupidité de mon geste mais sur le coup, je pensais bien faire.

- Stéphane, ne t'en fais pas. Elle a déjà eu ce souci, il y a plusieurs années. C'est bénin comme intervention.

- Non, pas cette fois. C'est plus grave.

Sa mère qui ne m'a pas été présenté sent que quelque chose cloche.

- Je veux savoir, s'il vous plait.

- Je vous explique tout quand nous serons là-haut.

Le trajet se poursuit dans le silence total. Chacun, je suppose imaginant le pire. Je sais que pour eux cela doit être horrible mais je ne veux pas leur expliquer ici.

Nous sommes de retour et Hugo les salue chaudement. J'avais oublié qu'il les avait côtoyé plusieurs fois durant ses études.

- Maintenant, j'exige de savoir ce qu'il se passe. Où est ma fille?

C'est son père qui vient de prononcer cette phrase.

- Comme votre fils a du vous l'expliquer, Carla a de nouveau eu un fibrome qui saigne.

- Oui, ça je sais.

Le ton est glacial est tranchant. Je sais de qui elle tient son caractère.

- Elle est actuellement sur la table d'opération

- Mais pourquoi ils ont pas essayé les médicament en premier.

La voix de sa maman tremble.

Je ferme les yeux et prend une profonde inspiration.

- Car elle est enceinte. Il était urgent de la traiter rapidement.

- Quoi?

Je ne peux pas dire qui vient de prononcer ce mot, je dirais tous.

- C'est très récent et nous venons juste de l'apprendre.

- Vous êtes le coupable, je suppose?

- Oui, monsieur mais j'aime votre fille.

- Comment as-tu pu te montrer si irresponsable alors que tu connais son histoire?

Je n'ai pas le temps de m'expliquer avec Paul que le médecin fait irruption.

- Je n'ai qu'un court instant avant de repartir au bloc mais je tenais à vous donner de ses nouvelles moi-même. 

Un pas après l'autre (reecriture) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant