CHAPITRE DIX
Olivier.
Lundi 16 janvier.
17h51.
Je claque la porte de mon casier tout en jetant un regard circulaire dans les vestiaires. Personne. Avec attention, j'époussette mon pantalon et lisse les pans de ma veste. J'ai la désagréable impression d'être un débutant. Tout en vérifiant la date du jour, je soupire de soulagement, ma période d'essai est bel et bien terminée.
Dans la cuisine, le remue-ménage habituel de la brigade étire mes lèvres dans un sourire franc. J'aperçois du coin de l'œil Pierre qui porte tant bien que mal trois casseroles. Le chef n'est pas dans la pièce mais Alain est là pour veiller au bon fonctionnement de la cuisine. Il prépare la brigade au service de ce soir qui devrait débuter dans moins d'une heure.
Je pousse les portes battantes de la cuisine et arrive dans la salle, Maryse et sa crinière flamboyante m'accueillent dans un sourire agréable. Elle m'indique du menton la pile de serviettes qui m'attend et la table sur laquelle je peux m'asseoir. Je lis les instructions sur le petit carré blanc de papier, je reconnais sans peine l'écriture du chef. Désormais, il est plus facile pour moi de la décrypter.
Les minutes s'écoulent rapidement et le tas de serviettes pliées s'agrandit à mesure que je prends le coup de main. Je jette un petit coup d'œil à l'extérieur du restaurant, le temps est couvert et les passants se protègent du vent comme ils le peuvent. Le vent fait virevolter les feuilles mortes. Un véritable temps d'hiver qui me fait frissonner d'avance. Il semblerait que le temps soit glacial.
« C'est du bon travail, dommage que tu te sois trompé de serviettes, murmure une voix près de mon oreille.
Un long frisson remonte le long de mon dos tandis que j'éprouve des difficultés à déglutir. Je sens le souffle du chef contre la peau de mon cou et je suis comme tétanisé. Il fait le tour et s'assied en face de moi, sa veste noire rappelle ses cheveux corbeau et durcit ses traits.
− Je.. j'ai pris les serviettes que Maryse m'a données, balbutié-je.
− Chef, accentue-t-il. Je m'en fous de qui te les a données, ce ne sont pas les bonnes.
Je gratte l'intérieur de ma main gauche, geste que je n'ai pas reproduit depuis un moment. Il faut dire que le stress fait partie de ma vie depuis trois mois.
− Je ne pouvais pas le deviner, chef.
Lorsque ses yeux rencontrent les miens, je sais que j'ai dit une connerie.
− Tu te prends pour qui, Hauffman ? Tu penses que tout est acquis parce que je t'ai gardé ?
Il éclate de rire et je baisse la tête.
− Je suis désolé, murmuré-je.
− Prends ton manteau, et dégage. Tu reviendras quand tu seras capable d'accepter une remarque. »
J'évite de souffler et l'observe quitter la table. Mes regrets sont inutiles alors je les ravale et range ma chaise sous la table. Je passe devant Maryse sans prononcer un mot, pousse les portes battantes puis entre dans les vestiaires. Je marche jusqu'à mon casier, attrape mon manteau et visse mon bonnet sur mes cheveux. Lorsque je sors, Pierre m'interroge du regard et j'hausse les épaules, je n'ai pas envie de discuter.
A l'extérieur, la pluie a déjà commencé à tomber drue et je me retrouve obligé de fermer mon manteau jusqu'en haut. La musique que j'écoute est douce et les notes de piano reflètent mon humeur.
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Du Bruit Dans La Cuisine
DragosteParis, septième arrondissement, où la richesse, la luxure et l'envie trônent en maître. Entrez et poussez les portes de l'un des restaurants les plus huppés de la capitale. Paris, ville des amoureux. Où il suffit de deux prunelles anthracite pour...