Jace ne détache pas son regard du mien de toute la soirée, même quand j'ai rejoint Hailey dans sa chambre après le repas, ses yeux sont restés collés à mon dos, c'est bizarre à dire, mais je l'ai senti.
– Alors, commence Hailey
– Alors quoi ?
Je m'étale sur le lit de ma meilleure amie, en sachant très bien de quoi elle veut me parler.
– Ne fait pas ta débile Nina, tu as ce sourire ridicule sur le visage, dit-elle en me jetant un coussin.
Elle s'allonge sur le ventre derrière moi, ses mains de chaque côté de son visage, et m'observe.
– Je ne sais pas quoi dire, je ne l'imaginais pas dire « sa » devant tout le monde, dis-je les jambes contre le mur.
Hailey joue avec mes cheveux, je ne peux pas la voir, mais je sais qu'elle sourit, ça s'entend dans sa manière de parler.
– Tu te souviens, quand ont été petite, et que je suis venue te parler après que Ben McCornick t'est obligé à manger de la colle en cours d'art plastique ? Me demande-t-elle en enroulant son doigt verni de rouge autour d'une de mes mèches.
– Bien sûr que je m'en souviens, sans toi, je serai encore en train de vomir de la colle blanche par les trous de nez.
J'observe son doigt gesticuler, au-dessus de mes yeux.
– Tu étais ma première amie, et la meilleure que je n'aurais jamais, dit-elle en posant son front contre le mien.
– Oh, Hailey, je dégage une mèche de la tête blonde de celle que je considère comme ma soeur, et qui s'étale sur ma joue. Tu es tellement mielleuse, ça ne te ressemble pas, dis-je en me moquant gentiment d'elle.
Elle se laisse tomber à côté de moi, sa tempe quasi collée à la mienne en riant.
– Ouai je sais, mais je n'ai pas terminé, dit-elle, je me tourne vers elle, mais je ne vois pas ses yeux rieurs, elle regarde le plafond et continue.
– Quelques années après, quand au lycée, le fameux McCornick t'a encore prise pour cible, en riant de toi et de la mort de tes parents.
Je regarde le plafond à mon tour en me remémorant cet épisode.
Le souvenir est, douloureux. Ben ne faisait pas seulement que de se moquer de moi, c'était du harcèlement.
Il me disait que mes parents n'étaient pas vraiment morts, qu'ils avaient préféré partir pour ne pas avoir à supporter d'avoir une fille comme moi. Il se marrait toujours de mon physique, de mes notes désastreuses, de mon manque d'ami... C'était presque insupportable de me rendre en cours.
Je n'en avais pas parlé à Stephane, il venait de commencer chez les pompiers et s'occuper déjà de tout, je ne voulais pas l'embêter avec ça. J'avais seize ans, je pouvais encaisser. Et puis, de toute façon, Hailey était encore intervenue. Elle avait balancé des photos compromettantes de Ben avec notre prof d'histoire. Quel cliché. Elle les avait surpris, et l'avait fait chanter pour qu'il me foute enfin la paix.
Elle a toujours été mon ange gardien, je pouvais prendre sur moi, supporter, mais je sais qu'un jour ou l'autre j'aurai craqué, personne n'est fait pour supporter ça.
Je suis à deux doigts de pleurer en pensant à la chance que j'ai de l'avoir.
– Oui, je me souviens, lui dis-je en serrant sa tête contre la mienne comme pour la remercier.
– Cette fois, je n'y étais pour rien, c'était Jace, dit-elle en me regardant à son tour.
– Comment ça, c'était Jace ? Je ne comprends pas, qu'est ce qu'il vient faire l'à-dedans ? Lui demandé-je complètement perdu, ça n'a aucun sens.
– Ce soir-là, j'étais hors de moi au diner. Quand j'ai reçu ton message ou tu me disais que Ben avait roulé avec sa voiture sur ton vélo sur le parking du lycée. J'étais d'une humeur de chien, je voulais casser la gueule de ce petit connard, mais Jace m'a devancé. C'est lui qui m'a donné les photos de Ben dans la voiture de Mrs.Clark.
– Quoi ?! dis-je en me redressent.
