Chapitre VII : Not Afraid

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Apparemment si le Destin existait, il eût une petite pensée amicale pour moi. Le jeune homme qui avait servi de porteur humain à l'hautaine Valentia cria :

"-Arrêtez ! Vous ne voyez pas que vous la bouleversez encore plus !"

Nullement ébranlée par leur dispute, je me composais tout de même un visage affolé. Pour moi, cela consistait à écarquiller les yeux en tentant de faire un O avec ma bouche. Au vu des regards que me jetèrent les deux concurrents au titre de Crétin Interdimensionnel, cela ne fut pas concluant.

"-Mais si elle est bouleversée, ce n'est sûrement pas de ma faute mais des incompétents qui ont organisé cette cérémonie ! Nommer un sorcier comme hôte est toujours risqué... lança sournoisement le démon.

Je levais les yeux au ciel. Génial, je servais d'excuse pour leur petite bagarre !

-C'est toujours mieux qu'un démon, lui au moins est capable d'arriver à l'heure à un rendez-vous. N'avez vous pas perdu une bataille récemment à cause de votre retard, cher ambassadeur des enfers ? répliqua le vampire.

-En tant que conseiller royal, vous devriez être mieux informé. Nous l'avons gagné et avec une heure d'avance sur nos précisions les plus folles, déclara Ian avec un sourire doucereux.

-Cela ne change rien à... commença Faelan.

-ASSEZ ! hurlais-je."

Les membres de l'assemblée me regardèrent avec surprise. Je venais de m'interposer entre les deux antagonistes en me déplaçant avec ma vitesse de Ténébreuse. Pour un oeil non exercé ou peu attentif, cela ressemblait au déplacement d'un banshee à sa vitesse maximale.

Lorsqu'ils tentèrent de reprendre la parole, je les fis taire en propulsant ma paume dans leur torax, avec un peu de ma magie des ombres pour faire bonne mesure.
Ils hoquetèrent et reculèrent, poussés par l'impact. Ayant la parole et l'attention de l'assemblée, j'amplifiais ma voix pour que tous m'entende.

"-Votre querelle doit s'interrompre, maintenant ! dis-je en insistant particulièrement sur le dernier mot. Par vos actes, vous salissez la mémoire des disparus et surtout, des Dieux consacrés à cette célébration ! De plus, vous nous faites perdre notre temps à tous. Dois-je me répéter, ou c'est clair ?

Le bras droit de Luc avait profité de ma petite tirade pour remettre les plis de ses manches correctement et ce fût donc d'une voix toujours aussi courtoise qu'il me répondit.

-Parfaitement clair, Madame. Aussi clair que les Dieux à qui nous rendons hommage oserais-je.

Le silence qui suivit son jeu de mot fut éloquent quant à la nullité de cette tentative d'humour. Il eût le bon goût de paraître gêné et toussota.

-Hum...en tout cas je vous présente mes excuses les plus sincères mon comportement est...impardonnable. Mais si vous acceptez de m'accorder une seconde chance, je vous escorterais personnellement jusqu'à votre chambre afin de vous faire oublier ce regrettable incident.

Son opposant, qui jusque là s'était contenté de regarder d'un air songeur la trace sombre laissée par mon coup sur sa chemise en soie (À croire que si vous portiez du coton, un dieu quelconque de la mode vous foudroirez pour châtier votre irrespect envers Karl Lagerfeld), s'écria brusquement :

-Vous n'oseriez pas ! Cela serait manquer de politesse face aux autres convives ! Afin d'éviter de vous couvrir de honte, je l'escorterais en votre nom et ainsi, prouverais ma bonne foi pour réparer le tort que je vous ai causé."

Le démon pinça ses lèvres et s'inclina face à moi. Il savait qu'il ne pouvait insister et si Faelan n'avait pas gagné la guerre, il venait de remporter cette bataille.

