Douche froide

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Ses mots restent en suspens dans les airs et flottent entre nous, emplissant la pièce d'un parfum nauséabond. Celui de l'échec. Et de la mort. Celle d'innocents, sacrifiés pour servir les intérêts du gnome. Mais aussi celle de ceux qui m'ont précédé, ceux qui, comme moi, ont voulu s'en prendre à James et qui l'ont payé de leur vie. Ces quelques paroles, qui résonnent encore à mes oreilles, sonnent comme la promesse silencieuse d'une mort imminente, si je m'obstine à mettre mon plan à exécution.

Pourtant, au lieu de me dissuader d'agir, ces mots ont sur moi l'effet inverse. Je n'y vois pas un frein, bien au contraire, j'y vois la confirmation de mes chances. Je suis le premier à réussir. Cela signifie bien quelque chose, cela signifie que je suis différent. Je ne suis pas comme tous ceux qui ont essayé avant moi. J'ai bien conscience de m'être attaqué au plus faible des deux Alphas, mais il n'empêche que j'ai eu le dessus. J'ai franchis une étape, une étape que personne avant moi n'avait réussi à dépasser. La première d'une longue série qui va me porter toujours plus près du but. Faire tomber James de son trône et le piétiner.

Sans la moindre pitié.

Je lui offrirai la mort qu'il mérite. Dans la douleur et les cris. Et alors que les images de ce nabot, agonisant dans une marre de son propre sang, inondent mon esprit perverti par le goût de la chair, je me mets à sourire. Malgré moi. Mes lèvres n'en font qu'à leur tête et je ne peux réprimer le rictus qui déforme ma bouche. Je suis satisfait de ce que je viens d'entendre.

Je suis le premier à avoir réussi.

Freyja m'observe, la tête légèrement penchée sur le côté, perplexe devant mon air béat alors qu'elle vient de me dire que j'allais probablement y passer si je m'aventurais sur cette voie. Elle ne comprend pas. Comment le pourrait-elle ? Elle n'a aucune idée de ce qu'elle vient de faire. En essayant de me convaincre de ne pas aller au bout de mon plan, elle vient de me conforter dans l'idée que rien n'est perdu. Grâce à elle, je me sens de taille, comme si mes espoirs n'étaient pas vains et que j'avais réellement une chance de remporter la guerre qui s'annonce entre son frère et moi.

- Tyler !

La voix de Freyja tonne dans la pièce, me tirant de mes pensées et me forçant à reporter mon attention sur la petite brune incendiaire qui se tient face à moi. Ses yeux émeraudes plongés dans les miens, elle m'intime en silence de l'écouter. Je ravale la connerie que j'avais sur le bout de la langue et me concentre sur elle et sur le regard qu'elle me lance. Intense, profond, presque suppliant. Elle s'approche de moi, lentement, et aussitôt, mon corps lui répond. Ma peau se couvre de frissons et mon cœur accélère dans ma poitrine, alors que, secrètement, j'espère qu'elle réduise la distance entre nos deux corps pour venir se blottir dans mes bras. Mais elle n'en fait rien. Elle se tient entre mes jambes écartées, ma virilité exposée à ses yeux sans qu'elle n'y jette un regard, et pose une main sur ma joue.

- S'il te plaît ne fait rien d'idiot

Je ne peux m'empêcher de sourire comme un imbécile, le cœur gonflé par l'espoir insensé qu'elle me fasse cette requête parce que je lui plais. Si je n'ai jamais cru à ces conneries d'amour au premier regard, quand je pense à l'effet qu'elle m'a fait la première fois et à ce que je ressens en ce moment, alors que sa main n'a pas quitté mon visage, je me dis que ça y ressemble fortement. Sinon, comment expliquer cette affection que je lui porte, sans même la connaître, et cette envie idiote qu'elle tienne à moi, alors que je me suis comporté comme le dernier des cons en sa présence. Bordel. Ce n'est vraiment pas le moment de me laisser polluer par ce genre d'émotions et de pensées cucul. Je ne peux pas m'imaginer en train de fonder une famille avec cette fille alors que je cherche un moyen d'éventrer son frère et de dépecer son mec. Pourtant, je ne peux pas m'en empêcher, je rêve du package complet : pavillon de banlieue, deux gosses et demi, un chien, un monospace et d'un boulot plan-plan qui ne me servirait qu'à lui payer tout ce qu'elle désire. Et même si pour le moment j'en suis loin, à poil sur cette table d'examen, je m'en fous, je saisis cette opportunité pour m'évader quelques instants. Je nous imagine dans cette caricature de vie de famille parfaite, digne des meilleures sitcoms à l'eau de rose. La jolie brune soupire, les yeux perdus dans le vague et la tête baissée quand elle me dit :

Eclat d'ambre [Terminé ; en attente de correction ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant