•Chapitre 7• «Good mark...»

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«-Dis, t'en tire une tronche ! me fit remarquer Elsa lorsque j'arrivai devant elle.»

Je n'avais pas vraiment réussi à me reposer après mon réveil au milieu de la nuit (plus proche de la fin que de début, mais bon, c'est une expression après tout), si bien que de grosses cernes ornaient mon visage et, comme je ne me maquillais jamais, cela se voyait davantage.

«-Mal dormi, grommelai-je, en gratifiant le tout d'un demi-sourire, visant à être rassurant.»

Rassurée, Elsa se mit à parler de tout et de n'importe quoi et la seule chose que je retins était qu'elle n'avait pas accepté en ami sur Facebook le nouveau, ce qui, étrangement, eut pour effet de me soulager. Nous nous trouvions devant la salle 217, une salle de SVT, pour assister à notre premier cours. Le couloir commença à se remplir et je cherchai des yeux... Je me retournai vivement vers Elsa, en me rendant compte que je cherchais des yeux le nouveau. Je secouai la tête, j'étais ridicule.

D'ailleurs, je ne l'avais pas vu ce matin dans le bus. À moins que je n'avais pas fait attention. Je me concentrai sur ce que disais Elsa pour tuer ce sentiment de malaise qui s'emparait progressivement de moi.

«-...samedi. Et du coup, c'est ma mère qui nous emmène, elle vient te chercher à 18h, ça te va ?»

Je mis quelques secondes à me rendre compte qu'elle me parlait et qu'elle venait tout juste de me poser une question. Je finis par hocher la tête :

«-Ouais, t'inquiète.»

J'avais l'esprit ailleurs et cela se voyait. Elsa fronça les sourcils et ouvrit la bouche, sûrement pour me demander ce que j'avais, mais elle fut interrompue par l'arrivée d'Evan, que l'on pourrait qualifier sans euphémisme de bruyante et provoquante.

«-Alors ?»

Il semblait, comme toujours, enthousiaste et affichait aujourd'hui un sourire plus que rayonnant. Je lui répondis, tentant de mettre autant de vivacité dans ma réponse que celle qu'il avait employée en arrivant.

«-Déjà, bonjour Evan. Et ensuite, oui, on sera là.»

Je regrettai aussitôt mon élan d'enthousiasme car Evan se mit à crier et ceci sans aucune gêne.

«-Cool !! Ça va être GÉNIAL, vous allez voir !! Alors, arrivée 19h30, ensuite, à 20h, on...

-Evan ! le coupa Elsa, amusée, sachant qu'on ne l'arrêterait jamais. On sera là, ok ?»

Il acquiesça, mais son sourire ravi ne le quitta pas pour autant. Il continua d'ailleurs à jubiler jusqu'à l'arrivée de M. Marton, notre prof de SVT, qui le recadra gentiment, comme à son habitude.

Le prof nous fit entrer dans la salle avant de nous apprendre qu'il avait nos DS de la semaine dernière. Cette nouvelle fut accueillie par une ovation digne de l'arrivée d'un artiste sur scène, mais M. Marton relativisa aussitôt :

«-Il y a de bonnes notes, comme de très mauvaises. En tout cas, ce ne sera pas une bonne nouvelle pour tout le monde ici.»

Evan, assis juste devant Elsa et moi, se retourna et lança gaiement :

«-Aujourd'hui est un jour de chance, je sens la bonne note arriver !»

Elsa le remballa gentiment :

«-Si 2 est une bonne note pour toi, tu vas être servi !»

Evan tira la langue, faussement vexé et, sur la demande du professeur, se retourna.

J'étais inquiète et ce qui m'inquiétait le plus était que je ne savais pas d'où me venait ce mal-être. J'essayai de me persuader que je m'inquiétais pour ma note, mais je savais que l'absence mystérieuse du nouveau y était pour quelque chose. Une partie de moi était en état d'alerte et se demandait continuellement où IL était. Et je ne pouvais pas contrôler cette sensation de vide et de manque, que me procurait cette absence. Mon côté rationnel ne cessait de répéter que je ne le connaissais à peine -sinon pas du tout- et que je n'avais aucune raison concrète et correcte de m'inquiéter. En revanche, ma part irrationnelle était concentrée sur cette "disparition" et me préoccupait plus que tout. De plus, je ne cessais de revivre mon cauchemar, qui avait été plus réaliste que jamais et me perturbait, ce qui n'était d'habitude pas le cas. Disons que je m'étais habituée à ces cauchemars et que je parvenais à les mettre de côté assez facilement, ce qui ne fut pas le cas aujourd'hui. Enfin, tout cela pour dire que je n'étais pas dans mon assiette cette journée !

