Étape 32 : Entre deux âmes

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Une grande colline rouge battue par les vents. Yvain se tenait debout au centre, aussi pâle qu'un mort. Ses lèvres bougeaient, mais elle n'entendait aucun son. Et son image se dissipa... Aela pleurait et s'approchait du sommet lorsqu'une ombre géante sortit de derrière la pente, la surplombant de toute sa profonde noirceur. De la fumée âcre envahit l'espace, tandis que deux yeux rouges sondaient son âme avec une acuité particulière à transpercer le brouillard opaque de leur lumineuse présence. Son regard se fixa dans les prunelles rubis loin au-dessus d'elle avec une terreur grandissante.

« Où est Yvain ? Je veux rentrer chez moi ! J'ai peur ! Au secours ! »

           Le sentiment de panique face à l'ombre se transforma soudainement en calme lorsqu'elle distingua les formes imprécises de l'apparition. Une immense queue reptilienne s'enroulait autour de la colline rouge, alors qu'une grosse patte griffue s'y accrochait à en arracher des mottes de terre. Le corps longiligne qui sortit du nuage gris fumée reflétait le noir de la plus sombre des nuits. Enfin, la gueule colossale s'abaissa vers elle, dévoilant des crocs aussi hauts qu'elle, une mâchoire capable de manger un riokrône entier, et des iris écarlates qui la toisaient sans merci.

« Sais-tu qui je suis ? »

            La voix grave et impérieuse de l'immense dragon noir sembla s'acheminer dans son esprit comme un ver rampant à la recherche de la moindre parcelle d'information. Face à une telle intrusion désagréable, elle émit un petit cri d'angoisse et secoua sa tête. L'impression d'être mise à nue s'estompa aussitôt.
           Alors la gueule de l'immense apparition s'ouvrit, prête à la dévorer.
           Aela hurla encore.

           Son propre cri la réveilla et la redressa sur son séant tel un ressort

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           Son propre cri la réveilla et la redressa sur son séant tel un ressort. Avec inquiétude, son regard examina rapidement le lieu où elle venait de dormir, incapable de se souvenirs des derniers événements. Fael en sang, oui, mais comment avait-elle atterri dans cette immense maison ? Et pourquoi se tenait-elle dans un lit aussi imposant ? La chambre où elle se trouvait était entièrement tapissée de bleu doux, et possédait de magnifiques meubles en bois blanc d'un prix sans doute inestimable. L'endroit paraissait destiné à une grande dame très élégante... pas à elle.

          Un petit bruit à la porte et une jeune fille pas plus âgée qu'elle pénétra à pas menus, une tenue simple sur le dos et un doux sourire aux lèvres. Dès qu'elle remarqua son réveil, elle fit signe au-dehors à d'autres personnes encore invisibles. Peu après, un escadron de femmes habillées pareillement s'activèrent, qui portant des vêtements, qui un plateau chargé de victuailles, qui un assortiment d'accessoires. Elle entendit l'une d'entre elles faire couler de l'eau dans une pièce adjacente, dont la porte se dissimulait habilement entre les replis de la tenture.

– Où suis-je ? demanda-t-elle timidement.

          Ce fut la première soubrette qui lui répondit, d'une voix aussi douce que du miel, un délicat sourire aux lèvres.

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