Nox, Livre I : Umbra

Chapitre III : Breaking The Habit

Toutes les dimensions n'ont pas le même niveau technologique. Globalement, plus une dimension est magique moins elle est avancée technologiquement car elle utilisera la magie pour parer à un problème là où un humain réfléchira comment créer une machine pour résoudre le dudit problème à sa place. Pourquoi je prends la peine de vous expliquer ça ? Et bien tout simplement car la dimension Cadeyrn, où aura lieu la fameuse cérémonie, est une dimension fortement magique. Quand je dis fortement, cela signifie que si vous lanciez un caillou, il y a de fortes chances que vous touchiez un mage, qu'il vous explose la face avec une boule de feu et qu'en prime, le caillou vous insulte.

C'est pour ça que Maxen et moi étions actuellement en train de marcher en pleine cambrousse sur plusieurs kilomètres. Autant que les avions, voitures et trains ne soit pas disponible, je peux éventuellement accepter cet état de fait si je suis d'humeur extrêmement généreuse, autant que l'on ne puisse pas avoir un cheval comme monture sous prétexte qu'ils sont protégés par une divinité locale, ça non !

Vous allez peut-être me dire "Mais en tant que Ténébreuse tu n'as pas des pouvoirs incroyablement surpuissants avec, entre autres, la téléportation ?". J'aimerai bien ! En réalité je ne peux me glisser d'une zone d'ombres à une autre que si je l'ai déjà visitée et que si elle est dans la même dimension que moi. De plus, dès lors que je suis en pleine lumière, je perds tout mes pouvoirs pour devenir une simple humaine. Et il n'y a rien que je hais plus que d'être une simple humaine !

Maxen supportait mes grommellements et mes coups de pieds dans chaque caillou qui croisait notre chemin (que voulez vous, j'aime vivre dangereusement) avec stoïcisme. Secrètement impressionnée par sa volonté, je le remontais de quelques points dans mon classement personnel. Désormais il avait la chance incroyable d'être l'égal d'un vieux chihuahua diabétique de Beverly Hills.

Soudain, après une dizaine de kilomètres parcourus en plein soleil depuis le point de voyage interdimensionnel le plus proche, mon charmant compagnon d'infortune s'arrêta. Il se tourna vers moi et me déclara :

"-Plus qu'une dizaine de mètres et on est arrivé. Mais avant je voudrai juste te prévenir à propos de la cérémonie...

-Quoi ? Il s'agit d'un sacrifice d'enfants en l'honneur d'une divinité pittoresque ? Une déclaration de guerre particulièrement sanglante ? le raillais-je gentiment.

-Non c'est une célébration des dieux de la Lumière."

Après avoir sorti cette déclaration comme si il me prévenais juste qu'il n'y aurait pas de confiture au petit-déjeuner, il repartit tranquillement. Je dus me faire violence pour ne pas l'étrangler, le brûler avec un tison de fer chaud, le découper en mille morceaux et envoyer chacune des parties de son corps à un membre de sa famille (les parties génitales seraient allées à sa grand-mère, évidemment).

Prenant sur moi pour ne pas donner vie à mes envies d'enlever sa vie, je lui dis d'une voix étranglée :

"-Je...je vais faire le tour du parc, repérer les environs en cas de problème, la routine quoi.

-D'accord. N'oublie pas de te présenter aux gardes sous le nom d'Auxanne Fuabal.

-Fuabal ? C'est quoi ce nom ? Tu l'as trouvé dans un Kinder surprise ? m'offusquais-je.

Maxen se retourna avec une mine perplexe peinte sur le visage.
Je me radoucis.

-Non, ne t'inquiètes pas, cela ma va très bien comme nom Auxanne Fuabal.

Bien qu'il séjourne fréquemment sur Terre, il y résidait pour affaire et ne sortait pas de son bureau. Je le regardais tristement. J'étais peut-être une ombre mais lui n'était plus qu'une nuance d'homme. Ce travail le tuait peu à peu, cependant cela ne suffisait pas à briser sa volonté. En contemplant ses yeux noisettes, je me donnais une nouvelle mission : l'empêcher de s'autodétruire.

-Allez, à toute à l'heure ! lui annonçais je gaiement en partant à petites foulées."

Maxen me regarda, intrigué, depuis le haut du chemin. Il semblait si frêle...

Peu à peu je m'effaçais. Me fondant parmi les ombres des arbres qui entouraient la propriété, je vidai ma tête. Il était temps pour moi de faire ce pour quoi je suis douée.
Indice, ce n'est pas une recette de tarte aux pommes.

En tout cas, malgré ses soucis, Maxen n'avait pas lésiné sur la sécurité. Perchée sur un érable (en espérant que ce n'était pas une créature magique), je comptais pas moins d'une douzaine de patrouilles, chacune composée de trois personnes. Et cette petite armée personnelle était formée des races les plus dangereuses qui soit. Des démons de feu, de tempêtes, des Destructeurs, il y avait même ces horreurs de Peaux-cristeaux. Brrr...ces bestioles à l'apparence humanoïde pouvaient couvrir leur chair de cristaux incassables en un dizième de seconde. Pour en avoir affronter quelques-uns au cours de mes missions, je peux vous dire que les vaincre n'est pas une sinécure.

Tout ces dispositifs de sécurité auraient dû me rassurer pourtant je ne pouvais m'empêcher l'inquiétude grandir en moins. Pourquoi, malgré cette armada qui aurait suffi à défendre un petit pays dictatorial démocratique à sens unique, Maxen avait senti le besoin de m'inviter moi plutôt qu'une potiche professionnelle ?
Car oui avec son métier, il devait toujours aller à des réunions où il était carrément mal vu de ne pas se ramener avec une femme dont ce n'était pas le métier. Quel ringard ! Il était venu avec son épouse ! Les valeurs se perdaient...

À moins de devoir faire face à une invasion, cela aurait dû suffire. Cette incertitude me rendait nerveuse et attisait mes envies de me défouler. Je tapai dans une branche. Bordel ! C'est le minimum de savoir qui veut à ce point empêcher une simple cérémonie religieuse. Quoique j'aurai peut-être était capable de le faire par principe...L'arbre en dessous de moi grogna brusquement. Avec un soupir je descendis et ne manqua pas de lui laisser un bout de pain que j'avais emprunté discrètement à un garde. Je savais que cette plante était une bestiole magique...