Le prof prit sur son bureau un tas de copie, qui débutait brillamment, par un 5/20, de quoi, je cite, "vous mettre en bouche", d'après M. Marton.

Alors qu'il allait justement rendre cette première -et très réussie- copie, quelqu'un toqua avant d'entrer dans la salle avec une sorte de nonchalance que je reconnus aussitôt. Mon cœur fit un léger bon dans ma poitrine quand je m'aperçus qu'il s'agissait du nouveau du nom de...

«-Désolé pour mon retard, j'ai raté mon bus, et je ne savais pas où...

-Et vous êtes ?»

Des rires fusèrent, en réponse à la voix franche et sèche de M. Marton. Inconsciemment et involontairement, je pris la défense du nouveau et annonçai, du but en blanc :

«-Il s'agit du nouveau qui est arrivé hier. Il s'appelle...»

Et merde ! C'était quoi son nom déjà ?? Je rougis légèrement en sentant tous les regards posés sur moi, en particulier celui du nouveau qui finit par sourire et prendre mon relais, me sauvant in extremis d'une honte interstellaire (non, ce n'est pas du tout exagéré).

«-...Lylian Johnson. Comme l'a dit Zélina, je suis nouveau et je ne savais pas que...»

Je rougis davantage (je ne sais pas si c'est vraiment possible dans mon cas, mais bon) en l'entendant prononcer mon prénom. M. Marton prit la parole, un peu plus accueillant (enfin, accueillant façon M. Marton !).

«-Asseyez-vous, jeune homme. Je suis M. Marton, prof de science-nat' (oui, notre prof était resté bloqué au XXème siècle !) et je suis en train de rendre à vos camarades leurs fabuleux DS.»

L'ironie était palpable dans sa voix et certains élèves rigolèrent.

Lylian prit place au premier rang en se permettant de me lancer un regard reconnaissant, avant de reporter son attention sur le professeur, qui rendait la première copie à Elena, qui ne sembla pas vraiment faire attention aux réprimandes qu'il lui faisait.

Je tentai de calmer ma respiration soudainement saccadée et Elsa me chuchota, moqueuse :

«-Tu n'étais pas obligée de prendre sa défense tu sais ? Apparemment, il semble avoir l'habitude de sécher les cours !»

Elle acheva sa phrase par un regard mauvais dans la direction du nouveau. Je haussai les épaules, gênée et fis mine de m'intéresser au prof.

D'ailleurs, ce dernier s'approcha d'Evan et lui tendis sa copie, sans commentaire. Evan explosa de joie, de manière démesurée, comme à son humble habitude.

«-14 !! Je l'avais dit ! C'est mon jour de chance aujourd'hui !!»

Le prof le coupa, sourire aux lèvres :

«-Vous pourriez faire mieux M. Zlethanowic.

-Impossible, 14 c'est déjà le Graal ! répondit Evan, toujours avec cette certaine décontraction.

-Rien n'est impossible. Regardez Mlle Selly, elle a eu 16.»

Il rendit la copie à Elsa qui tira ouvertement la langue à Evan, qui sourit, trop content pour jouer au mec faussement vexé.

Ma copie fut la dernière rendue.

«-Mlle Evans, que dire à part comme d'habitude ?»

Il déposa ma copie devant moi. Un 20/20 y trônait, fièrement. Je souris, satisfaite.

«-C'est très bien, dit-il avant de rejoindre le tableau pour enchaîner sur la suite de la leçon.»

Elsa fit mine d'être jalouse et protesta, à voix basse :

«-Je suis sûre que tu triches !

-Je suis d'accord, s'incrusta Evan. 20 c'est pas possible. Surtout en SVT !

-On t'a pas sonné, toi ! le fusilla Elsa, mi-figue, mi-raisin.

-Exactement, Mlle Selly, renchérit le prof, amusé. Dîtes nous M. Zlethanowic, quelle est la différence entre le gabbro et le basalte ? Comme vous avez eu une si bonne note au dernier DS, vous devez être en mesure de me répondre !»

Je pouffai et Elsa fit de même. J'en oubliai presque l'interruption du nouveau, duquel j'avais déjà (et encore) oublié le nom.

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T1 | S'il suffisait que je te le dise...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant