XXVIII. Vérité

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Je dors comme les jours précédents, dans un grand lit, entourée de Marina, Carine et Brigitte.  Nous sommes toutes sous le choc, mais elles prennent soin de moi comme si j'étais celle qui en avait le plus besoin.  Sans doute ont-elles raison.  C'est moi qui me suis montrée capable du pire des actes.  J'ai tué quelqu'un d'horrible, mais pire, j'ai vu quelqu'un de bien se faire tuer.  Elise ne méritait pas ça, et même si elle avait choisi de le faire en âme et conscience, je ne peux m'empêcher de songer que j'aurais dû l'en empêcher.

Les cinq jours suivant passent comme dans un rêve... ou un cauchemar.  On nous apporte à manger dans la chambre, nous commençons à sortir de notre hébétude, nous continuons de faire notre deuil, et nous dormons énormément.  Je ne vais pas bien, mais je vais mieux, et bientôt, il faudra que j'affronte mes amis afin de leur révéler toute la vérité.

John et Éric sont aux abonnés absents, mais ils ont fort à faire avec leur père.   Je reste donc avec Marina, Brigitte et Carine, mais je préfère attendre que nous soyons tous réunis pour tout leur raconter.  Nous parlons énormément des évènements de ces derniers jours.  C'est très difficile, mais ça nous permet de soulager notre traumatisme et de réapprendre à vivre.

Nous sommes à la nuit du sixième jour quand John vient me chercher.  Je ne sais pas exactement quelle heure il est quand il entre dans notre chambre et vient me réveiller le plus doucement possible, évitant au maximum de déranger le sommeil des autres.

— Je suis désolé, me dit-il, mais il faut que tu viennes avec moi.

Je me lève donc et l'accompagne. Je n'ai pas le courage de lui demander ce qu'il se passe.  Je m'attends à une catastrophe de plus.

Il s'arrête devant une porte, mais se tourne vers moi avant de l'ouvrir.

— Alia, je veux que tu saches que, quoi qu'il se passe dans ce bureau, je t'aime, et rien ne pourra jamais changer ça !

Un sourire triste flotte sur ses lèvres, et je me hisse sur la pointe des pieds pour y déposer un tendre baiser.

— Moi aussi je t'aime, lui dis-je ensuite.

C'est la première fois que je le lui dis, et je me rends compte, à présent, au milieu de tout ce chaos, que c'est lui, et non Éric, que j'aime réellement.  Mes sentiments pour Éric sont purement amicaux.  Très fort, certes, mais je sais à présent que ce n'est pas de l'amour au sens propre.

Cette révélation me tombe dessus comme un soulagement.  Il a fallu en passer par l'enfer pour que je parvienne à cette conclusion, mais je n'ai pas le temps de savourer ce moment, ni même de le partager avec John, car déjà, la porte s'ouvre.

À l'intérieur, assis à un bureau de fortune, se tiennent Sire Bernard, Éric, et le petit Phoenix chauve et bedonnant que j'ai vu à mon procès.

— Je te présente Monsieur Regen, notre Phoenix, me dit John.

— Enchantée, lui dis-je en lui tendant la main, qu'il serre brièvement.

— Mademoiselle Alia, me salue Sire Bernard.  Je suis navré de vous avoir fait réveiller au milieu de la nuit, mais il faut absolument que je vous parle.  John, Éric, je vais vous demander de sortir, s'il-vous-plait.

Ils protestent vivement tous les deux, mais leur père ne leur laisse pas le choix, et je les rassure d'un hochement de tête.  J'ai survécu au Roi, et je ne doute pas que les intentions de Sire Bernard ne soient pas belliqueuses.

Une fois ses fils sortis, il se tourne vers moi en me souriant.

— Je me doute que tout ceci ne doit pas être évident pour vous, mais sachez que, même s'il était mon frère, je dois vous remercier d'avoir mis fin au règne du Roi.  Il était devenu fou, et il y a eu trop de morts en si peu de temps à cause de sa folie.

Lys (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant