III. Sire Éric Kilos

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J'arrive la première dans le petit salon.  Je remercie Errisson et je m'installe dans un fauteuil en attendant les autres.  Madame Lila est la première à faire son apparition.

— Ah, Mademoiselle Alia, je vois que vous êtes ponctuelle.

— Je n'aime pas être en retard.

— C'est parfait.  Nous attendons les autres afin de vous faire un petit cours rapide sur l'étiquette, et ensuite, vous rencontrerez Sire Éric.

Les autres arrivent plic-ploc.  D'abord Carine, pile à l'heure, suivie de près par Marina et Sandra et enfin, avec plus de dix minutes de retard, Brigitte.  Je vois bien que cela ennuie fortement Madame Lila, mais elle ne peut lui faire de remarque, aussi se contente-t-elle de dire :

— Maintenant que vous êtes toutes là, je vais vous expliquer comment vous adresser à la famille royale dans son ensemble.  Il va falloir faire plus court que prévu, car je n'ai plus beaucoup de temps.  Comme vous le savez, le Roi peut être appelé soit « Votre Majesté », qui est à préconiser, soit « Votre Altesse ».  Le second titre vaut également pour la Reine et le Prince.  Il vous est formellement interdit de les appeler autrement, sauf s'ils vous en donnent l'autorisation express, naturellement.  En ce qui concerne les Kilos, vous vous adresserez à eux de la même manière qu'à n'importe quel Élu de haut rang, à la différence que vous devez leur faire une révérence à chaque fois que vous les rencontrez, et également au moment où vous les quittez.  Afin d'éviter toute confusion, il a été convenu que vous les appeliez par leur prénom, comme il y a trois Sires Kilos au château.  Dame Kilos a également insisté pour que vous en fassiez autant à son encontre.  Je vous rappelle également qu'il vous est interdit de vous assoir, de manger ou de quitter une pièce sans leur consentement.  Ils sont de la famille royale, ne l'oubliez jamais.

« Toc toc toc ».  Les trois petits coups fatidiques.  Sire Éric se trouve derrière la porte et attend poliment qu'on l'invite à entrer.  Alors que les autres s'assurent qu'aucun cheveu ne dépasse ou lissent des plis imaginaires sur leur robe, Madame Lila va lui ouvrir, lui fait une révérence et quitte la pièce sans un regard pour nous.

— Mesdemoiselles, nous dit Sire Éric, je suis tellement content de vous voir.  Cela fait, pour certaines d'entre vous, plusieurs années que nous ne nous sommes pas vus, et je suis heureux que vous ayez accepté mon invitation.  Certes, les circonstances sont particulières, mais nous ferons en sorte que tout se passe pour le mieux.

Évidemment, je ne peux pas m'empêcher de remarquer à quel point il est beau.  Un peu moins que son frère, peut-être, et nettement plus petit que lui.  Brigitte le dépasse d'une demi-tête.  Elle va certainement ruer ses talons au placard pour porter des chaussures plates.  Ses cheveux sont brun très foncé, mais il a les mêmes yeux gris que Sire John.  Il est très agréable à regarder, si on excepte son regard hautain et son air snob.

Je soupire intérieurement, malheureuse comme les pierres, mais je ne vais rien faire pour le séduire, et une autre fille finira sa vie coincée avec lui.  Je ne veux pas me marier, et encore moins avec cet homme, aussi séduisant soit-il.  Quand il s'approche de moi, la dernière de la ligne, il me fait une révérence et un baisemain irréprochable.  Je lui rends sa révérence et me redresse avant de parler :

— Sire Éric, c'est un plaisir de vous rencontrer.

— Le plaisir est plus que partagé, même si les circonstances de notre rencontre m'attristent profondément.  Mais nous aurons le loisir d'en reparler plus tard, si vous le voulez bien.

— Oui, Sire, ne plombons pas l'ambiance d'entrée de jeu, nous aurons tout notre temps pour ça.

Il éclate de rire.  Un rire franc, honnête et chaleureux, puis il tourne les talons pour s'adresser à nous toutes.

Lys (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant