- Javannah -
- Ça ne t'ennuie pas de faire toujours le même entrainement en boucle ?
Cela fait une dizaine de minutes qu'Amélia a cessé de s'exercer, et me regarde, assise sur une souche d'arbre, en mordant dans sa barre de céréales.
- Je veux dire, on fait des pompes, de la course, et encore des pompes.
Ma partenaire n'a visiblement pas remarqué que son avis m'importait peu. Je réprime un soupir, et tente tout de même d'être agréable.
- As-tu un moyen de rendre cela plus ludique ?
À peine essoufflée, je me relève et Amélia se précipite sur son sac de sport, abandonnant son goûter sur place. Après plusieurs secondes de recherche acharnée poncutées de quelques injures, elle en ressort un petit boîtier rose.
Je regrette déjà ma question. C'est bien la première fois que quelqu'un m'oblige à danser.
Une musique rythmée s'élève peu à peu dans les arbres, une mélodie gorgée de culture et d'histoire fait résonner l'air automnal.
Amélia se met à chantonner, ses bras et ses jambes déjà envoutés par le chant irrésistible. D'un geste de la main, elle m'invite à l'imiter. Malgré la cadence endiablée, mes pieds hésitent et mes poignets ne bougent pas assez.
- Je suis ridicule.
Le tempo semble s'accélérer à chaque note, et mes mouvements beaucoup trop mécaniques m'empêchent de suivre les instructions de la danseuse.
- Mais non, tu te débrouilles bien ! Mais ça serait encore mieux si tu te décoinçais un peu, si tu vois ce que je veux dire.
- Je... Ce n'est pas mon domaine, abandonné-je. Je n'y gagne rien, les pompes et la natation font tout autant travailler les muscles.
Les mains sur les hanches, Amélia me lance un regard de défi.
- Alors toi, il te faut toujours une motivation pour faire quelque chose. Et si je te disais que cette musique est utilisée dans les évènements importants des Chasseurs depuis des décennies ? C'est de notre sang, Javannah !
Mes membres se crispent. Non seulement cet air appartient à mon héritage, mais je n'ai même pas pu le reconnaître et encore moins réussi à danser.
- Je veux bien essayer.
Elle m'ordonne alors de fermer les yeux et de ne prêter attention qu'aux percussions. Tout ce qui est lointain reste lointain, mon ouïe trop fine s'aiguise et je mobilise toute ma concentration, oubliant les oiseaux et le vent, les voitures et les passants.
Il n'y a plus que la musique et moi. Les voix, les grands tambours et moi. La mélodie et mon cœur.
Bientôt, chaque son s'insinue en moi, et réveille toutes les parcelles de mon corps. Une vive chaleur témoigne de la coordination entre mes battements et la pulsation enivrante qui ne semble faire qu'un avec mon énergie.
Le regard admiratif d'Amélia m'encourage à ne plus la copier. Je me mets à danser librement, effectuant des pas que mon instinct me dicte, traçant le chemin d'une feuille perdue dans les souffles de la saison.
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Memoriae
FantasyLe jeune homme pose violemment le dossier sur la table. Table où reposent les charmantes chaussures de son interlocutrice endormie. Elle émet un grognement de protestation et s'étire. Puis ses yeux s'arrêtent sur le paquet de feuilles maladroitement...