Hailey s'appuie sur ses coudes et me tourne le dos en continuant à me raconter ce qu'il s'est vraiment passé.
– Il m'a donné les photos puis les a reprises, et m'a dit que toute cette merde s'arrêterait demain. Je n'ai pas affronté McCronick cette fois, souffle-t-elle.
– Jace nous a conduits au lycée puisque ton vélo était mort, et c'est lui qui a chopé Ben. Tu te doutes bien que ce n'est pas moi qui lui ai pété le bras, dit-elle pour conclure.
– Oui bien sûr, mais je pensais qu'il s'était blessé à l'entrainement de hockey, dis-je quand Hailey se retourne vers moi pour me faire face, ce qui me replonge dans mon année de junior.
– Ouais, c'est la version officielle, Jace ne m'a pas dit si c'était lui, mais je le connais, je sais reconnaitre l'œuvre de mon frère, dit-elle en souriant, presque fière.
– Donc c'est grâce à lui que Ben s'est tenu tranquille pendant le reste de l'année ? Enfin, il a changé d'école peu de temps après donc ça n'aurait pas duré indéfiniment, mais tout de même. Je ne sais pas quoi dire, c'est..c'est...
– C'est fou, il te protégeait déjà à l'époque, il t'aime beaucoup à sa manière tordue certes, dit-elle en riant un peu plus, tout ça pour dire que le fait qu'il dévoile devant tout le monde ses sentiments, n'étonne vraiment que toi.
Je suis choquée, reconnaissante et envahi d'un sentiment que je n'ai pas ressenti depuis longtemps, et pour personne auparavant. Hailey m'observe avec son regard attendrissant et me fait un câlin.
– Je ne t'ai rien dit à l'époque parce qu'il aurait pu avoir des problèmes et qu'il m'avait demandé de ne rien te dire, maintenant il y'a prescription. Et puis, l'important, c'était que cette brute te foute enfin la paix, je n'ai jamais compris ce qu'il avait contre toi de toute façon.
– Moi non plus, dis-je dans un souffle
Mais je sais très bien ce qu'il me reprochait, il ne supportait pas que je refuse ses avances et me le faisait payé. De lui avoir mis un stop devant toute son équipe de hockey lorsqu'il m'a proposé de sortir avec lui, l'a rendu dingue. Quel abruti ! Hailey le sait, mais pour sa petite tête aussi pure que du coton, la cruauté humaine est un concept difficile à comprendre. Elle qui est si gentille, ne comprend simplement pas que certaines personnes, sont juste mauvaises.
– Tu restes mon petit ange, lui dis-je en souriant sincèrement.
– Ouais, je sais, dit-elle en levant les yeux au ciel et en me bousculant gentiment, qui est mielleuse maintenant ?
– La ferme, lui dis-je en riant.
– Je ne suis juste plus, le seul ange de ta vie, dit-elle.
Je souris, la serre une dernière fois dans mes bras et me lève du lit.
– Je suppose donc que ça veut dire, même si tu me l'as déjà dit, que toute cette situation ne te dérange pas ? Lui demandé-je sérieuse d'un coup.
Elle se lève à son tour, et remets ses longs cheveux blonds derrière ses oreilles en levant un sourcil.
– Évidemment que non idiote, si tu es heureuse je le suis aussi. Allez maintenant va t'en, je vais me coucher, la route et la baignade m'ont complément cassé.
Ces paroles m'enlèvent un poids que je ne savais pas avoir sur le cœur. Elle me fait un clin d'œil et commence à se mettre en pyjama, je sors de la chambre en lui glissant une « bonne nuit » qu'elle me retourne.
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Pour les nécessité de Wattpad et pour pas que le chapitre soit trop long je l'ai coupé en deux, la suite sera dans le chapitre 33.
Enjoy <3
Picture: Nina (Barbara Palvin)
StrangerInParadise
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Une fois froissé il ne peut plus être parfait
RomanceNina, jeune diplômée, voit sa vie basculer à la mort prématurée de son seul parent encore vivant dans des circonstances étranges. Le fragile équilibre qu'elle avait réussi à construire vole en éclats. Entre découverte de soi-même, reconstruction et...