•Chapitre 37• «Friends are the best remedy...»

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Je tenais le papier avec le numéro de la certaine Louisa Bourg dans la main lorsque Lylian vint s'asseoir à côté le lendemain matin. Il m'embrassa, mais sentant que j'étais tendue, il se décolla de moi et me demanda :

«-Quelque chose ne va pas ?»

Il s'aperçut alors que ce que je tenais dans ma main et il reprit, un peu plus doux :

«-Appelle-la si tu veux.»

Je tournai mes yeux vers lui, l'air de dire "C'est vrai ?". Je n'attendais pas une autorisation de sa part, mais savoir qu'il était au courant de mes faits et gestes me donnait confiance, comme s'il avait toujours raison quoi qu'il dise.

Je glissai le papier dans ma poche et soupirai. Je voulais parler à quelqu'un de ce rêve, mais je n'étais pas sûre que Lylian veuille entendre mes supplications. Je devais être pénible à force de ne jamais être de bonne humeur.

Cependant, Lylian ne le prenait pas comme cela, parce qu'il n'était pas comme les autres. Il vit que je voulais parler mais que je n'osais pas. Il savait lire en moi. Il me comprenait, peut-être même mieux que je ne me connaissais moi-même.

«-Zéli ? Tu peux me parler tu sais...»

Sa voix est mélodieuse. Il avait une façon de parler qui vous mettait tout de suite à l'aise, comme si vous vous connaissiez depuis longtemps, comme s'il vous était familier.

«-Je... j'ai vu cet homme en rêve... il connaissait mes parents...»

Lylian me regarda comme si je venais de lui parler de sa propre vie. Ce que je voulais dire par là était qu'il semblait vraiment concerné par ce que je venais de dire. Il fronçait les sourcils, ce qui lui donna un air de questionnement. Et il avait toujours ce pli qui lui barrait le front, comme à chaque fois qu'il était soucieux de quelque chose.

Je lui détaillai mon rêve, en lui évoquant les moindres détails. À la fin de mon récit, il en vint à la même conclusion que moi :

«-Donc tu le connais.»

Je faillis riposter gentiment que, jusqu'à là, il ne m'aidait pas vraiment, mais sa voix impartiale lorsqu'il avait déclaré ces mots m'en empêcha.

Je n'arrivai pas à déterminer ce à quoi il pensait. Était-il heureux, soucieux, inquiet ? Son expression neutre ne laissait rien transparaître. Ses yeux d'un beau translucide restaient fixés sur les miens. Je retrouvai en lui cette expression menaçante qui me faisait trembler, cette même expression que j'avais vu sur lui le soir où il m'avait embrassée pour la première fois.

Je restai sans rien dire, stressée et mal à l'aise devant cet air glacial. Lylian demeura quelques secondes, ses yeux toujours fixés dans les miens. Le pire était que je ne parvenais pas à me détacher de ses yeux si mystérieux. Ils avaient une telle attirance, que l'on aurait dit des aimants. Je ne pouvais pas m'en détacher.

Le temps du contact me parut être éternité. Intérieurement, je priai pour que cela cesse mais, au fond, quelque chose m'empêchait de briser ce lien.

Lylian parut être sur le point de dire quelque chose, puis, aussi soudainement qu'elle était apparue, son expression glaciale s'envola, comme balayée par un vent chaud. Son sourire revint et s'infiltra en moi. Cela finit par me détendre. Je ne pus m'empêcher de penser que je reconnaissais Lylian lorsqu'il souriait, mais qu'avec cet air glacial et impartial, je ne le connaissais pas. Il y avait une part de lui qui m'était inconnue, quelque chose que lui même semblait redouter.

Lylian reprit la parole d'une manière si innocente qu'on aurait du mal à croire qu'une expression aussi cruelle pouvait tirer les traits de son visage angélique. Comme si ce masque glacial ne collait pas avec lui.

«-Tu vas appeler cette Mme Bourg ?»

Je réfléchis à sa question et finis par hocher la tête simplement. Oui, j'allais l'appeler. Je voulais en savoir plus. J'avais besoin d'en savoir plus.

***

En cours de maths, Elsa me demanda pourquoi je semblais si perturbée (c'est vrai que j'étais rarement confuse au point de ne pas faire mes exercices durant un cours de maths).

En sortant en récré, après une heure de physique assez longue, je la pris à part et lui racontai tout, en omettant juste cette expression si différente qu'avait affichée Lylian pendant quelques instants et qui m'avait fait si peur.

Elle sembla aussi soucieuse que Lylian, quand elle me demanda :

«-Tu vas faire quoi ?»

Dans ses yeux, je vis qu'elle revivait notre soirée de samedi où tout avait changé. Je compris qu'elle n'avait pas confiance en cet homme. Elle pensait la même chose que ce qui me tourmentait depuis ce matin : pourquoi mes parents m'avaient-ils cacher cet ami ? Je savais qu'il y avait une raison particulière et j'avais envie de la découvrir même si je la craignais.

«-Je ne sais pas, je pense que je vais appeler cette femme pour en savoir plus...»

Ma voix se brisa sous le coup de toute cette pression qui s'acharnait sur moi depuis ces derniers jours. Je me mis à pleurer toutes les larmes d'interrogation et de renversement que j'avais accumulées. Cela faisait un bien extrême.

Elsa, consciente de mon état de détresse, me prit dans ses bras et se murmura tendrement, dans l'espoir de me réconforter :

«-Ne t'inquiète pas, Zéli, tu n'es pas seule.»

Je vis qu'elle était au bord des larmes, mais cela ne me surprit pas. C'était une des nombreuses choses qui nous unissait désormais : lorsque l'une pleurait, l'autre pleurait aussi. C'était inévitable.

Evan, venant de nous rejoindre, se rendit compte de notre enlacement et de nos larmes. Il s'approcha et nous prit toutes les deux dans ses bras en clamant, bien haut et fort pour que tout le lycée soit au courant :

«-Câlin !!!!»

C'était dingue comme ce gars était à la fois affectueux et complètement barré.

Désormais, avec notre câlin à trois, les élèves qui passaient nous regardaient étrangement, mais, pour une fois, je n'y tins pas compte. Dans les bras de mes amis, je me sentais bien.

***

Le soir, dans le bus, Lylian tenta de me réconforter après cette journée mouvementée :

«-Comment vas-tu ?»

Il avait du sentir qu'aujourd'hui je l'avais un peu évité, et que nous n'avions pas beaucoup parlé.

En effet, j'avais passé une grande majorité de ma journée avec Elsa et Evan, tandis que Lylian avait préféré nous laisser seuls tous les trois et s'était éloigné, avec d'autres garçons de notre classe.

Je me rendis compte qu'il avait suffi d'une journée pour créer une sorte barrière entre nous, barrière que Lylian voulait briser. Je constatai que je le souhaitais aussi, plus désespérément que raisonnablement :

«-Je suis désolée pour aujourd'hui. Je... J'avais besoin de réfléchir...»

Je vis à son regard qu'il comprenait parfaitement mon état d'esprit :

«-Tu as raison.»

Il émit son petit sourire en coin qui me faisait tant craquer, avant d'ajouter

«-Je peux me montrer collant, parfois.»

Je rigolai en me disant qu'il avait le don de détendre l'atmosphère. Je lançai alors une des seules choses dont j'étais sûre actuellement :

«-Je t'aime Lylian Johnson.»

T1 | S'il suffisait que je te le dise...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant