Je ne sus pas comment, quelques minutes plus tard je me retrouvais en blouse blanche coincée entre une naine renfrognée et une nahual au sourire plus grand que son chapeau, déjà assez impressionnant. Je levai la tête afin d'observer l'étrange décor. La pièce faisait partie de la suite reconvertie en quartier général par l'ACE et l'on voyait encore les traces des marteaux utilisés pour casser les murs et agrandir l'espace disponible. Néanmoins, cela ne les avait pas empêché de redécorer la salle. Un paravent bariolé séparait en deux l'espace, créant d'un côté un coin plus personnel avec un simple lit et un atelier enfoui sous l'équivalent de la consommation annuelle d'antidépresseurs de Lana Del Rey en tissu et de l'autre, ce qui se pouvait se rapprocher d'une clinique en temps de guerre avec deux lits, une table d'opération et une cinquantaine d'outils aiguisés à faire pâlir d'envie Dr. House. Cependant si je supposais l'endroit réservé à Eci, c'était sans doute à cause des centaines de chapeaux accrochés aux murs, reposant négligemment sur les lits et recouvrant même le sol en piles touffues, laissant à peine un chemin pour circuler. Ainsi cohabitait et se superposait casquettes, hauts-de-forme, turbans, bonnets, feutres, képis et plus encore que je ne savais nommer. Aucun ne ressemblait à un autre, créant ainsi une explosion de formes, de couleurs et de textures pouvant s'assimiler à un Nagasaki de la chapellerie. Je dus m'arrêter un instant, clignant furieusement des yeux pour leur laisser le temps de s'accommoder. Je me fis la réflexion que l'on pouvait considérer cette avalanche de couvres-chef comme l'ultime défense de l'ACE pour protéger ses blessés. Si un assaillant arrivait à pénétrer jusqu'ici, il perdrait immédiatement la vue suite à l'implosion de ses globes oculaires face à ce spectacle.
Mais cela ne dérangeait en rien la propriétaire qui gambadait joyeusement au milieu de ce foutra en heurtant quelqu'uns de ces chapeaux sur son passage. La naine lui emboîta le pas de sa démarche lourde en ronchonnant tout en ramassant derrière la nahual les malheureux couvres-chef et les remit sur le côté. Ne sachant que faire, je les suivis à mon tour. Eci s'arrêtait de façon sporadique pour examiner un élément ayant capté son attention, qu'importe son emplacement et provoquait ainsi moult avalanches de chapeaux. La personne de petite taille (oui, j'eus une brusque poussée de politiquement correct très perturbante) ne broncha pas et continua de ranger inlassablement derrière la toujours-aussi-distraite féline. Ce petit manège cessa lorsque Eci hurla de joie. À la vue du pauvre objet broyé par son étreinte et de ses petits sautillements accompagnés de piaillements en tout genre, elle venait de trouver ce qu'elle cherchait. Mais avant que j'ai pu apercevoir ce qu'elle serrait dans ses bras, la nahual s'élança vers la partie de la pièce consacrée aux soins. La naine (ouf, j'étais guéris de ma crise de politiquement correct aiguë ) et moi ne purent que la suivre de nouveau, espérant qu'elle ne pile pas brusquement. J'avais la furieuse impression, au vu du comportement de mes deux accompagnatrices, que cela n'était pas inhabituel pour elles et me demandais si je devais considérer ça comme positif ou négatif. Dure, dure question. Et en plus, je n'avais même pas le droit à la calculatrice.
Après avoir contourné le paravent, je pus enfin entièrement voir la portion de chambre reconvertie en hôpital. Et sentis mon sang se glacer en voyant l'état de Maxen, gisant sur une table recouverte d'un simple drap blanc. Nathan était assis sur une chaise, près de lui et regardait le mourant d'un air grave. Quelqu'un, peut-être lui, avait ôté le haut du jeune homme et révélant ainsi à tous l'ampleur de ses blessures. M'approchant lentement, comme effrayé par ce que je pourrais voir, je m'arrêtais juste à côté du fae. Je levais une main, hésitante, et attrapai son poignet presque aussi pâle que le tissu sur lequel il reposait. Son pouls, qui auparavant était bas, était désormais à la limite du perceptible. Me retournant pour invectiver Eci de le soigner au plus vite, je fus heurtée de la voir perchée sur la table d'opération, ses jambes se balançant négligemment dans le vide et son regard fixé sur ce que je devinais être l'objet qui la ravissait précédemment. Ses prunelles semblaient chercher à mémoriser chaque détail de cet étrange chapeau, son doigt suivant les décorations dorées qui le bordait. C'était un chapeau melon, fait de satin mordoré et parsemé de perles. En le regardant de plus près, on pouvait voir qu'elles évoquaient des petits os avec leur couleur ivoire et avaient été cousues de sorte à reproduire un squelette humain sur tout le couvre-chef. C'était une véritable œuvre d'art et chaque seconde passée à l'observer révélait de nouveaux détails. Mais cela ne valait pas une vie.
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Nox, Livre I : Umbra
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