Chapitre quinze − Andrev Krakowski

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CHAPITRE QUINZE

Andrev.

Mardi 7 février.

13h39.

J'écrase ma cigarette sous le talon de ma chaussure, un sourire étire mes lèvres bleuies par le froid. Cette journée est prometteuse. Elle se doit de l'être, ne serait-ce que pour mon moral. Un sentiment de joie grandit dans ma poitrine, je suis heureux. Comme un gamin à qui on a promis un ballon de baudruche. Le problème avec les ballons de baudruche c'est qu'ils sont fragiles et je ne veux pas que cette journée disparaisse comme un ballon que l'on a percé. Je suis heureux comme si on m'avait attribué une troisième étoile, il ne manque que le champagne. Rien à voir avec la colère sourde des jours précédents, juste une plénitude extra. Je suis calme et reposé, aussi étonnant que cela puisse paraître, me connaissant. J'aurais tendance à dire que ce n'est que le calme avant la tempête. Pierre ne sera pas là cet après-midi, uniquement le nouveau et ses capacités. Ce qui est davantage intéressant, je n'aurai pas besoin d'entendre leurs rires dans la cuisine. C'est déjà bien assez. En plus de passer leur soirée ensemble, ils restent collés au restaurant. Cela m'exaspère au plus haut point, c'est d'ailleurs pour ça qu'ils ont fini séparé. J'ai envoyé la teigne avec Linus, persuadé qu'il se la fermerait et ça a très bien marché. Je ne l'ai plus entendu de la soirée. Je préfère quand il rit, davantage que quand il a peur, mais je n'aime pas que Pierre, le saucier, soit la cause de ses éclats de rire. Puis, cela l'empêche de se concentrer correctement sur son travail et Dieu sait qu'il a besoin de concentration. D'où la raison de mon sourire et de ma bonne humeur ; je ne travaille pas cet après-midi, parce qu'il a besoin de mon aide.

En entrant dans mon appartement, je dépose mon caban sur le porte-manteau et me dirige droit vers ma chambre. De là, je laisse tomber mes vêtements au sol avant d'opter pour ma veste favorite, noire, avec mon nom et mon prénom inscrits au-dessus de la poche gauche. Satisfait, j'allume les enceintes de mon appartement et lance un morceau de Rock sur lequel je pourrai chanter sous la douche. Je ne me reconnais plus. Je lâche un petit rire coupable avant de me glisser sous l'eau glacée de la douche. J'asperge ma peau qui se mue en une multitude de frissons incontrôlables. L'instant d'après, la mousse recouvre ma peau tandis que je chante en me servant du pommeau de douche comme d'un micro. Je n'ai pas fait cela depuis mes douze ans et je me trouve stupide.

Toujours souriant, je m'habille avant de me poster devant le miroir de la salle de bain. Une rapide main dans mes cheveux suffit à les faire tenir correctement sur le dessus de mon crâne. Avec mon blaireau, j'étale la mousse à raser sur mes joues avant d'augmenter le son de la musique, pour profiter allègrement du Rock qui emplit mes oreilles. Le métal glacé de la lame de rasoir contre ma joue contraste avec la chaleur de ma peau. Mon Jean est noir également et la seule pointe de couleur que je porte vient de la couleur blanche de mes bras. J'ai toujours été pâle, mon père dit que ce sont les gènes polonais qui ressortent. Tout ce que je vois, c'est que je ressemble à un vampire sortant de son cercueil. Mais ça va bien avec mes cheveux et mes yeux ressortent encore plus foncés, de quoi en intimider plus d'un.

Une fois que je me suis jugé présentable, j'enfile mon caban, noue mes lacets et récupère ce dont j'ai besoin pour sortir. Je récupère un sac de courses sous l'évier et claque la porte de mon appartement. Je fredonne le refrain de Snow des Red Hot tout en me baladant dans Paris, une idée bien précise derrière la tête. Lorsque je sens mon téléphone vibrer contre ma cuisse, je range le sac sous mon bras et l'extirpe tant bien que mal de la poche de mon Jean. Le prénom de Dimitri s'affiche sur l'écran et je décroche le téléphone avant de le coincer entre mon épaule et mon oreille.

Du Bruit Dans La CuisineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant