Ethan

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J'enjambe les cadavres à mes pieds et inspire profondément avant de me diriger vers le sommet de la colline où m'attendent Ethan et son homme de main. La distance qui nous sépare n'est pas très importante mais la pente légère fait souffrir mes membres mis à mal par l'épreuve que je viens de traverser. Je ne suis pas tout à fait remis de cette altercation, mais je n'ai pas le choix, je n'ai plus de temps à perdre. Si je ne veux pas que mes prochains adversaires ne se carapatent et alertent James, je dois faire vite. 

J'ignore la brûlure dans mes mollets et mes poumons pour me concentrer sur mon ascension. Mes semelles glissent sur la terre humide et l'herbe grasse, si bien qu'à plusieurs reprises je dois me rattraper aux troncs des chênes qui poussent ça et là, sans qu'on puisse noter une quelconque logique dans leur implantation. Arrivé à une cinquantaine de mètres du garage abandonné, je tends l'oreille. Rien. J'aurais dû m'en douter. Celui que je chasses est un alpha, il n'allait pas attendre mon arrivée les bras croisés. A l'heure qu'il est, Ethan doit être en train de m'observer du coin de l'œil, de chercher ma trace dans les bois ou de suivre mon odeur pour m'attaquer par surprise. Si je veux avoir une chance de m'en sortir, il faut que je sois plus malin que lui. Mes sens ne sont pas aussi affûtés que les siens, et tout ce que je sais, c'est lui qui me l'a appris. Mais par chance, je connais bien mieux les lieux que lui. 

J'examine rapidement mes options et j'en viens à la conclusion suivante : il faut que j'arrive à entrer dans les locaux déserts avant qu'il ne m'atteigne. La place bétonnée, qui était autrefois le parking et la cour du garage, est désolée, seuls quelques vieux bidons d'huiles percés et des carcasses de voitures désossées témoignent de l'ancienne activité de Holseer-Johnson. Avant qu'il ne devienne une plateforme du trafic de drogue. Les maigres cachettes qu'offrent encore la périphérie du hangar sont trop proches pour qu'ils puissent me dissimuler leur odeur. J'imagine donc qu'ils se trouvent à l'orée du bois, suffisamment loin pour que je ne les perçoive pas, mais suffisamment proche pour me voir arriver dès que je tenterai une percée. La précision est la clé. Je me déplace de quelques pas sur ma gauche, repère une fenêtre en hauteur, les vitres ont été brisées il y a bien longtemps déjà mais un vieux tonneau métallique m'offre un accès plus sûr. Je suppose que toute l'attention des deux chasseurs à l'affût est rivée sur la porte principale dont l'entrée a été forcée, laissant de ce fait une ouverture d'environ un mètre cinquante sur toute sa largueur. S'il avait pu coller des flèches lumineuses pour m'indiquer le chemin qu'il espère me voir emprunter, le message aurait été à peine plus clair. Une chance qu'Ethan soit bête comme ses pieds. Je me demande bien ce que Freyja a pu lui trouver avant que toute cette situation ne dégénère et qu'il ne devienne le chien de garde taré du petit frère de la belle brune. Une chose est sûre, ce ne devait pas être sa conversation qui a dû la séduire. 

Ma petite furie. Son visage de porcelaine m'apparaît une nouvelle fois, et me donne l'impulsion qui me manquait pour franchir la vingtaine de mètres à découvert qui me séparaient du bâtiment de taule laissé à l'abandon. 

J'avais vu juste, Ethan et son sbire se mettent à courir en même temps que je m'élance en direction de la fenêtre brisée. Comme ils étaient trop loin pour pouvoir me rattraper, il semblent s'être rabattus sur l'entrée qu'ils gardaient. Je les distance encore, mais plus pour longtemps. A la hâte, je prends appui sur le bidon rouillé et saute dans le verre restant. Les éclats entaillent mes membres alors que je traverse la vitre, aussi, quand mes pieds touchent le sol, je suis en sang. Mais je n'ai pas le temps de appesantir sur mes blessures, j'entends les pas lourds d'Ethan et de son acolyte qui approchent, ainsi que des éclats de voix. Il ne me faut que quelques secondes pour les différencier et les identifier. 

Ethan, et celui qui l'accompagne. Ma grosse Ninouche. 

Parfait. Quand on sait que je tire ma force du monstre aux yeux rouges tapis à l'intérieur de moi, celui qui se nourrit de ma rage, je me dis que le fait que le deuxième homme soit celui qui arrivait à me mettre en colère par sa simple présence est une aubaine. Jusqu'à présent mes actes et mes attaques étaient préalablement orchestrées par mon plan, j'agissais presque machinalement, sans que l'affect n'intervienne dans mon mode de pensée. C'est peut-être pour ça que j'ai eu tant de peine à me défaire de mes assaillants tout à l'heure. Or, si je veux pouvoir vaincre Ethan, et Nina, il me faut plus qu'une bonne stratégie. Ces deux hommes sont des forces de la nature, sans même que leur puissance ne soit décuplée par le loup qui sommeille en eux. En temps normal, dans un combat en corps à corps classique, je serais déclaré vaincu avant même que le premier coup ne soit porté. Je ne fais pas le poids, c'est évident. Mais les combats à la loyale, ça n'a jamais vraiment été mon truc. Pour avoir ne serait-ce qu'une maigre chance de l'emporter, j'ai été obligé de faire pencher la balance de mon côté. 

Eclat d'ambre [Terminé ; en attente de correction ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant