Versification.

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Versification.

« L'anorexie est une maladie mentale. Dangereuse. Destructrice. Mortelle. »

Assis devant son bureau, le jour déclinant derrière la vitre, JungKook laisse sa tête reposer dans ses mains. Longtemps. Fatigué. Terrassé. Il s'est endormi au petit jour, sous une auréole de lumière blanche. A son réveil, la fenêtre était entrouverte et TaeHyung avait disparu. TaeHyung est comme un songe. Omniprésent la nuit. Fugace au réveil. Et JungKook avait demeuré silence en son absence. Il sombrait dans une douce folie. Tournant en rond la moitié du temps, assis dans la salle à manger, par terre dans la salle de bain, debout dans sa chambre, nulle part et partout à la fois. Puis il avait fini par ouvrir son ordinateur et faire ses recherches. Tombé dans un puits sans fond où même quand la lumière est inexistante, les ombres grandissent encore. Et encore. Assis devant son bureau, ses doigts plongent dans ses cheveux corneilles. Puis ils redescendent frotter ses yeux humides. Si secs. Il se griffe presque le visage. Il a envie de brûler les images. De ce corps détruit. De ce corps sans vie.

Il a froid et il s'embrase. Il a des longues traînées noires sous les yeux, peintures d'une nuit sans sommeil. Il a la pâleur du froid, de l'angoisse, et les tremblements d'un enfant réveillé en sursaut, grelottant de son récent cauchemar. Ses épaules sont des séismes, ses yeux des tsunamis. Quand les vagues tueuses se répandent le long de ses joues, il sait. Il sait qu'il n'a jamais pleuré avant. Que c'est réel. La réalité l'a frappé. Que faire ? Le silence l'a avalé. Que penser ? Un trou noir la transpercé. Comment ? Un poignard brillant a troué le rêve. Pourquoi ? Et les questions l'assaillent sans trêve. Il s'est réveillé et en voyant le monde ce matin là, il a compris qu'il n'avait rien vu avant. Qu'il n'avait jamais été assez grand, assez vivant, assez intelligent pour comprendre, comprendre que le garçon qu'il serrait dans ses bras était incomplet, que ses sourires étaient des cités en flammes, que ses yeux étaient des soleils éteints et que son esprit était une ruine. Une grande ruine plane. Pourquoi ?

Il s'en veut tellement. Il voudrait s'arracher le cœur et le lui tendre. C'est sa prière et il aimerait la lui faire entendre. Comment ? Le temps passe dans son isolement, dans ses pleurs apathiques, figé dans un mutisme dément. La nuit s'étale pleinement sur la Terre. Mais il fait déjà tout sombre dans son univers. Que faire ? Piégé en Enfer, JungKook attend. Il attend tellement longtemps que son esprit s'écroule sur lui même. Son crâne est un champs stérile où rien ne pousse. C'est une terre noire et épaisse, cendres sans finesse. Finalement JungKook s'allonge dans une source salée et s'endort sur ses cernes nébuleuses. Embrumées.

Le lendemain il est un corps sans vie qui traverse des couloirs agités. Il a presque envie de s'énerver. Ne voient-ils pas la vérité ? Quelle est cette réalité ? Bon sang, regardez. Regardez la chair sans couleur, et les battements sans cœur. JungKook bouge parce qu'il s'y sent obligé, mais il aimerait s'enfermer. Pourquoi ? Et pouvoir penser. Comment ? Seul. Que faire ? Puis JungKook s'arrête net devant son casier. Un bout de papier blanc y est scotché. Un peu de couleur sur la surface carbonée. Il l'attrape, lit, reconnaît son écriture penchée, courte mais allongée.

« Désolé. »

JungKook ouvre les yeux très grands. Une marguerite a poussé sur son crâne désertique.

Puis soudain, le bleu du papier a tâché les murs monochromatiques.

Et dans une certaine réalité, les Âmes Poétesses volent sur la lande des idées.

Âmes Poétesses - TaeKookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant