Partie 24: Day End

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  Ça doit faire 10 minutes, ou bien alors 1 h que je tiens Stéphane dans mes bras sans pouvoir me décrocher. J'ai réussi à calmer ma respiration et à a apaiser mes sanglots. C'est si bon de le serrer fort contre moi, de le revoir. Je ne comprends absolument rien à ce qu'il se passe, mais pour l'instant je m'en fiche, seul ce moment compte. C'est encore mieux que le jour où j'ai été voir Coldplay à Boston il y'a deux ans, encore mieux que mon premier baiser en sixième, encore mieux que n'importe quel autre instant. Aujourd'hui, est officiellement le jour le  plus réconfortant de ma vie.

  Dans mes bras, Stephane ne bouge pas d'un cil, à l'exception de sa main qui caresse mes cheveux de la plus douce des manières. Les miennes encerclent son cou, et je ne peux m'empêcher de remarquer à quel point il a changé. Les muscles de ses bras sont plus développés, il est plus pâle aussi. Je me détache difficilement pour mieux le détailler, pour me persuader que ce n'est pas un rêve, et voir le changement qui s'est opéré pendant cette dernière semaine. Des cernes sont postés sous ses yeux bleus qui ont eux aussi changé. Leurs insouciances, quoiqu'exceptionnelles chez Stephane ont disparu, cette étincelle de jeunesse s'est éteinte et je me demande bien comment. Ses cheveux d'habitude en bataille et indomptable ont disparu, laissant place à deux petits centimètres d'une patine noirs. Je pose ma main sur sa joue, elle est chaude, et dans mon geste sa barbe naissante me râpe la peau. Le regard humide, il me sourit tant bien que mal, malgré l'émotion. Une légère marque, encore rouge au-dessus de sa lèvre, attire mon attention. Elle est récente, je la caresse et une larme coule le long de ma joue sans que je le veuille. La cicatrice ne semble pas, où à priori plus, lui faire mal.

Stephane porte un t-shirt blanc à manche longue, mais je vois des marques rouges dépassées de l'encolure. Son jean est plus serré que d'habitude, il a dû prendre du poids. Sa mâchoire carrée est plus anguleuse qu'auparavant, ainsi que ses pommettes, qui étaient encore juvéniles pour un homme de vingt-deux ans. Ce n'est pas possible de changer autant en une semaine ! Son médaillon de Saint Jude n'est plus à son cou. C'est étrange, Stéphane ne s'en séparerait jamais. La montre de notre grand-père, elle, est toujours là, à son poignet gauche.

Lui aussi me détaille, comme je le fais. Avec l'adrénaline de ce moment passé, la lèvre inférieure de mon frère se met à trembler, et je le serre à nouveau contre moi.

Son odeur, celle de la lessive et du coton me bercent, sa main dans mon dos me maintient, et l'autre dans mes cheveux me détend.

  Je ne sais pas à quel moment je me suis endormie. Ma tête est posée sur une surface dure, mais confortable. J'ouvre les yeux, seule une lampe est allumée dans un coin de la pièce carré, cette semi-obscurité est apaisante. Une couverture est posée sur moi et mon crâne me fait mal. Pendant une minute, j'oublie ou je suis. Je me lève difficilement en tenant mon visage entre mes mains. Une substance gluante et blanche est étalée sur ma tempe. J'examine le reste de mon visage, il y'en a aussi sur ma lèvre et autour de mon œil amoché. La pommade sent fort le menthol et me pique un peu les yeux. Je regarde autour de moi, un écran plat est encastré dans un espace prévu à cet effet dans le mur en simple béton. La table basse est couverte de bières vides et de magazine de sport, j'en prends un pour mieux voir. Celui-ci est spécialisé en boxe et technique de combat. J'entreprends de le reposer sur la surface en verre, mais un objet noir et métallique attire mon regard, je déplace les quelques magazines et vois une arme. Je la saisis dans ma main, c'est un colt 38 gravé, et qui plus est chargé au maximum de sa capacité si je me fie au poids de l'arme froide dans ma main. Je connais bien les armes à feu, un père-flic ça aide. Et puis, on va dire qu'il m'a éduqué sur le sujet tout comme Stéphane. Je les connais bien ces petits objets qui peuvent tuer aussi facilement qu'une lame de rasoir.

  Je découvre mes jambes en repoussant la couverture, un pansement est posé sur mon genou, je repose l'arme doucement. Ça commence à me revenir, j'effleure le sparadrap couvert de petits trous. Julian a des choses à me dire, il veut que je me méfie de mes amis, de ma famille. Stephane est vivant, et Jace... Jace m'a menti. Un bruit de casserole me réveille complètement de ma léthargie, je me retourne, mais j'ai du mal à voir. Je me redresse sur le canapé en me retournant doucement. En prenant appui sur le dossier, je regarde ce qui se passe dans ce qu'il me semble être la cuisine. Ma conscience me dit de faire savoir que je suis réveillé, mais mon instinct et ma curiosité mal nourrie ces derniers temps me poussent à me taire.

Une fois froissé il ne peut plus être parfaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant