Les premiers battements d'enclume des forgerons se mêlaient aux gazouillis des moineaux, aux roucoulements des pigeons ainsi qu'aux chants sans répits des battements des lavandières.
Malgré l'agitation qui gagnait peu à peu la ville, rien ne semblait troubler la quiétude dans laquelle était plongée la chambre de l'hôtel particulier se situant au 20, rue de L'Asnier*.
Rien, hormis peut-être les grincements d'une fenêtre que l'on ouvrait laissant pénétrer les faisceaux du soleil baignant ainsi la sombre chambre et le doux visage de Pénélope dont les ronflements inégaux faisaient sourire Aëla.
Cette dernière s'assit sur le rebord de la fenêtre puis balança ses pieds dans le vide. La douce brise fouetta son visage dont la longue et épaisse crinière lisse dansait avec la lumière du soleil pour jouer une symphonie de reflets de couleurs chaudes. Elle respira à plein poumon l'air pur que lui offrait la nature.
Elle ferma les yeux pour mieux apprécier la chaleur des rayons qui tapaient contre sa peau dorée. Elle soupira et ramena les pieds entre ses mains, la nuit dernière avait été si longue et ne lui avait accordé que peu de répit.
Elle ouvra les yeux pour regarder le soleil puis elle suivit, obnubilée, les feuilles du grand et imposant vieux tilleul, ancré au milieu de la cour, qui virevoltaient au gré du vent.
Ses yeux rivés sur les branches de cet arbre datant de 200 ans, elle se revit y grimper avec Gabriel sous les complaintes de Pénélope qui partait en pleurant dans la maison pour s'y réfugier.
« Tu sais, Aëla, Tu es vraiment étrange et bizarre.
― Que veux-tu dire ? », lança-t-elle chiffonnée.
Elle balança ses pieds dans le vide et leva la tête pour observer les nuages qui traversaient le ciel.
« Tu n'es pas comme les autres filles. Tu ne te comportes pas comme elles. », continua le petit garçon aux petites tâches de rousseurs sur le nez.
Elle fronça les sourcils et le regarda perplexe comme troublée par les propos tenus par Gabriel.
« Comment devrais-je être ? Pourquoi dis-tu cela ?
― Parce que tu ne pleurniches pas à la vue des énormes rats comme Pénélope, tu grimpes dans les arbres, Mousquetaire t'apprend à te battre, ton accoutrement est bizarre. Tu portes un pantalon sous ta jupe et ça c'est très différent des robes qu'aiment porter Julie, Delphine ou ma sœur. Et, tu tapes aussi fort qu'un garçon. »
Perché sur la grosse branche à côté d'elle, il révéla la manche de sa chemise et lui montra le bleu d'un violet pourpre qu'elle lui avait fait, l'autre jour.
« Il ne faut jamais baisser sa garde, lui répliqua-t-elle en lui tirant la langue.
― Bientôt tu ne seras plus en mesure de faire cela.
― Et pourquoi donc ? »
Aëla pivota sa tête par-dessus son épaule droite, intriguée. Elle savait bien la raison. Elle avait entendu Mousquetaire le dire par hasard mais elle voulait l'entendre de sa bouche, de la bouche de Gabriel qui bafouilla.
« Et bien si tu l'avais pas remarqué, tu es une fille, Aëla.
― Je l'avais remarqué, merci. Et ? »
Elle avança son visage en posant ses mains sur ses hanches.
« Les filles ne se battent pas, ne manient pas l'épée, ne courent pas les rues de Paris, n'aiment pas se salir et revenir crottée de la tête aux pieds. Enfin, elles ne se conduisent pas comme toi !
VOUS LISEZ
Aëla - La Légende de la Princesse De Moret
Fiction HistoriqueAu printemps 1680, les journaux relayent un mystérieux phénomène. A Paris, un mystérieux bandit masqué, armé de son arc, vole les riches pour donner aux pauvres. Rapidement, la fièvre du Robin des Bois français gagne les petits gens asphyxiés par le...