VIII. Le procès

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Éric vient me chercher dans ma chambre à neuf heures cinquante.  Il ne dit rien, mais je sais qu'il ne veut pas me laisser affronter cette épreuve seule, et je lui en suis reconnaissante.  Nous descendons dans le hall d'entrée où nous attendons mon oncle.

J'ai peur, et surtout, j'ai envie que mon père se présente, mais je sais qu'il n'en sera rien.  Mon oncle veut tout contrôler et il ne laissera jamais mon père régler une affaire aussi importante.

Enfin, il arrive.  Malgré moi, je suis soulagée de le voir.

— Alia, dit-il en me prenant dans ses bras.  Je te promets que je vais trouver la personne qui a fait ça et la punir sévèrement.

Je ne dis rien.  Je croyais détester cet homme, mais à cet instant, j'ai besoin de ce qu'il m'offre : du réconfort, du soutien, un peu d'amour.

— Tout va bien se passer, d'accord ?

Je hoche la tête.  Éric s'avance alors, John l'a rejoint, et ils saluent mon oncle de manière très formelle avant qu'Éric ne prenne la parole.

— Je vous assure que tout ceci n'est qu'une formalité.  Nous n'avons pas le choix, mais nous ne doutons d'aucune manière de l'intégrité de votre famille.

Je ravale ma salive.  J'ai honte de moi, et honte qu'il ait une telle confiance imméritée en moi.  Certes, cette accusation est fausse, mais j'ai l'impression d'être une usurpatrice, quoi qu'en dise ma famille — et mon tout nouveau statut — je ne suis pas une Elue.

— Je n'en doute pas, répond mon oncle.

— Si vous voulez bien nous accompagner, nous allons retrouver notre père dans la salle du Jugement.

La salle du Jugement est une petite pièce où trône, sur une estrade, un grand bureau.  Il y a une chaise sur le côté, et quelques chaises en face de l'estrade, c'est tout.  On me demande de m'assoir sur la chaise sur le côté — la chaise de l'accusé, comme je l'appris ce jour-là.

Sire Bernard arrive peu après et salue à son tour mon oncle.  Ils discutent un peu, mais je n'entends pas ce qu'ils disent.  Sire Bernard prend ensuite place derrière le bureau tandis que mon oncle s'installe sur une des chaises vacantes, à côté de John et d'Éric.

Arrive ensuite le Phoenix du Roi, son conseiller personnel.  Il a fière allure, on pourrait presque croire qu'il est un Élu, lui aussi, mais après tout les Phoenix sont les Gradés qui en sont les plus proches.  Certains ont même le droit d'employer des Lys.

— Monsieur Rope, je suis heureux de vous voir.

— Sire, répond-il en s'inclinant et en s'installant à la droite de mon oncle.

— J'ai convié mon propre Phoenix à ce jugement, si cela ne vous dérange pas ?

Personne n'émet d'objection, et un petit homme chauve et corpulent fait son apparition.  Il s'installe plus loin que les autres.

— Commençons, dit alors Sire Bernard avant de se tourner vers moi.  Mademoiselle Alia Baronnet, vous êtes accusée aujourd'hui d'usurpation.  Une lettre anonyme nous a été envoyée afin de nous faire part du décès de la véritable Mademoiselle Alia Baronnet quelques heures seulement après sa naissance.  J'ai personnellement analysé cette lettre, et je l'ai transmise à Monsieur Rope ici présent.  Nous sommes tombés tous les deux d'accord sur le fait qu'elle n'émet que des suppositions, et aucun fait.

— Sire, je souhaiterais interroger l'oncle de l'accusée.

— Faites donc, Monsieur Rope.

— Sire Baronnet, que pensez-vous de cette accusation ?

Lys (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant