L'affrontement

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Je m'élance dans le couloir que vient d'emprunter James, quand le son de sa voix me parvient aux oreilles. Dans une direction opposée à celle que je l'ai vu prendre. Je m'arrête et reviens sur mes pas. Je fouille du regard les amas de chair et de sang qui ponctuent le couloir de tâche roses et rouges, et là, dans les lambeaux qui témoignent de la tenue que portaient les gardes, j'identifie la source du bruit. Un talkie-walkie. Je reprend ma forme humaine et me saisit de l'objet rendu poisseux par l'hémoglobine. 

" Clint ! J'exiges une réponse."

Je ressens un petit pincement en entendant le prénom d'un des hommes que je viens de tuer. Il ne reste plus grand chose de Clint à présent, et à vrai dire, je ne saurais déterminer où le corps de Clint termine et où celui de son camarade commence. 

" Je répète. Avez-vous exterminé l'intrus ?" Sa voix chevrotante m'indique qu'il n'a qu'une confiance limitée en ses effectifs. Incertain quant à l'issue de notre altercation, il attend nerveusement de savoir à quoi s'en tenir. 

Je me racle la gorge, approche mes lèvres de l'appareil et lui chantonne:

" We're coming for you

We'll kick down the door

Be careful what you ask for

'Cause you may get more

Gonna keep it loud

We don't turn down

We're coming back

We're taking over this town "

Une chanson que Trevor et moi chantions régulièrement lors de nos soirées arrosées et enfumées, quand nous nous rêvions barons de la drogue. Une époque qui m'apparaît tout à coup si lointaine. J'ai le sentiment que ces souvenirs, qui apparaissent inopinément dans mon esprit appartiennent à une autre vie, et que je ne suis plus celui qui a vécu toutes ces choses. Et en un sens, c'est peut-être vrai. Je ne suis plus le même.  

A cause de James. 

Il m'a trop pris pour que je le laisse s'en tirer à si bon compte. It's payback time, bitch. 

Lentement, je rebrousse chemin, laissant mes sens guider mes pas. Les effluves de son Eau de Cologne empuantissent encore les airs, il m'est donc facile de le retrouver. Et cette traque est tout à fait plaisante, puisque, sous les embruns musqués étouffants, ressortent quelques notes de souffre et d'ammoniac. Sa colère presque entièrement ensevelie sous la peur. Plus je progresse dans les couloirs étroits du manoir et plus l'état d'esprit dans lequel le nabot se trouve m'apparaît clairement. Il se sent acculé. J'ai décimé une bonne partie de ses effectifs à moi tout seul, mes Bêtas doivent avoir eux aussi diminuer considérablement ses effectifs, bien que je n'en ai pas d'idée précise en ce moment même. A l'heure qu'il est, il doit être conscient de l'impasse dans laquelle il se trouve. Son petit piège a échoué, s'il veut encore s'en sortir, il ne lui reste plus qu'une option. S'enfuir. 

Pieds nus, je savoure la fraîcheur du béton sous ma peau alors que j'avance, déterminé vers ce que je crois être sa chambre, en chantant à tue tête, comme un avertissement, la fin de la chanson. 

"If you want blood, we'll give you some

(Blood, blood)
Straight from the heart till the job is done
If you want it now, then here it comes
(Blood, blood)
If you want blood, we'll give you some
(Blood, blood)
(Blood, blood)
(Blood, blood)"

Eclat d'ambre [Terminé ; en attente de correction ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant