Nathan et moi, nous nous retournâmes pour dévisager notre mystérieux interlocuteur. Pourtant, avec son accent anglais si particulier, j'aurais dû immédiatement deviner. En dépit d'une bataille, plusieurs morts et un état de guerre permanent, ma contre-façon préférée majordome se contentait de hausser un sourcil face à ma robe brûlée, déchirée et couverte de sang.
-Si je puis me le permettre, Madame, vous avez besoin de réajuster votre tenue. Au minimum, me dit-il en sortant un mouchoir de sa poche pour le placer devant son nez.
Un rire m'échappa par surprise.
-On peut dire que vous avez toujours le sens des priorités, lui répondis-je néanmoins.
Le presque-majordome leva son sourcil droit encore plus haut en contemplant le fae et le corps de Maxen gisant sur son épaule. Sarcastiquement, je me demandais qu'elle aurait été sa réaction si il avait baissé les yeux et aperçu l'état du sol. Est-ce qu'il aurait réussi à faire rejoindre ses sourcils avec sa chevelure aussi blanche qu'impeccable ? Cela devait être drôle, il fallait que j'essaye. Pendant que je me livrais à des considérations internes sur les ressources drôlatiques de sa pilosité faciale, il s'enquit, toujours de façon aussi distinguée, de notre conduite et dégageant assez d'espace entre le mouchoir et sa bouche pour parler.
-Où alliez-vous avec ce... corps étranger et au fort potentiel salissant ?
-Un peu plus de respect quand tu parles, serviteur, le rabroua sèchement Nathan avec toute la morgue d'un prince fae. Il s'agit du seigneur Calas, ton maître.
Son ton me surprit. Il était bien éloigné de son comportement habituel, mêlant à la fois la candeur la plus improbable et la témérité d'un chevalier servant. Je ne pus m'empêcher de reculer d'un pas, déconcertée. Nathan s'en aperçut et rougit immédiatement, ses pommettes prenant une carnation délicatement rosée, loin de l'habituel couleur tomate éclatée du commun des mortels. Je roulais des yeux. Même ses réactions physiologiques faisaient trop parfaites pour être vraies. Cependant je ne fus pas la seule à réagir et le valet-qui-aurait-dû-être-majordome se raidit, presque imperceptiblement pour un œil non attentif. Sa réaction fut pourtant bien différente de celle attendue pour un domestique venant de se faire réprimander.
-De un, commença t-il en levant un doigt ganté de sa main libre, le seigneur Calas n'est plus mon maître depuis que le seigneur Dubein a pris possession de ce château au nom de Lucifer. De deux, cela ne répond absolument pas à ma question. Que faites-vous dans cette partie du bâtiment ?
Son apparente impassibilité ne parvenait pas tout à fait à camoufler la rigidité qui perçait dans sa voix, bien loin de sa décontraction amusée précédente. Nathan accusa le contrecoup, son visage prenant brusquement la couleur de l'albâtre la plus délicate sous l'effet de l'embarras. Je commençais à me demander si sa plastique surnaturellement parfaite n'était pas un moyen détourné de la Nature pour s'excuser d'avoir oublié de mettre de la matière grise dans sa caboche. Ma théorie me semblait tout à fait crédible, bien plus réaliste que de croire en la science et la génétique. Depuis quand me reposais-je sur la raison ?
-Pourquoi devrions-nous justifier de nos actions devant un serviteur de l'Empire Pandémoniaque ? parvint néanmoins à bafouiller le fae.
Sa remarque était pertinente, dommage que le trémolo dans sa voix en gâchait l'effet. Cependant, je me retournais vers le valet-toujours-pas-majordome pour observer sa réponse.
Qui fut un lever de sourcil. Gauche. Je sentais mon affection pour lui fondre comme neige en Enfer. Il prit bien le temps d'ôter le mouchoir de son visage pour le plier méticuleusement avant de le ranger dans sa poche de veston en l'arrangeant de manière à ce qu'il dépasse de façon élégante. Une fois assuré du résultat de l'ensemble, la contrefaçon de majordome anglais daigna parler.
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Nox, Livre I : Umbra
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