VII. Accusations

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Deux semaines se sont écoulées depuis l'exposition, et je n'ai pas vu le temps passer.  J'ai souvent des rendez-vous avec Éric, plus souvent que les autres filles, mais seule Brigitte m'en tient rigueur.  Et quand je ne suis pas avec Éric, je passe du temps avec son frère.  On discute, on se promène.  Toutefois, tout n'est pas rose.  Il semblerait qu'Éric ait fait comprendre à Marina que l'une d'entre nous allait bientôt reprendre le chemin de la maison.  Nous sommes toutes inquiètes, sauf Sandra, comme si elle savait quelque chose que nous, nous ignorions.

— Je n'ai pas envie de partir, dit Carine d'une petite voix.

— Il ne peut pas nous garder toutes les cinq à vie.  La polygamie est interdite par la loi, tente de plaisanter Marina, mais personne n'a envie de rire.

Nous voulons toutes rester, même moi.  J'ai appris à apprécier Éric, et j'attends nos rendez-vous avec impatience.  J'adore le croiser dans les couloirs, quand il n'est pas prévu que l'on se voit, ou quand il s'éclipse d'une réunion, juste pour venir me surprendre cinq minutes.  Mais j'aime aussi mes rencontres avec Sire John.  Nos discussions sont franches, ouvertes.  On se taquine beaucoup, mais il est de compagnie plus qu'agréable.  Non, je ne veux pas rentrer, même si ça ne serait que justice.  Je ne suis pas vraiment à ma place ici, je ne suis pas une Élue, et ça me tracasse un peu plus chaque jour, de mentir comme ça à tout le monde, mais je ne peux pas revenir en arrière, c'est trop tard, le processus est déjà allé trop loin.

— Je me demande à laquelle d'entre nous il va demander de partir.

— Moi, je sais que je vais rester, fanfaronne Brigitte.

— Et pourquoi cela ?

— Parce que nous sommes bien plus proches que vous ne le pensez.

— Tu dis n'importe quoi.  C'est Alia qui a le plus de rendez-vous avec lui, à mon avis, c'est la seule qui peut être sûre de rester.

— Mais l'a-t-il embrassée, elle ?

Silence général.  Nous la regardons toutes.  Embrassée ?  Éric l'a vraiment embrassée ?

— Eh bien, il semblerait donc que je sois la seule qui ait eu ce privilège.

Sa voix suinte la satisfaction, mais personne n'a le temps de lui répondre.  Sire Bernard et Dame Catherine déboulent dans le Boudoir sans s'annoncer.

— Mademoiselle Alia, veuillez venir avec moi, s'il-vous-plait, me demande Sire Bernard.

Je regarde les filles, puis me tourne vers les Kilos.  Je n'ai pas la moindre idée de ce qu'il se trame, mais je les suis diligemment jusque dans le bureau de Sire Bernard.  Dame Catherine est restée avec nous, et cela me soulage un peu.  Je tente de demander des explications, mais on me demande de patienter jusqu'à ce qu'on soit arrivé.  Lorsque la porte se referme derrière moi, on me désigne un siège et je m'assois.

— Mademoiselle Alia, nous avons reçu un courrier inquiétant à votre sujet aujourd'hui.

— Bernard, essaye d'être diplomate avec elle.

— Il vaudrait peut-être mieux que tu t'en charges alors.

Elle soupire, mais se tourne tout de même vers moi.  Je commence à être sérieusement inquiète.

— Nous avons reçu un courrier anonyme vous concernant.  Il semblerait que vous soyez morte, Mademoiselle.

— Diplomate, hein, entends-je Sire Bernard marmonner.

J'en rirais presque si je n'avais pas autant envie de pleurer.  La formulation de Dame Catherine est incongrue, mais cela veut dire que quelqu'un veut me voir condamné.

Lys (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant