Absolutisme.
Aujourd'hui encore, il fait beau. Et aujourd'hui, il fait chaud. Comme un bout d'été planté dans le printemps. Comme un échantillon de soleil qui s'est posé sur la ville. Sous un vent nouveau, les gens sourient. Étonnant. JungKook est assis par terre dans l'herbe qui borde le stade. Autour de lui, il y a des arbres. Et plus proches encore il y a ses amis qui parlent fort. JungKook n'est pas bien sûr de savoir pourquoi, mais ils jouent aux cartes. Et Jin engueule NamJoon parce que NamJoon triche. Et NamJoon contredit, s'amuse. Jin aussi s'amuse. Tout le monde s'amuse. Il y a des jours comme ça. Des jours où c'en est presque étrange. Jimin parle de choses avec YoonGi. Ils ont l'air concentrés, captivés, capturés. Autre part. JungKook pense que c'est bien.
L'autre jour, JungKook a eu une discussion avec Jimin. Alors qu'ils étaient assis sur le banc habituel, JungKook lui a parlé de TaeHyung. Parce qu'en regardant le ciel et les gens et les arbres et puis encore le ciel, il a trouvé ça judicieux. JungKook est constamment inquiet, focalisé, obnubilé par TaeHyung. Il y pense beaucoup. Sans y penser vraiment. Impuissant. Et quand il a dit à Jimin qu'il essayait de faire quelque chose – n'importe quelle chose – Jimin a compris. Et Jimin lui a dit de faire quelque chose. N'importe quoi. Puis il a posé sa tête sur son épaule et JungKook a posé la sienne sur son front. Ils ont regardé les gens passer et sourire et passer encore. JungKook s'est excusé. Et Jimin l'a frappé du plat de la main, a rigolé puis s'en est allé. Son rire a plané, encore quelques minutes après. Et le poète l'a bien aimé. Il a même souri.
« -JungKook. »
Le concerné ouvre les yeux, sans même se souvenir de les avoir fermés. Il croit que c'est NamJoon qui l'a appelé. Il ne sait plus. Tout ce qu'il fait c'est voir. Parce qu'il y a TaeHyung qui le regarde à quelques mètres de là. Il le regarde. Il le contemple. TaeHyung est là, le orbes passives, les orbes violentes. Puis JungKook aperçoit le livre entre ses mains, comprend et part le rejoindre d'un pas rapide.
« -Tu l'as déjà fini ?
-Oui. »Le soleil dans ses yeux, sur sa peau, tout le long des courbes de son visage, l'illumine. Et un autre astre vrille entre les feuilles des arbres, en un mouvement calme, creusant son subtil chemin jusqu'aux ombres vertes. D'un accord silencieux, les deux garçons s'éloignent. Personne ne dit rien à ce sujet. On laisse les choses arriver. On les regarde s'en aller. D'abord le silence plane, mêlé aux cris du lointain, et au vent très proche, entre les feuilles, contre les tympans. Puis soudain TaeHyung se met à parler. Il commence à parler du livre, tâtonnant contre les mots, cherchant longuement l'expression la plus juste pour décrire l'émotion la plus profonde. TaeHyung parle et ils marchent et TaeHyung parle encore. Plus que ça. JungKook l'observe, l'écoute ; TaeHyung s'exprime. Et au fil des pas, au gré du vent, hors du temps, le lycée s'éloigne. Le monde s'estompe. JungKook est fasciné par ses paroles. Car TaeHyung a beaucoup pensé en lisant, beaucoup pensé en rêvant des mots que JungKook a surlignés. Car TaeHyung déborde de choses à dire et il a un besoin inéluctable de les dire. Et presque inconsciemment, il les dit. JungKook l'écoute, avide. Le temps s'écoule, sublime. JungKook détaille ses termes et son visage. Il est absorbé par ses idées et ses yeux muets. Il se rend compte que c'est la première fois. La première fois que TaeHyung parle autant. Alors il s'abreuve de ses paroles, prenant garde de n'en laisser s'échapper aucune.
Et dans cette réalité, TaeHyung déborde de trop de réalité.