Avant même que je puisse exprimer mon accord, le vampire me proposa galamment son bras. J'eus à peine le temps d'entrapercevoir le regard inquiet que m'adressa Gueule-d'Ange avant de quitter la salle.

Faelan allait vite, trop même, à tel point que je devais presque courir mon rester à son niveau. Dans chacun des  recoins du château était posté un garde mais le vampire les éloignait d'un simple geste de la main.

Quand je commençais à en être lassée et étais sur le point d'utiliser ma vitesse de Ténébreuse pour ne serais ce que le dépasser ce grand rustre, il se retourna et me plaqua contre un mur, ses deux bras à côté de ma tête. Je grimaçais. Je détestais avoir l'air petite !
Ses prunelles étaient réduites à d'infimes fentes et ses iris verts dardaient sur moi tout son charisme de vampire. Ouah. Ça faisait beaucoup, même pour moi.

Après un instant de silence absolu à se regarder dans les yeux, il soupira et s'éloigna de moi. Il ne me quitta pas du regard pour autant, et ce fut d'une voix hachée qu'il me parla.

"-Je ne sais pas ce que tu es mais tu n'es sûrement pas une banshee. Quand tu t'es interposée...ton odeur...je ne l'avais encore jamais senti.

Il eût un petit rire amer.

-Et crois moi, en près de six cents ans d'existence, j'en ai rencontré des espèces magiques différentes. Donc tu es une surprise, or il y a déjà eu une, et c'est déjà beaucoup trop en une seule soirée.

Son regard continuait de fouiller mon visage, comme si je dissimulais des secrets dans la courbe de mon nez ou dans l'ovale de mes yeux.

-Et bien, maintenant tu sais que tu dois faire attention.

La méfiance se peignit sur sa tête.

-Pourquoi ?

Je lui fis mon plus beau sourire.

-Parce que jamais deux sans trois.

Je tentais de me dégager de son étreinte mais il me retint en attrapant mon bras.

-Je ne sais pas pour qui tu travailles, mais saches que désormais je te surveillerais.

-Parce que tu crois qu'après ta petite dispute avec le démon, tu es blanchi de tout soupçon ? répliquai-je insolemment. Je trouve que tu es intervenu bien vite et que Ian a été bien lent à tenter de te punir pour ton impertinence surtout pour quelqu'un qui vient de gagner un château et qui doit imposer sa loi à ses habitants...oups pardon, il n'a même pas essayé. De nous deux, c'est toi le plus suspect, désolée.

Il me regarda ahuri, comme si je l'avais frappé avec une masse, un piano et un éléphant en même temps. Je suppose que c'était parce que j'avais deux neurones et que je savais m'en servir, les vieux vampires peuvent être tellement archaïques.

Lorsqu'il parvint de nouveau à articuler, il se passa la main dans ses cheveux blonds.

-Tu sais, si je ne te soupçonnais pas d'être dans le camp des enfers, tu pourrais m'être sympathique."

J'éclatais de rire à sa déclaration. Moi, alliée à la cause de Luc ? Au moins il n'avait pas perdu son humour avec sa vie.

Tout en riant, je me suis éloignée de lui. Faelan m'a laissé faire, perplexe.

Je demandais le numéro de ma chambre au garde le plus proche et j'y suis allée. Bon ok, je suis d'abord égarée dans les couloirs tapissés de velours (Pas de la soie, ça changait) et je suis même tombée sur une piscine intérieure. Comme quoi, ça vaut le coup de ne pas avoir de sens de l'orientation.

Une fois la porte de ma chambre ouverte grâce au code confidentiel que m'avait communiqué Maxen avant le voyage (666, il avait trouvé ça très drôle ), je m'avançais dans la suite.

Et bien, j'étais face à un épineux dilemme. Soit les standards des résidences de luxe avaient baissés pendant mes vacances, soit on avait de toute évidence fouillé ma chambre.
Devinez vers laquelle des options je penchais.

Nox, Livre I : UmbraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant