Episode.
Quand TaeHyung rentre dans sa chambre, il ne s'attend pas à voir sa mère assise sur son lit, les doigts entrelacés et les yeux vides. Ils se réveillent quand elle le voit arriver. TaeHyung s'arrête quelques secondes, la regarde sans expression particulière puis s'éloigne vers son bureau. Il ferme la fenêtre qu'il a laissée ouverte durant son absence. Il n'a pas dormi ici la nuit dernière. Et sûrement pas la nuit d'avant non plus. Il ne compte plus.
« -Où étais-tu ? » Demande sa mère d'un ton plus froid que l'hiver.
Mais TaeHyung ne répond pas. Il fait mine de ranger ses affaires. Ou peut être le fait-il vraiment, indifférent.
« -Ton père veut que je voie un médecin. ( Rire fade. ) Si je refuse il va probablement demander le divorce. ( Silence. ) Tu ne dis rien ? Tu t'en fiches ? ( Autre silence. ) De toute façon ça ne t'a jamais beaucoup importé ; la famille, notre famille. »
TaeHyung sourit dans le vide, et sans même lui adresser un regard, il répond :
« -Notre famille ? Quelle famille ? »
Et soudainement sa mère s'énerve, lâche tout un tas de paroles qui se mélangent sans se suivre, sans s'aligner, sans s'expliquer vraiment. Reliées par la colère et une souffrance sans nom. Elle ne crie pas, sa voix sonne comme un orage. Elle le traite d'égoïste, elle siffle des reproches comme des éclairs, elle marmonne des plaintes comme un grondement. Elle lui dit que c'est de sa faute si son père veut la quitter, que c'est un mauvais fils, qu'il monte son frère contre elle, que son père dit qu'il va partir et qu'elle va finir seule sans personne à cause de lui, qu'elle est si malheureuse et que personne ne l'aime. Personne ne l'aime. Personne ne l'aime. TaeHyung lâche ce qu'il tient entre ses paumes, il s'approche du lit et s'agenouille devant sa mère. Il prend ses mains dans les siennes. Elles sont glaciales, comme ses prunelles, comme ses mots. Elle se tait. Il la regarde droit dans les yeux. Entre leurs orbes, l'infinité du chaos. Puis il tranche le silence. Il lui dit :
« -Qui dégrade autrui me dégrade
Et rien ne se dit ou ne se fait, qui ne retourne enfin à moi.C'est Walt Whitman qui a écrit ça. Au début je ne comprenais pas, mais maintenant si. Je crois que nous avons un besoin maladif de nous accrocher à ce qui nous détruit. Mais ceux qui sont incapables de nous aimer, demain n'en seront pas plus capables qu'ils ne l'étaient hier.
Arrachez les verrous des portes
Arrachez les portes mêmes de leurs gonds.On dit que Dieu vient en aide à qui le demande, et si Dieu il y a, je pense plutôt qu'Il vient en aide à ceux qui veulent s'aider eux-même. Rien ne nous empêche d'être libres à part nous même. C'est pour ça que je m'en vais. Il est des choses et des gens qui ne peuvent pas changer. Qui ne peuvent pas changer comme on le voudrait. Et c'est tant pis. Je ne suis pas en colère après toi, ni après qui que ce soit d'ailleurs. Je sais que tout le monde a son lot de douleur, son lot de perte et de dépit, c'est comme ça. Chacun est qui il est et ce n'est pas sans raison. Je comprends et c'est bien ainsi. Tu ne peux pas être ma mère et je ne peux pas être ton fils. Alors quand je partirais, peut être deviendrons-nous deux étrangers, et peut être serait-ce mieux ainsi, n'empêche que je nous souhaiterai toujours d'aspirer au seul vrai bonheur. Ecoute ce que dit le poème. Ecoute ce que dit ton être propre. Et sois libre. »
Et dans une autre réalité où TaeHyung ne sort pas de sa chambre, il voit les larmes de sa mère couler en silence. Mais ça n'aurait pas été une bonne réalité. Car il nous faut partir.